S’il n’existe pas de calendrier, l’univers bancaire se prépare à vivre une petite révolution en accélérant le traitement des paiements bancaires pour les rendre instantanés. Reste que la mise en place, elle, ne l’est pas et demande malgré tout aux établissements une transformation en profondeur de leurs systèmes d’information.

Le carnet de chèque, l’argent liquide et même la carte bancaire vivent probablement leurs dernières heures. Face à une demande importante et à de nouveaux acteurs toujours plus inventifs, les banques ne peuvent plus remettre à demain ce que d’autres font depuis hier et ont dû entamer la mise en place du désormais célèbre paiement instantané. Un mouvement international où l’Europe, en termes d’avancées, n’a pas à rougir. Juste derrière l’Asie, le Vieux Continent a déjà défini ses règles et la technologie est opérationnelle. Le système permet le transfert électronique d’argent progressivement dans toute l’Europe en moins de dix secondes, à tout moment et n’importe quel jour de l’année. Y compris les week-ends et les jours fériés. Tout ne repose plus que sur la capacité des établissements à adopter le système et à s’y adapter. En France, le groupe BPCE aura été le premier à mettre à disposition le nouveau service depuis le 10 juillet 2018. Une première, certes, mais toutefois limitée puisque cela ne concerne dans un premier temps que les paiements relatifs aux remboursements des assurés de sa filiale Natixis. Un bon début, mais il faudra attendre 2022 pour envisager de payer instantanément un commerçant avec son smartphone. Alors, pourquoi de tels délais ? La réponse est assez simple : la mise en place de ce nouveau dispositif contraint les établissements à mettre en place un grand nombre de chantiers qui ne peuvent être opérés que graduellement.

Optimiser les processus de contrôle

Modernisation des plateformes existantes, mises en place de nouveaux outils dans le cadre de la sécurité financière, ajustements des organisations, créations de nouveaux services pour des business existants, optimisation et coopération entre les lignes métiers : les établissements bancaires ont clairement de quoi faire avant d’être prêts à 100%. Si on prend l’exemple seul des contrôles, tous les systèmes vont devoir être mis à jour.  Et, pour assurer la sécurité d’une transaction, des contrôles il y en a un grand nombre. Avec le développement des paiements instantanés entre pays, les contrôles sont mis à l’épreuve et notamment ceux liés aux filtrages avec les listes de sanctions ou encore les contrôles pour détecter des opérations inhabituelles et suspectes. Tous devront être optimisés pour une exécution en quasi temps réel. Derrière, cette nouvelle technologie permettra aux établissements de capter les opérations à la volée et de les relâcher via un système d’alertes avec une approche par les risques.

Adopter une approche par les risques

Cette approche permet aux banques non seulement d’avoir un dispositif de contrôle plus efficace mais permet également de limiter l’impact des contrôles sur les délais d’exécution. Il est important de détecter les éléments pertinents qui représentent un risque au bon moment. Ainsi des éléments tels que les montants et volumes d’opérations, le risque pays, le profil de risque client doivent être pris en compte. Egalement, des transferts effectués par des clients sur une même plateforme devraient permettre une approche par les risques plus fine car l’établissement bénéficie pour ces opérations d’un niveau de connaissance égal sur l’émetteur et le bénéficiaire d’une opération.

Faire un travail de pédagogie auprès des clients

L’approche par les risques implique, au sein des établissements bancaires, et de la part des équipes, un traitement des alertes le plus rapide possible. Certaines opérations nécessitent malgré tout plus de temps car elles requièrent un échange avec le client ou encore une analyse plus approfondie. Dans ce contexte, il est important de sensibiliser les clients d’éventuels délais supplémentaires et de leur expliquer la présence de contrôles sur chaque paiement. En plus d’un travail de pédagogie, il y aura un effort à faire pour mitiger cette attente de la part du client qui va devenir plus exigeant avec le temps.

In fine, nul doute que cela va dynamiser le secteur bancaire et faire apparaître des nouveaux comportements. L’expérience client se verra améliorée avec une visibilité sur l’exécution de l’opération accrue et, surtout, la mise à disposition quasi immédiate des fonds pour le bénéficiaire.

 

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Sven Radulovic est Responsable de la conformité et des risques chez Ditto Bank