Une chose est sûre, la crise sanitaire que nous traversons va avoir des impacts multiples et faire profondément évoluer le mode de gouvernance des entreprises. Dans ce contexte, la notion de pragmatisme, si souvent évoquée, mais plus difficilement mise en œuvre, devrait retrouver tout son sens et se positionner au centre des politiques de développement des acteurs économiques. Afin de donner un vrai visage à cette nouvelle tendance, voici des exemples concrets des déclinaisons possibles liées à ce « nouveau pragmatisme ».

La reconnaissance des équipes et l’exemplarité managériale

Le premier point à évoquer tient à l’importance de préserver toutes les ressources contributives de l’entreprise et pas uniquement les femmes ou les hommes clés. Dans ce contexte, pour sortir du confinement et ramener progressivement les équipes au sein de l’entreprise, des plans spécifiques qui intègrent  des critères objectifs devront ainsi être posés afin que les collaborateurs puissent travailler sans risque (privilégier dans un premier temps le retour des collaborateurs ne prenant pas les transports en commun, ceux pour qui le télétravail peut être une source de souffrance invisible, etc.). Cette nouvelle organisation nécessite une parfaite coordination et un niveau de rigueur inédit.

Soutenir l’économie et ses clients en période de tension

Développer ses parts de marché et soutenir ses clients fragilisés par la crise, par exemple dans des secteurs comme le tourisme, l’hôtellerie ou la restauration, sera aussi un réel défi. En ce sens, il est fondamental que les fournisseurs de ces entreprises lient rapidement avec leurs clients un véritable pacte de confiance pour leur permettre de redémarrer et de sauver les différentes activités. Nous sommes bien loin des modes de fonctionnement traditionnels où le scoring des entreprises représentait l’un des premiers critères de contractualisation. Les prédictions sur le futur et la régularité d’un secteur et d’une entreprise ne semblent plus aujourd’hui d’actualité.

Repenser sa politique d’approvisionnement et renforcer sa résilience

Un autre enseignement de la crise du Covid-19 met en lumière l’extrême dépendance de nombre d’entreprises vis-à-vis de leurs fournisseurs internationaux. Les exemples ne manquent pas (technologies, santé, etc.). Il est donc stratégique de repenser intégralement les politiques d’achats et de soutenir massivement les approvisionnements réalisés à l’échelle nationale. C’est toute la promesse de l’industrie 4.0 qui participe à la « réindustrialisation » de différents secteurs clés. Ils pourront sans aucun doute prospérer rapidement au regard des commandes qui leur seront passées par les entreprises françaises. Avec un tel schéma, il sera alors possible de multiplier son nombre de fournisseurs, de sécuriser ses opérations et d’améliorer sa résilience.

Donner une vraie place à la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE)

Concrètement, le management se doit de créer toujours plus d’horizontalité pour fédérer les équipes et positionner l’entreprise dans une démarche de croissance vertueuse. Ce point est d’autant plus important pour les acteurs qui peuvent avoir une emprise forte sur certains domaines comme leur consommation énergétique, leur impact carbone négatif, etc. En ce sens, la mise en place de dispositifs innovants qui permettent de récupérer des informations et de les partager à grande échelle au sein des grandes entreprises et plus globalement de toutes les organisations sera un formidable accélérateur.

Positionner le numérique comme un allié dans la transformation de l’entreprise

Enfin, il est fondamental que les entreprises s’appuient sur la crise pour accélérer leur transformation digitale. Elles se sont dotées de nouveaux outils qui leur permettront de faire évoluer durablement leur organisation et de l’adapter aux nouveaux usages. Nul doute que des sujets comme la 5G (déjà disponible dans d’autres pays en Europe) et l’Internet des objets vont jouer un rôle clé dans les fondations des entreprises de demain. Une immense responsabilité des managers, bien qu’aujourd’hui ce ne soit pas encore identifié comme une priorité, est donc de préparer l’accueil dans les entreprises de la révolution des usages qui construira la prochaine décennie de croissance.

À travers ces quelques exemples, qui pourraient être complétés par d’autres éléments, il apparait clairement que le pragmatisme et l’optimisation des cycles de décisions sont les éléments clés qui permettront de construire une gouvernance performante et responsable.
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Par Kevin Polizzi, CEO de Jaguar Network