Alors que la liste des 500 plus puissants supercalculateurs va être publiée montrant sans doute la montée en puissance de la Chine, six sociétés américaines se partageront $258 millions pour le projet de computer Exascale destiné à assurer la domination des Etats Unis dans les supercomputers  (High Performance Computers) de nouvelle génération.  En Europe, le seul acteur présent est Atos via Bull rachetée en 2014.

La prochaine génération de supercomputers sera-t-elle américaine  ou chinoise ? Cette nouvelle course à la puissance a été aujourd’hui lancée par Rick Perry, Secrétaire d’Etats Américain à l’Energie qui dévoilait les noms des 6 sociétés qui participeront au projet Exascale Computing Project (ECP) dans le cadre du PathForward program initié durant l’été 2016 par une RFP (request for proposal) lancée par le DoE (Department of Energy). Ce programme, financé par le gouvernement américain, est géré par le Lawrence Livermore National Laboratory (LLNL) dans un consortium regroupant les plus prestigieux laboratoire de R&D américains : Argonne National Laboratory (ANL ), Lawrence Berkeley National Laboratory (LBNL), Los Alamos National Laboratory (LANL), Oak Ridge National Laboratory (ORNL), and Sandia National Laboratories (SNL).

Les 6 sociétés retenues qui participeront au projet sont AMD, Cray, HPE, IBM, Intel et Nvidia. Elles se partageront la somme de 258 millions de dollars, à la condition qu’elles ajoutent elles même jusqu’à 40% au moins du montant de la totalité du coût du projet, ce qui porte l’ensemble du projet à 430 millions de dollars.  Les collaborations extérieures aux Etats Unis ne sont en principe pas admises dans ce projet.

Exascale va au-delà de la notion de HPC, souvent essentiellement centré sur la puissance du hardware, évaluée en nombre d’opérations par seconde… « Il réfère à des systèmes de traitements qui sont au moins 50 fois plus rapides que les plus rapides des supercomputers utilisés actuellement » … « Nous visons un premier système exascale livré en 2021, prêt à être mis en production en 2022 » indiquait Paul Messina, directeur du projet lors d’une présentation à un groupe d’utilisateurs de HPC en avril dernier. « Il sera basé sur une architecture avancée ce qui signifie que nous sommes ouvert à quelque chose qui ne sera pas nécessairement l’évolution directe de ce que nous avons déjà disponible dans les National Laboratories »…

L’objectif de Exascale est donc d’accélérer 26 applications majeures dans six domaines jugés stratégiques par les Etats Unis pour maintenir leur compétitivité. Ce sont la sécurité nationale, la sécurité énergétique, la sécurité économique, la recherche scientifique, la terre et son fonctionnement, la santé… chacune des 26 applications représentant des challenges particuliers aujourd’hui non résolus.

Le communiqué de presse du ministre de l’Energie Perry n’est pas équivoque sur les enjeux mondiaux de ce projet : « Alors que les US ont 10 des ordinateurs les plus rapides du monde, son plus puissant, le Titan qui se trouve à Oak Ridge National Laboratory, se place en troisième position derrière 2 autres systèmes en Chine. Cependant, les Etats Unis gardent le leadership dans les applications réelles des traitements de haute performance dans la sécurité nationale, l’industrie et la science… ».

Les projets présentés par les 6 sociétés ne seront pas redondants et ils devront répondre à des exigences de collaboration entre les sociétés définies dans un schéma de co-design holistique qui a été défini pour une période de 7 ans au lieu de 10 initialement prévues,  les principaux composants de l’architecture du premier exascale devant être connue en 2019. Ils porteront sur les mémoires, le stockage,  les interconnexions, un haut niveau de parallélisme,  une résilience aux pannes, une consommation énergétique limitée…et une couche système qui permette la mise en œuvre d’un large éventail d’applications et de charges de travail. Le premier critère retenu sera la performance des applications, viendra ensuite l’agressivité des options technologiques  choisies. Il est spécifié que le test Linpack, le benchmark qui mesure la performance de la plupart des ordinateurs aujourd’hui n’est pas approprié et ne sera pas un critère de choix sachant que le focus est centrée sur les applications.

La société d’analyse de marché Hyperion (anciennement IDC) mentionne que le segment des ordinateurs HPC a connu une croissance de 4,4% en 2016 avec un chiffre de 11,2 milliards de dollars. C’est le segment des ordinateurs de haut de gamme (prix unitaire supérieur à $500 K) qui a connu la plus forte croissance alors que le segment des ordinateurs de prix inférieur à $100K était en baisse. La croissance en 2017 devrait doubler. Les principaux acteurs du secteur HPC sont HPE (34,6% de part de marché), Dell (17,9%) et Lenovo (8,1%). L’étude mentionne Fujitsu (+43,2%)  et Atos Bull (+22%) comme ayant connu les taux de croissance les plus importants de vente de HPC.

Paul Messina mentionnait cette étude de Hyperion dans la présentation. Elle fait aussi le point sur les projets de recherche de 2ème génération exascale  aux USA, en Europe, en Chine et au Japon et elle estime les investissements qui seront effectués dans les différentes régions du monde.