Pour le neuvième trimestre consécutif, IBM a dû essuyer une baisse de son activité, quasiment sur tous les fronts, services, logiciels et matériels.

« Nous sommes désappointés de nos résultats » a déclaré Ginni Rometty, CEO d’IBM en commentant les résultats du 3e trimestre de l’exercice 2014. Il est vrai que Big Blue a connu de meilleurs moments. Mais gardant le moral au beau fixe, la CEO de la compagnie continuait sur un mode positif : « nous avons réalisé de bons résultats dans les domaines stratégiques que sont le cloud, l’analytics, la sécurité, le mobile ». Le problème est que ces activités ne représentent pas encore un part suffisamment importante pour renverser la tendance.

20 IBM2

Parallèlement à ses résultats, IBM poursuit son désengagement dans la production en cédant son activité IBM Microelectronics incluant ses unités de fabrication, son personnel et la propriété intellectuelle à la société GlobalFoundries. Cette fonderie est résultat du désengagement en 2012 d’AMD dans la fabrication des semiconducteurs. Elle est aujourd’hui détenue par le fonds souverain d’Abu Dhabi Advanced Technology Investment Company et fabrique des circuits intégrées pour AMD, Broadcom, Qualcomm et STMicroelectronics. Elle sera le fournisseur exclusif pour IBM pour les 10 années à venir pour les processeurs Power. IBM a rappelé ses engagements dans la recherche en semiconducteurs d’un montant de 3 milliards de dollars sur les 5 ans à venir. Pour l’heure, IBM a dû débourser 1,5 milliard de dollars parallèlement à la cession de cette activité et a inscrit une charge exceptionnelle de 4,7 mds$ pour l’exercice.

Dans cet environnement plutôt morose, Ginni Rometty a été nommé d’après le magazine Fortune la femme la plus puissante du monde économique parmi les 24 femmes qui président aux destinées d’une entreprise du Fortune 500. La réussite personnelle de la neuvième CEO est indéniable mais elle ne doit pas masquer une situation préoccupante et concomitante à son arrivée à la tête d’IBM. Certes, son discours tranche un peu par rapport à Sam Palmisano en mettant plus en avant la position d’IBM aux avant-postes du développement technologique et en développant l’idée qu’IBM ouvre une nouvelle ère de l’informatique baptisée informatique cognitive. « Watson est la troisième étape d’une longue évolution des technologies, expliquait au début de l’année la CEO d’IBM. La première, celle des tabulatrices, était constituée de machines qui n’avaient aucun degré de liberté. La seconde, celle des machines programmables, a donné naissance aux ordinateurs et aux traitements de type « if, then ». La troisième, celle inaugurée avec Watson, ouvre la voie des machines cognitives. Des machines qui parlent notre langage et deviennent plus intelligentes ». Mais pour l’heure, IBM doit transformer cette prouesse technologique en solution commerciale.

20 IBM2

Mais ce qui pourrait être présenté comme un incident de parcours semble en fait s’inscrire dans un lent processus de dégradation tant en interne qu’en externe. Delon la formule de l’investisseur Peter Greulich[1] de MBI Concepts (The Investment Contest Of The Century: Warren Buffett And The Stock Market Go Toe-To-Toe Over IBM): « les collaborateurs sont démotivés et IBM le sait, les clients sont fatigués des luttes politiques internes qui détruisent les forces de vente, des coûts de maintenance et d’intégration pour la mise à niveau des logiciels de middleware, quant aux investisseurs ils sont devenus hésitants (…) Si Warren Buffet émet le moindre doute demain dans une interview, la valeur de son portefeuille diminuera. S’il annonce un nouveau rachat, il augmentera ». Il faut rappeler que Warren Buffet est depuis novembre 2011 l’investisseur le plus important d’IBM avec un peu plus de 7 %.

Pour l’heure, les éléments de satisfaction sont plutôt rares puisque, selon la nomenclature traditionnelle, tous les clignotants sont au rouge : services technologiques ou métier, logiciels, matériels. Sur ce dernier chapitre, les chiffres sont éloquents, en l’espace de deux ans, l’activité a été réduite de plus de 40 % et représente désormais à peine plus de 10 % du chiffre d’affaires total. Certes, Big Blue met en avant ses réalisations dans le cloud, le big data, Watson… mais celles-ci sont intégrées dans les chiffres globaux et n’apparaissent donc pas encore en pleine lumière. IBM devrait à terme réorganiser la présentation de ses chiffres pour mieux montrer le chemin parcouru et les progrès accomplis. En attendant, la compagnie continue sa politique de rachat d’action pour en maintenir le cours et satisfaire ses actionnaires. « IBM semble investir plus dans ses actions que dans ses affaires » pourrait-on conclure selon la formule abrupte de Peter Greulich.

 

__________
Premiers succès commerciaux pour Watson d’IBM
Watson d’IBM à la Mayo Clinic
Elémentaire mon cher Watson !
IBM lance le Watson Mobile Developer Challenge
IBM réaffirme ses ambitions avec Watson
Watson d’IBM à la peine

 

[1] Peter Greulich vient de publier le livre A View from Beneath the Dancing Elephant Rediscovering IBM’s Corporate Constitution