Microsoft a lancé en fanfare Windows 10 (Free Upgrade Available in 190 Countries Today) dans un monde où le PC voit sa présence et son influence diminuer régulièrement. Quel avenir pour Microsoft dans un tel contexte ?

Mettre un PC sur chaque bureau et dans chaque salon, la mission qu’avait assigné Bill Gates à Microsoft a été largement accomplie. Mais le co-fondateur de la firme de Seattle avec Paul Allen qui le rappelait dans un mail célébrant le 40e anniversaire de l’entreprise (Here’s the Email Bill Gates Sent Commemorating Microsoft’s Fortieth Birthday) n’avait prévu que le PC serait bousculé par une nouvelle technologie (mais qui aurait pu la prévoir ?) : le mobile.

Après l’intermède de Steve Ballmer qui a su mettre toute son énergie à la conduite de l’entreprise malgré un manque de vision, Satya Nadella a d’emblée insufflé une nouvelle stratégie à la compagnie dont le mot d’ordre tient en quelques mots : « mobile-first, cloud-first ».

Windows 10 va certainement accaparer les parts de marché de ses prédécesseurs sachant que primo il est gratuit pour la première année et secundo il n’a pas vraiment de concurrent. Les assauts répétés des différentes versions de Linux pour le poste de travail se sont toutes révélées infructueuses. Il est vrai que le partenariat avec Intel atour de ce qu’on a appelé la plate-forme Wintel et l’association avec tous les constructeurs de PC pour y inclure de facto les versions de Windows a fonctionné à merveille.

Mais, malgré les développements de Windows pour le mobile prévus d’ici la fin de l’année (Windows 10 : c’est parti !), la partie semble d’ores et déjà jouée. Malgré les tentatives répétées depuis les années 2000, Microsoft n’a pas réussi à s’imposer dans le monde du mobile. Ce qui est très ennuyeux pour Microsoft étant donnée la place de ce nouveau terminal dans la vie quotidienne, professionnelle comme personnelle : « Comme nous l’avons tous bien compris, le mobile est en train de remplacer le PC comme plate-forme informatique dominante, écrit Benedict Evans, analyste du cabinet Seeking Alpha (Microsoft, Capitulation And The End Of Windows Everywhere). Les smartphones se vendent en bien plus grand nombre, ont une plus grande base d’utilisateurs et sont prêt de devenir le principal vecteur du trafic sur Internet ».

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Microsoft a essayé d’appliquer avec une énergie constante la force de Windows pour se faire une place au soleil dans les mobiles. Mais rien n’y fit. Il a ensuite racheté Nokia, le leader de l’ancienne génération des mobiles qui a raté le virage du smartphone. Racheter une entreprise en perte de vitesse n’est pas un gage de réussite. On connait la suite. L’annonce du licenciement de 18 000 salariés dans une premier temps et de 7800 tout récemment, qui sont ou seront largement issus de Nokia et la prise en compte d’une provision de 7,5 milliards de dollars dans les résultats du 4e trimestre pour solder l’échec de l’opération ramenant le bénéfice net du trimestre à une perte net de 3,2 milliards de dollars. Du jamais vu. Mais sur l’ensemble de l’année, Microsoft réalise néanmoins 12,2 milliards de dollars de bénéfice net sur un chiffre d’affaires de 93,5 milliards. Beaucoup d’entreprises aimeraient bien présenter de tels résultats.

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Le résultat, Windows Mobile, 10 ou pas, n’est que la troisième voire le quatrième choix des développeurs pour créer leurs nouvelles apps mobiles. Les apps qui dominent le monde du mobile n’ont pas été développées dans Windows. Pire, certaines de ces apps mobiles n’existent même pas pour les PC. Uber par exemple n’a pas d’apps dans le monde Windows. Il en va de même pour Office qui est l’autre « grande vache à lait » de Microsoft, elle n’est certainement un levier pour le mobile qui est plus un terminal de consultation que de création. Et pour visualiser un document Office pas besoin du logiciel d’origine, un simple viewer suffit bien.

« Microsoft est aujourd’hui un cas d’école d’entreprise qui doit savoir quand elle doit abandonner et ce qu’elle doit faire ensuite » considère Benedict Evans. Si le mobile est donc perdu pour Windows, que reste-t-il pour l’OS ? L’Internet des objets dont on n’a encore rien vu et qui devrait connaître un développement spectaculaire dans les années à venir (Microsoft tees-up Windows 10 for the trillion-dollar Internet of Things). Microsoft entend utiliser Windows comme un levier pour se déployer dans ce monde en construction. D’ores et déjà, l’éditeur a prévu trois déclinaisons de l’OS pour l’IoT :

– Windows 10 IoT pour les petits appareils dotés de processeur X86 ou ARM, 256 Mo de RAM, 2 Go de stockage, pas de Shell, apps universelles et drivers ;
– Windows 10 IoT pour les mobiles dotés de processeur ARM, 512 Mo de RAM, 4 Go de stockage, Shell avancé, apps universelles et drivers ;
– Windows 10 IoT for pour les appareils industriels dotés de processeurs X86, 1Go de RAM, 16Go de stockage, Desktop Shell, Win32 apps, apps universelles et drivers.

Mais la stratégie consistant à capitaliser sur Windows qui a échoué dans les mobiles peut-elle réussir dans l’IoT ? Dans une note récente (The Internet of Things Is Creating New Software Vendors) voit plutôt de nouveaux acteurs arriver et prendre ce marché.

Si Microsoft devrait tirer un trait sur le mobile selon l’analyste de Seeking Alpha, reste le cloud, le cloud dans toutes ses formes : IaaS, PaaS, SaaS. Dans les trois premiers marchés du cloud, Microsoft est bien positionné. Dans l’IaaS grâce à des investissements importants, il se rapproche d’AWS, le leader incontesté de la discipline (Gartner Magic Quadrant for Cloud Infrastructure as a Service, Worldwide). Editeur de logiciel et développeur avant tout, Microsoft est bien positionné dans le PaaS. Dans le monde des applications d’entreprise (CRM, ERP, Collaboratif…), Microsoft saura migrer son offre dans le monde du cloud.

Et puis les solutions du catalogue actuel ne vont pas disparaître du jour au lendemain, elles ont même encore de beaux jours devant elles sans oublier le monde de l’infrastructure où avec Windows Server et Hyper-V, Microsoft est très bien placé (Magic Quadrant for x86 Server Virtualization Infrastructure). Et Microsoft reste aussi une société de développement technologies avancées. Pour preuve : Cortana, Skype Translator, and HoloLens. Certaines d’entre elles seront peut-être à l’origine de nouveaux produits et services très profitables.