Le week end prochain, le beau temps et les milliers de monuments nouveaux devraient consacrer des journées du patrimoine lancées en 1984 par Jack Lang. L’engouement des français pour leur histoire tient aussi à la mise en ligne par les services publics depuis à peine 15 ans de dizaines de millions de documents historiques, en libre accès. Chacun peut devenir l’historien de sa communauté familiale.Une révolution dans nos rapports avec l’Etat, détenteur en quelque sorte de l’histoire d’une partie de chaque famille.

Dans une récente études de Ipsos-Sopra Steria, 75 % des Français estimaient la transformation numérique des services publics comme étant une priorité nationale et 89 % des personnes interrogées seraient prêtes à adopter l’administration en ligne, une preuve que lorsque les services fonctionnent, le  » french bashing » peut s’arrêter.

L’appétit pour la consultation en ligne de l’état civil a permis de valoriser les archives de tous types. Cette année la célébration du centenaire des débuts de la Grande Guerre et le 400eme anniversaire de la mort de Louis XIV en septembre 1715, ont étés l’objet de recherches approfondies  et les résultats ont nourris tous les grands hebdomadaires de l’été. Ce sont près de 800 000 français qui s’adonneraient à la généalogie en ligne, en amateur et l’on trouve déjà au sein de prés de 350 associations prés de 70 000 généalogistes convaincus et pratiquants. L’ engouement est certainement dû aux récentes mises en ligne de documents, non seulement dans les départements (début 2015, 94 départements français sur 101 avaient mis en ligne des archives) mais aussi dans un nombre croissant de grandes villes (65 en septembre 2015). Ces dernières y voient un moyen de séduire leurs concitoyens et électeurs et de mieux maîtriser des dizaines de tonnes de documentations que personne ne veut jeter. Les premières mises en ligne de documents d’archives en France ne datent pourtant que de 2003. Avant, il fallait se déplacer et les négociations avec les employés de ces services, soucieux de la bonne conservation des documents originaux étaient souvent irritantes. Désormais les risques « d’usure » ou de déchirures sont oubliés. En 2012, plus de 2 milliards de pages avaient été consultées en ligne.

Paris sauvé des flammes

Ne serait-ce qu’à Paris la mise en ligne de l’état civil reconstitué, celui qui prend en compte les actes officiels avant l’incendie de l’hôtel de ville en 1870 a permis de ressortir récemment 3,5 millions de documents sur les 8 millions qui avaient disparus dans les flammes.

Le phénomène informatique qui permet de retrouver ses ancêtres à distance, mais aussi souvent  rechercher une identité valorisante où des traces de patrimoines envolés,  s’expliquent aussi par l’emphase donnée par les pouvoirs publics à l’histoire et aux journées du patrimoine, tous les troisièmes dimanches de septembre. Ceci s’explique aussi, selon les libraires, par le succés des livres d’histoire et les biographies. Beaucoup de curieux aimeraient savoir ce que faisaient leurs ancêtres à la révolution ou à la Saint Barthélemy. Selon le ministère de la Culture,  du côté des visites concrêtes, ce sont douze millions de personnes qui se sont, par exemple, pressées en 2013 pour visiter des bâtiments généralement interdits au grand public. Dans ce domaine, la France, avec ses 43 000 monuments historiques (inscrits ou classés) et ses 2000 Parcs ou jardins protégés profite  aussi du succès du tourisme. Bref, les raisons de partir à la recherche de ses ancêtres sur Internet et de mieux faire partie d’un pays que l’on connait souvent mal, sont nombreuses.

L’engouement récent pour la généalogie est un phénomène français

En 2010, le ministère de la Culture annonçait déjà près d’un milliard de documents consultés. Depuis le nombre des documents mis à disposition a été multiplié par 100, on ne peut plus les compter, selon les généalogistes qui s’organisent par bataillons pour absorber cette avalanche de documents. Les problèmes d’identités nationales, qui ne sont plus un sujet de conversation courante, se soigneraient en cultivant ses racines, car rares sont les familles qui ne possèdent par de branches exotiques ou des racines étrangères. Pour Jean-Louis Beaucarnot, l’un des généalogistes les plus connus en France, le succès tient au moins à trois raisons :  l’allongement de la scolarité (et du niveau intellectuel), les débuts de la civilisation des loisirs, l’allongement de la durée de la retraite. Pour lui à l’exception des pays construits par l’émigration ( les Etats-Unis et l’Australie) , la généalogie et son utilisation via l’informatique personnelle serait bel et bien un phénomène spécifiquement français. « Aucun pays ne connaît l’engouement qui peut être observé en France. Comme l’explique Jean-Louis Beaucarnot, lors des réunions organisées par les clubs de généalogies, la France a un effet rayonnant : « les pays connaissant actuellement un développement de la généalogie sont presque tous limitrophes de la France (Belgique, Luxembourg et Suisse, Hollande, Angleterre, Allemagne), tout en offrant une situation sans commune mesure à celle observée en France ».

Le papy-boom qui correspond au baby-boom des années 40 et 50 ne fait qu’augmenter le nombre de personnes bien formées à l’informatique bientôt à la retraite ou sans travail et prêtes à aller à la chasse aux souvenirs. Cette démarche est souvent une occupation de personnes qui analysent leur vie passée car leur futur parait incertain. Le nombre de personnes de 60 ans ou plus a crû de 22,6 % en dix ans et leur part dans l’ensemble de la population française est presque équivalente à celles des jeunes de moins de 20 ans (respectivement 23,5 % et 24,5 %).

Que peut-on consulter à distance?

Variant selon les départements, les archives en ligne peuvent être la totalité des registres d’état civil, paroissiaux ou simplement des tables décennales. Certaines archives proposent également des cartes, des photographies ou des cartes postales anciennes et depuis 2013 la mise en ligne des registres matricules (archives militaires) progresse suite à la commémoration du centenaire de la Première Guerre mondiale. Huit départements n’ont donc pas encore d’archives en ligne et nécessitent de se déplacer pour consulter les fonds documentaires

  • Corse-du-Sud
  • Gard
  • Gers
  • Haute-Vienne
  • Hautes-Pyrénées
  • Jura
  • Seine-Saint-Denis

Les départements plus avancés

Toujours d’après le Ministère de la Culture, les archives départementales en France sont plus avancées que les communes dans la numérisation de leurs documents et proposent à la consultation en ligne, de manière plus ou moins exhaustive, de nombreux documents d’états-civils et autres registres tels que les cadastres, fonds iconographiques ou encore journaux et délibérations administratives.

Bref , le choix pour partir à l’aventure et remonter les couloirs du temps est immense.