La conférence Fujitsu qui se tenait à Paris, le 2 juin, sur le front de Seine, a été l’occasion de faire le point sur la firme japonaise et son engagement dans le domaine de la transformation numérique. Elle met au cœur de sa démarche ses propres clients pour en convaincre de nouveaux. Une technique déjà connue mais qui porte ses fruits.

Fujitsu qui est très présent en Allemagne depuis son rachat de l’activité hardware de Siemens en 2008 et en Angleterre avec le rachat d’ICL en 1998, repose en France sur une forte activité de services avec 500 employés, en particulier dans la distribution et les banques. Elle travaille de concert avec près de 4700 distributeurs qui se concentrent pour la plupart sur les PME, Fujitsu conservant une activé en direct avec les très grands comptes. Fujitsu se présente comme le quatrième fournisseur mondial de services informatiques avec un modèle de « Delivery » permettant de concilier « un modèle industrialisé dans des centres de services partagés avec l’adaptabilité nécessaire requise par les clients .»

Des serveurs aux datacenters

Sur le plan concurrentiel, Fujitsu qui était encore le 5e fabricant de mondial de serveurs selon le Gartner au début 2014, s’est vu lentement rattrapé puis dépassé au fil des années, par Oracle (Sun) ou Cisco, Huawei, et plus récemment par Lenovo, ce dernier ayant racheté l’activé serveur x86 d’IBM. Mais la firme  japonaise avait pris depuis longtemps la direction des datacenters, elle en pilote plus d’une centaine, sans compter les milliers d’autres qui reposent sur ses infrastructures. Sa spécialité de mainframe qui avait été marquée par le rachat de Amdhal en 1997 lui a donné une expérience exceptionnelle dans un domaine de la cogestion de sites, désormais en pointe. Les ex dinosaures comme IBM et Unisys profitent aussi de dizaines d’années d’expérience dans la gestion des ressources partagées en réseau et de la maintenance prédictive, qu’il s‘agisse du stockage, de la virtualisation et des applications transactionnelles.

L’atout du Cloud

Benjamin Revcolevschi, le nouveau président de la filiale française, un ex SFR passé par le Boston Consulting Group, admettait que la firme était dans une passe exceptionnelle à laquelle il n’était pas pour grand-chose, une preuve de modestie assez rare pour être soulignée. Il faut dire qu’au moment où HP se sépare de son activité PC et imprimantes suivant en cela le modèle prôné par IBM, le doute s’est installé chez beaucoup de clients sur la pérennité de certains acteurs. Les fabricants de grands systèmes qui maîtrisent tout la chaîne du serveur au pc sont assez rares. Même Dell, Hitachi, Cisco, Huawei, Oracle ont un périmètre réduit vis-à-vis du géant japonais qui emploie 160 000 employés dans 180 pays avec un chiffre d’affaires d’un peu plus de 40 milliards de dollars en 2014.

A l’ouverture de la conférence, la firme avait souligné, au-delà de la focalisation sur l’individu, le « human centric »,  les 4 défis qui se posaient aux entreprises et à leurs DSI. En premier lieu, le pouvoir accru des consommateurs qui les rend très changeants, l’ère des challengers qui révolutionnent les repères économiques (Uber, AirBnb, Blablacar, etc.), l’arrivée de l’industrie 4.0 où l’internet est désormais très influente et enfin la nouvelle cybersécurité, l’enjeu principal, selon IDC, des DSI.fujihumancentric L’enjeu de la transformation digitale est un cap essentiel pour les entreprises françaises et l’objectif de Fujitsu est dans un premier temps de proposer des services pour analyser et proposer des objectifs de digitalisation précis. Une bataille autour de laquelle toutes les grandes sociétés de services s’affairent aussi.

« On sait que 67% des budgets sont engloutis dans la gestion quotidienne, que 20 % sont consacrés à l’évolution de l’existant, 13% subsistant pour une vraie transformation ; insistait Benjamin Revcolevschi (photo ci-contre)benjamin. En quoi sommes-nous différents des autres ? n’hésitait-il pas à préciser. Cette obsession de l’humain, c’est un paramètre que je n’avais pas encore vu autant mis en avant ailleurs. On a 80 années d’existence, mais on regarde 100 ans devant nous. On aide nos clients à traverser la jungle du cloud, des Big data, de la complexité des systèmes. On ne fait rien sans leur partenariat.»

L’exemple des clients phares

La firme a mis en scène ses différents partenariats, avec par exemple la ville de Barcelone où Fujitsu a mis en place un système d’optimisation du trafic avec l’opérateur local de transport, la ville et la banque Caixa. Les métros, trains et bus sont surveillés pour connaître en temps réel l’état de la circulation et fournir ces renseignements aux voyageurs, mais aussi du fait que les transports sont géolocalisés le meilleur parcours à un instant T. Le système exploite des outils d’analyses prédictives qui sont déjà utilisés dans la ville de Tokyo qui elle aussi croule sous la pression automobile.

cloud-underpinningLa modélisation du cœur pour préparer les opérations

L’université de Tokyo est aussi un partenaire de Fujitsu et elle a participé à la modélisation du cœur humain et de 600 000 cellules. Grace à ses super calculateurs, elle est arrivée à réduire le temps de modélisation de plusieurs semaines à 17 heures. Ses travaux permettent de prévoir la meilleure méthode pour opérer les coeurs malades.

L’internet des objets vu du coté pratique

La coopération paraît le leitmotiv de la firme avec des exemples multiples comme Airbus pour la logistique et la Supply Chain, Auchan pour la gestion des caisses et des approvisionnements. Enfin dans le domaine de la gestion des objets, Fujitsu qui dispose de son propre système présentait les travaux de Metawaters, une firme qui comme son nom l’indique suit les évolutions du réseau d’eau des grandes villes japonaises qui ont souvent subi des tremblements de terre. Pour Stefan Denz, l’un des intervenants, la maintenance est effectuée en se servant de tablettes et de lunettes de type Google. Elle associe les outils de réalité augmentée pour aider les nouveaux techniciens dans la maintenance des différents ouvrages. Le travail de support effectué par les anciens techniciens a été l’objet d’une étude approfondie, la documentation étant réduite à son minimum ; l’enjeu de ce type d’offre mêlant services en ligne, internet des objets serait important, car deux grands projets sont à l’étude en France. EDF, Areva ? La firme n’a pas voulu dévoiler les travaux en cours d’approfondissement chez certains de ses clients. La journée était pourtant basée sur un nombre impressionnant de présentations de réalisations clients, une preuve vivante que chacun avait à cœur de montrer son travail à la communauté des utilisateurs. L’impression  qui prévalait était que Fujitsu voulait faire équipe avec ses clients, une approche sincère et  sympathique mais qui doit avoir ses limites sur le plan financier.