Créé en 2006 et basé à San Francisco, l’éditeur d’outils de gestion, de BI et de planning, est devenu une pépite du Cloud au même titre que Salesforces ou Amazon, la taille en moins. Anaplan dispose de bureaux à San Francisco et Chicago aux Etats-Unis, à Paris, Londres et Stockholm en Europe et à Singapour pour l’Asie. Ses grands clients s’appellent Aviva, Hewlett-Packard, Kimberly-Clark Europe et au niveau français Natexis Global Asset Management, Sanders ou Berluti, le fabricant de chaussures sur mesure, filiale de LVMH.

Là où il y a une frustration, sommeille un business

Pour le directeur Europe d’Anaplan, Laurent Lefouet (photo)laurentlefouet_bio_ que nous avons pu interroger, pour comprendre la démarche de la firme, il faut revenir à l’histoire de son créateur, l’actuel CTO  Michel Gould, un docteur en informatique issu de la faculté d’Oxford. Gould est passé sous les fourches caudines de firmes comme Adaytum rachetée par Cognos en 2002, cette dernière étant avalé par IBM en 2008. Il y a constaté que beaucoup d’entreprises utilisaient toujours des technologies dépassées et des applications héritées d’anciens systèmes «déconnectés» qui rendent une interaction dynamique entre les équipes presque impossible. De plus, pour Gould, les applications aptes à répondre aux besoins d’analyse sont pour les utilisateurs « métiers », trop compliquées et trop lourdes à paramétrer. En 2006, il quitte IBM avec l’intention de créer une solution rentable qui réponde à ce problème.

Début en 2010 et 150 millions d’investissements

Après quatre années de développement et de tests, il lance sa firme, Anaplan, en octobre 2010, avec l’aide de capitaux risqueurs. A la suite de plusieurs « rounds », en tout la firme a déjà reçu plus de 150 millions de dollars d’investissements. Elle fournit une base de données originale dite à base d’Hyperblock sur lequel se greffent de multiples outils de gestion. CubeAnaplan profite dés sa création de l’émergence du cloud, de la montée du modèle « in Memory » qui associé à la chute des mémoires ram a donc facilité l’adoption lente de modèles assez lourds que l’on pourrait qualifier d’hybrides. Le modèle de Gould veut combiner la puissance d’un SGBD avec celui d’un système décisionnel.

100 milliards de cellules au lieu d’un million

Laurent Lefouet, qui a été aussi l’un des ex leaders de Business Object ( BO) est passé de plus par SAP ; il connait bien  les liens qui peuvent unir une base de données avec des outils de gestion : « Il s’agit d’associer différents cubes multidimensionnels avec des liens basés sur des formules relationnelles. Au-dessus des cubes, on a un tableau qui exploite les données dans les trois dimensions. Cela permet d’exploiter plus de 100 milliards de cellules, là où Excel ne dépasse pas le million d’unités. Le système a fait l’objet d’un dépôt de brevet de prés de 25 pages.anaplan_02 Sur le site, chaque entreprise qui travaille sur le cloud dispose d’un espace de travail avec une puissance en terme de CPU, de volume de RAM et de pages. C’est une sorte d’Excel « bodybuildé », On Stéroid.» Toutes les transactions, modifications sont suivies au travers d’un système de gestion de Logs ce qui permet de revenir dans le cas de tests à différents étapes de traitement des données et modifier à la volée certains paramètres du logiciel. La firme se retrouve souvent en lice avec le logiciel TM1 ( IBM ex Cognos), Hyperion ( Oracle) ou encore  Steelwedge.

Une rentabilité qui tarde à venir

La souplesse dans le paramétrage serait la constante du modèle Hyperblock d’Anaplan, une sorte de moteur multiprocesseur qui aide au développement d’outils de planification budgétaire ou de contrôle de gestion. C’est au travers des applications complémentaires de Salesforces (CRM) et Workday ( logiciels pour les ressources humaines) que la firme paraît  le plus progresser. anaplan-for-sales-performance-management-incentive-compensation-management-10-638Son directeur, le français Frédéric Laluyaux (photo), un ex de BO aussi, expliquait à nos confrères du journal L’Opinion en juin 2014 : «Dans le monde, notre société a réalisé 11 millions de dollars de chiffre d’affaires en 2012. L’année suivante, nous avons pu réaliser 10 millions de dollars par trimestre, et pour 2014, on est capable de faire jusqu’à 10 millions de dollars… par mois ! » Valorisée désormais à prés de 1 milliard pour certaines revues boursières, la firme n’a pas officiellement de plans pour entrer en Bourse rapidement mais gageons que les investisseurs au bout de 5 ans auront hâte de profiter de leurs investissements. Pour Laurent Lefouet, il n’y pas de précipitation à avoir, l’objectif demeurant la conquête de grands clients à l’affut de nouvelles approches financières, d’économies dans le cloud, les programmes livrés avec Anaplan permettant de supprimer d’anciens logiciels obsolètes.

Rendre les outils d’analyse moins complexes

Laurent Lefouet, constate aussi: « Bien des utilisateurs qui ne sont pas des informaticiens n’arrivent pas s’approprier les outils trop complexes. Ils doivent se résoudre à exploiter les modèles statiques qui ne peuvent pas suivre le rythme de changement quotidien. Ils font des extractions de données à chaque fois, bien que celles-ci ne cessent d’évoluer. La plupart des utilisateurs continuent de faire de la planification sur Excel. Sauf que cela ne permet pas de gérer en même temps la complexité des modèles de données, les besoins de collaboration et d’énormes volumes de données en temps réel ».

MacAffee et HP l’utilisent en collaboration avec Salesforce

La firme qui travaille en collaboration avec Workday et Salesforce qui ont investi dans Anaplan propose une solution de planification cloud pour les ventes, la finance et les organisations. Elle permet, par exemple, de surhub_paris_wrap_6-300x224veiller le cycle du pilotage commercial (de la distribution des territoires et des quotas pour 3500 commerciaux jusqu’au calcul des commissions) chez MacAffee. « Ils ne sont pas les seuls , auparavant pour obtenir leurs feuilles d’objectif et leurs quotas, les 23 000 commerciaux d’HP devaient attendre presque trois mois, fin janvier, l’année fiscale se clôturant en novembre. Désormais depuis que HP  a amélioré ses modes de fonctionnements, elle exploite Anaplan et l’affaire s’effectue en quelques semaines. La firme en procédant à une rationalisation de ses logiciels a voulu passer de 7000 programmes à 700 et notre logiciel a été sélectionné » ajoutait Laurent Lefouet.

Un positionnement métier affirmé

La société travaille également en partenariat avec les SSII Accenture et Deloitte. Anaplan s’est doté d’un catalogue d’applications sur lequel Deloitte ou Accenture développent des applications métiers. «Ils peuvent utiliser la puissance de notre infrastructure en cloud et développer de nouveaux services » précise Laurent Lefouet. Anaplan souhaite devenir l’outil de référence des directeurs financiers et faciliter la création de leurs benchmarks. Dans l’industrie alimentaire, Anaplan est utilisé par des entreprises internationales pour planifier les processus de ventes par produit, par pays, par typologie de client, un travail qui doit prendre en compte les marges et la concurrence. Ce travail de simulation qui doit aussi permettre l’établissement de projets reste à la portée des utilisateurs avertis. Interrogé sur le fait que l’obstacle numéro 1 paraît être justement le petit nombre de personnes formées, et le fait que pas mal d’outils de Big Data pourraient aussi réaliser ce type d’études, Laurent Lefouet concluait : « La formation d’un analyste sur la solution Anaplan est courte : elle se déroule sur 3 jours seulement et la personne qui signe le contrat dispose d’un nombre d’heures d’autoformation illimité sur notre site. En ce qui concerne le Big Data, il faut justement des personnes hyperspécialisées et des échanges entre l’informatique et les métiers et cela n’est pas toujours simple. »

L’avenir passera t-il par un « grignotage » des ERP ?

Commentant un article sur la fin des ERP sur notre site InformatiqueNews, Michel Maurel, Fondateur associé de l’intégrateur Pentaphi, écrivait : « De nombreux utilisateurs d’Anaplan utilisent aujourd’hui cette solution pour adresser des problématiques purement opérationnelles et transactionnelles qui, en d’autres temps, auraient été développées en spécifiques autour d’un ERP.

L’intérêt d’Anaplan tient à sa flexibilité, le système opérationnel et transactionnel est directement consultable en mode BI et exploitable en tant que source de données natives pour le prévisionnel. La fin de l’ERP et son remplacement par Anaplan signifie aussi la fin de l’ETL et des datawharehouse. Pour la fraction du prix d’un ERP + ETL + Datawharehouse + BI, on peut utiliser des outils comme Anaplan sur certains processus transactionnels et adapter ses processus aux besoins métiers ». En plein développement commercial, la start-up espère trouver la rentabilité cette année ou en 2016 au plus tard.