Les entreprises exigent toujours plus de mobilité, de sécurité, d’agilité : une technologie toujours plus performante.  Pourtant, lorsqu’un projet échoue, on constate 8 fois sur 10 que les causes sont liées à la gestion de l’humain et à l’organisation et non à la technologie. Tout changement, dans une organisation, porte son lot d’insécurités, notamment liée à la crainte de perdre sa place, qui peuvent entrainer des réticences individuelles. C’est un phénomène humain répandu. A l’ère du digital, où la technologie ne cesse de changer la donne, l’humain est plus que jamais porteur de l’innovation. Pour réussir face à cette révolution, les dirigeants doivent sans attendre initier le changement humain, et répondre aux véritables questions qui se posent : Que va-t-il arriver à l’organisation ? A qui revient la responsabilité ? Quels rôles et compétences déployer ? Comment instaurer une culture de l’innovation ?

Chaque entreprise y répondra selon ses besoins, sa stratégie, ses moyens. Mais que peut-on apprendre de l’expérience en matière de transformation digitale et d’accompagnement humain ?

Origine de la résistance « humaine »

Avant d’être d’origine psychologique, la résistance a parfois des causes « organiques », c’est-à-dire liées à la manière dont l’organisation fonctionne. En effet, la dynamique et la culture de cette dernière influent fortement sur l’individu et son évolution.

Dans un grand nombre d’organisations, une forte démarcation existe entre les différents départements, autrement appelés « silos ». Conflits de priorités, difficultés pratiques à mobiliser les ressources sur un sujet transverse… Ces pratiques ne pourront supporter l’activité digitale sans une refonte des processus et des responsabilités.

Or la simple création d’une nouvelle équipe en charge des services digitaux est elle-même un défi. La répartition des tâches et la hiérarchie traditionnelles sont autant de freins « mécaniques » pour les individus. Même prêts professionnellement à porter le digital, il leur est difficile d’être en marge de l’organigramme, ou encore de risquer leurs projets de carrière dans l’entreprise.

Souvent alourdies par les nombreuses années passées à stratifier et identifier les responsables en cas de problème, les organisations n’encouragent plus leurs collaborateurs à questionner le statu quo, ou à briser les silos.

Pour tenter d’y pallier, certains les mettent à part et génèrent ainsi un élitisme entre les équipes en charge de l’innovation (sorte “d’équipe A”) et les équipes du legacy (“équipe B”) ayant pour effet de démotiver l’équipe B et d’isoler l’équipe A, tout en créant un nouveau silo.

Il faut alors relever ces défis d’accompagnement humain. Il ne s’agit pas ici de révolutionner, ni brouiller l’organisation, mais au contraire, de clarifier, rationaliser, et garder le cap.

Véhiculer un sens de l’opportunité, valoriser et responsabiliser les collaborateurs

Les entreprises adoptent le plus souvent des technologies innovantes pour produire davantage avec autant de ressources, plutôt que réduire leurs effectifs. Confrontées à une montée en charge de nouvelles compétences, elles peuvent offrir de véritables opportunités d’évolutions de postes. Mais ces perspectives ne sont pas toujours perçues.

Manié avec soin par la Direction et communiqué positivement auprès des salariés, le spectre du changement peut s’avérer un vecteur de motivation. L’implication directe de l’équipe de direction dans ces sujets, sa capacité à articuler une vision claire de l’organisation à court, moyen, long terme seront déterminantes pour la réussite de ces changements.

Ces nouvelles équipes, cellules innovantes, devront insuffler un nouveau modèle de fonctionnement en phase avec la technologie, et, pour se faire, s’affranchir des silos traditionnels. Dans l’ère du Cloud tout va très vite, les métiers n’attendent plus. L’automatisation a un impact considérable sur la vitesse de déploiement des technologies, nécessitant des chemins décisionnels tout aussi réactifs. On quitte le modèle traditionnel de répartition des tâches, où les limites de chacun étaient définies. Les services digitaux sont gérés de bout-en-bout et chacun est missionné pour la réussite de l’ensemble.  Pour que cela soit possible, le mot clé est la responsabilisation des collaborateurs.

Passer d’une répartition des tâches à un modèle de responsabilisation requiert une culture adéquate, qui valorise l’innovation.

Instaurer la culture de l’innovation en s’entourant des bonnes personnes

Pour restaurer cette culture de responsabilisation, on peut s’inspirer des jeunes start-ups : recherche d’innovation, mobilisation autour d’un projet commun, encouragement des initiatives, questionnement du statu quo.

En entreprise, stratifiée et complexe, quelques « champions » du changement, capables d’apprendre rapidement, de défendre une nouveauté, et de collaborer avec le reste de l’organisation, seront garants de cette culture, sorte d’incubateurs, et aideront les autres à adopter les bonnes pratiques. Parfois en rupture avec la culture hiérarchique ambiante, ces champions auront besoin du soutien de la Direction et d’un modèle d’évaluation adéquat.

Recruter ces agents du changement est une tâche délicate. En plus des connaissances technologiques de pointe, le candidat doit avoir une attitude de pionnier et une aptitude au leadership. Ce candidat idéal n’existe pas : sur le marché, les compétences commencent, elles aussi, leur mutation. La majorité des organisations prennent la décision de miser sur les compétences déjà existantes dans l’entreprise. Repérer les bons profils, affecter les postes clé et les faire évoluer progressivement vers les rôles cibles, sont les préoccupations des organisations leaders du digital.

L’histoire récente montre que l’on n’arrête pas une révolution technologique en marche. Résister au changement c’est risquer de perdre la partie. Définir les rôles, localiser les compétences, projeter une vision claire et construire la culture digitale, sont les gages d’une transformation viable et pérenne, d’une organisation toujours prête face à une technologie chaque jour plus performante.

 

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Yohanna Emkies est Lead Operations Architect, VMware