Syntec Numérique et Syntec Ingénierie s’indignent et s’opposent au changement opéré par l’administration fiscale de la doctrine relative à la sous-traitance en matière de recherche et développement. Elle a usé de prérogatives ne lui appartenant pas, et mis en péril la pérennité du CIR.

L’administration fiscale française a très récemment opéré un revirement drastique de sa doctrine administrative relative à la sous-traitance en matière de crédit d’impôt recherche (CIR) (BOFIP BOI-BIC-RICI-10-10-20-30-20140404 du 4 avril 2014)

Cette nouvelle instruction remet en cause la possibilité pour les entreprises sous-traitantes agréées[1] par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR) d’inclure dans leur déclaration de CIR les projets de recherche et développement qui ne sont pas valorisés par leurs clients privés français, même si ceux-ci y renoncent expressément ou sont au plafond.

Elle rapporte ainsi la doctrine administrative du 8 février 2000 qui prévoyait que, dans le cas où le client privé ne bénéficiait lui-même du CIR, la société effectuant les prestations pouvait inclure les sommes correspondantes dans la base de calcul de son propre CIR.

En neutralisant la récente jurisprudence en la matière, et en ajoutant à la loi au lieu de l’interpréter, cette nouvelle doctrine méprise à la fois le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif.

Cette position, applicable immédiatement (a priori aux projets réalisés en 2013) :
– met en péril la pérennité du CIR,
– représente un risque accru de redressement pour l’ensemble des entreprises sous-traitantes agréées
– et creuse la distorsion de concurrence existante entre sociétés agréées et non agréés.

A un mois de la date limite de déclaration du CIR pour 2013, elle brise ainsi la confiance des entreprises dans la stabilité et la sanctuarisation de ce dispositif, pourtant promise par le Président de la République.

Créé pour soutenir la recherche en France, le mécanisme du CIR est aujourd’hui jugé comme de plus en plus dangereux et aléatoire par les entreprises, qu’elles soient françaises ou étrangères. Ce nouveau texte vient conforter ces craintes, et pourrait conduire à des délocalisations, ou à des réductions d’effectifs.

Ce revirement intervient dans un contexte particulier pour le numérique. Engagée depuis septembre 2012, la discussion sur le CIR entre Syntec Numérique, les parlementaires et le Gouvernement a abouti en juillet 2013 à la création d’une commission tripartite, regroupant des représentants des sociétés du numérique, des membres de l’administration fiscale, des membres du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR), et des représentants du ministère du redressement productif.

Elle a pour mission d’étudier les freins à l’utilisation du Crédit d’impôt recherche par les entreprises du numérique afin de favoriser la recherche et l’innovation en France, et à faciliter les relations entre les utilisateurs du CIR, et l’administration, au travers notamment :

– de la définition de la R&D propre au secteur
– des attentes de l’administration en termes de documentation et d’état de l’art, souvent incompatibles avec la réalité du terrain
– de la procédure de contrôle, actuellement non contradictoire et donc non protectrice des intérêts des utilisateurs
– de la distorsion de concurrence existant entre sociétés agrées au CIR et sociétés non agréées au CIR.

En publiant ce texte, à l’issue des Assises de la fiscalité et malgré la concertation en cours, sans discussion avec les acteurs concernés, l’administration a démontré qu’elle n’était pas réellement engagée dans un esprit de dialogue et de transparence avec les acteurs de la recherche française.

Selon Guy Mamou-Mani, Président de Syntec Numérique, et Stéphane Aubarbier, Président de Syntec Ingénierie : « Le CIR est un outil essentiel pour l’attractivité de la France et le développement de la recherche française. En changeant sa doctrine et en allant au-delà de la loi, l’administration crée une insécurité juridique supplémentaire pour les entreprises. Dans de nombreux cas, nous risquons de voir des sociétés délocaliser leurs centres de R&D ou s’effondrer sous le poids des contentieux créés par cette nouvelle instruction. Pour le numérique et l’ingénierie, secteurs créateurs d’emplois à forte valeur ajoutée, cette position est inacceptable. »