En pleine ébullition du marché, le fabricant américain d’enceintes Sonos s’offre le français Snips pour doter ses solutions d’une alternative aux assistants d’Amazon et de Google, entre autres.  

Le fabricant d’enceintes américain Sonos vient de s’offrir la start-up française Snips et sa technologie d’assistant vocal pour 33,8 millions d’euros. Pour mémoire, malgré les 22 millions levés depuis sa création en 2013, Snips n’a pas réussi à convaincre les investisseurs l’an dernier. Résultat, sa levée de fond de 30 millions s’est soldée par un échec qui apparemment a poussé la pépite française à rejoindre le giron de l’américain.

Un assistant vocal « respectueux de la vie privée »

Comme la majorité des enceintes connectées, Sonos embarque déjà les assistants d’Amazon et de Google dans ses produits. Avec la technologie de Snips, le fabricant pourrait apporter une alternative à toutes les personnes qui s’inquiètent des risques d’espionnage de leurs activités par Alexa ou encore Google Assistant. Snips a en effet fondé toute sa stratégie sur le respect de la vie privée en mettant sur le marché un assistant qui ne dialogue pas avec le cloud pour rendre ses services, contrairement aux assistants des GAFA. En rachetant Snips, Sonos s’offre donc une alternative qu’il peut maitriser dans la mesure où il hérite aussi d’une équipe R&D sur laquelle il va pourvoir capitaliser pour concevoir de nouveaux services et rebondir sur le marché très juteux du vocal.

La guerre de la voix

Le moment est d’autant mieux choisi que selon Canalys, la Chine a grillé la politesse aux Américains sur le marché des enceintes intelligentes. En mai dernier, le cabinet d’étude estimait en effet que fin Q1 2019 l’Empire du Milieu représentait plus de la moitié du marché mondial des assistants connectés intelligents avec 51 % de parts de marché et une croissance de 500% sur l’année ! Propulsés au second rang, les États-Unis seraient passés de 44% à 24% de parts de marché.


Il convient toutefois de noter que depuis, les Américains ont quelque peu redressé la barre, notamment grâce à Amazon qui affiche une belle de croissance de 65,9% annuelle à la fin du troisième trimestre 2019. Elle est toutefois contrebalancée la mauvaise performance de Google qui, toujours selon Canalys, enregistrerait un recul de 40,1%. D’autant que pendant ce temps, Alibaba ne faiblit pas avec ses 77,6% de croissance, épaulé par le Google chinois Bailu qui lui fait un bond spectaculaire de 290,1%, toujours sur la même période.

Autant dire que la bataille fait rage sur le marché des enceintes connectées intelligentes! Selon Canalys, il totalisera 225 millions d’unités l’année prochaine avec une croissance mondiale annuelle estimée à 44,9% au troisième trimestre 2019.

Un marché encore jeune en France

Bataille qui échappe un peu à la France. Selon une étude de Médiamétrie, seulement 1,7 million de Français utilisaient une enceinte connectée fin 2018 avec un usage principalement limité à l’écoute de la musique…
Une preuve d’un manque de connaissance ou de désintérêt pour les fonctionnalités des assistants vocaux confirmée par l’étude HADOPI/CSA « Assistants vocaux et enceintes connectées » publiée en mai dernier. Avec seulement 11 % de foyers équipés de l’une des trois principales marques d’enceintes connectées (Google, Amazon, Apple) en février 2019, la France affiche en effet un taux de pénétration plus faible que les États-Unis, le Royaume-Uni ou encore l’Allemagne.

« Le manque d’intérêt et d’utilité perçue, le prix et les craintes à l’égard des données personnelles constituent les principaux facteurs susceptibles de limiter la diffusion des enceintes connectées auprès des non-utilisateurs actuels », note l’étude. Plus de la moitié des personnes interrogées (67%) ne voient pas l’intérêt des enceintes connectées et 47% trouvent qu’elles coûtent trop cher. La peur pour les données personnelles n’arrive qu’en troisième position avec 40%.


Au-delà de la perception, la jeunesse du marché s’explique aussi par le fait que les enceintes sont arrivées en France environ trois ans après les autres pays, Google ayant ouvert le bal en août 2017.

En attendant, à fin 2018, HADOPI et le CSA estimaient que seulement 5% des internautes envisageaient d’acheter une enceinte connectée en 2019. Chiffre à comparer avec la croissance du marché mondial qui explique peut-être pourquoi Snips a eu autant de mal à boucler sa levée de fond et a préféré aller voir ailleurs, au pays qui se bat avec la Chine pour gagner la bataille des enceintes connectées intelligentes.