Dans un contexte géopolitique où le cloud, l’IA et les infrastructures numériques sont désormais assumés comme des instruments de puissance, la dépendance européenne aux géants américains n’a jamais paru aussi tangible. Pour redonner davantage d’autonomie aux organisations européennes, Numppot se réinvente aujourd’hui en plateforme de confiance déployable sur n’importe quel Cloud y compris privé dans votre datacenter. Pour déchiffrer ce changement de cap stratégique, son PDG, Eric Haddad, est notre invité de la semaine.

Né en 2022 d’une volonté politique et industrielle claire, le Cloud Numspot a toujours cherché à proposer une alternative française crédible aux hyperscalers américains pour l’hébergement et le traitement des données sensibles. La coentreprise a été lancée par quatre acteurs aux profils complémentaires : Docaposte, bras numérique du groupe La Poste, la Banque des Territoires, investisseur public de long terme, Dassault Systèmes via sa filiale cloud Outscale, et Bouygues Telecom.
À l’origine, Numspot se positionnait comme une vitrine du « cloud de confiance » à la française, adossée à l’infrastructure souveraine d’Outscale et pensée pour répondre aux exigences des secteurs régulés, des administrations aux acteurs de la santé et de la finance. Un positionnement pas assez démarqué d’Outscale – qui poursuivait en parallèle son propre calendrier – pour lui permettre d’éclore autant qu’espéré.

Numspot a donc récemment décidé d’opérer un virage stratégique. Initialement conçu comme un cloud public souverain reposant sur l’IaaS d’Outscale, l’acteur français se réinvente en plateforme technologique hybride de confiance, capable de s’exécuter aussi bien sur ses propres régions certifiées que sur les infrastructures de ses clients ou de partenaires européens. L’objectif n’est plus de promettre une souveraineté totale et idéalisée, mais d’offrir aux DSI une trajectoire réaliste pour reprendre le contrôle sur leurs actifs les plus critiques, sans renoncer aux apports du cloud global.

En unifiant infrastructure, services managés et briques PaaS au sein d’une console unique, Numspot revendique une approche pragmatique : permettre l’hybridation, protéger les investissements existants et redonner une marge de manœuvre face à des catalogues hyperscalers toujours plus complexes et contraignants.

C’est cette nouvelle ambition, à la fois technique, stratégique et politique, que son PDG, Eric Haddad vient aujourd’hui commenter sur le plateau de notre émission l’invité de la semaine.

 

 

Arrivé à la tête de Numspot « en mars 2025 », Eric Haddad raconte avoir voulu aller vite : « mettre la plateforme en ligne » et livrer « dès le mois d’avril 2025 » un socle de « services essentiels ». Une accélération qui se retrouve dans les premiers usages : beaucoup de projets tournent déjà autour de l’IA, avec des besoins en ressources rares. Numspot expose ainsi, via sa console, les infrastructures nécessaires aux charges classiques… mais aussi « la puissance de calcul type GPU » indispensable aux traitements intensifs.

Ce changement de rythme s’accompagne d’une transformation en profondeur : « objectivement, on a fait en quelques mois une réécriture très importante ». Là où l’offre était « positionnée comme un cloud souverain essentiellement », Numspot a réarchitecturé sa plateforme « de manière à ce qu’elle puisse être portable et puisse accompagner la modernisation des clients sur leur cloud privé » afin de répondre à la fois aux nouveaux cas d’usage IA et aux attentes très concrètes des DSI/CTO en matière de services managés (Kubernetes, bases de données, secrets…). Eric Haddad ironise sur la surenchère fonctionnelle des hyperscalers : « vous signez pour 250 services, c’est le syndrome Word… vous en utilisez que 4 par jour ».

Dans cette nouvelle équation, Outscale n’est pas un rival mais « un partenaire ». Numspot assume de s’appuyer sur « la bonne qualité » de l’infrastructure Outscale, tout en revendiquant sa différence : « on apporte la valeur de portabilité » et une « couche agnostique de l’infrastructure ». Concrètement, la même plateforme peut être servie sur une région souveraine en Europe ou « se poser sur le cloud privé d’un client ». Et Numspot ne s’empêche pas désormais de déployer son offre chez d’autres fournisseurs de Cloud en France comme en Europe, dès 2026.

Le second pilier de la nouvelle stratégie, c’est l’IA et la data, avec une annonce « en début d’année 2026 » d’une plateforme dédiée intégrant « de l’agent, du RAG, des modèles (…) et du Data Lake ». Le tout, insiste-t-il, avec un choix assumé : « tout ce qu’on a développé est en open source… 100% », complété par des acteurs « européens » et des partenariats sectoriels pour adapter les modèles aux métiers.

Reste la clé de voûte : prouver la confiance. Sur SecNumCloud et HDS, Eric Haddad se veut rassurant : « de façon millimétrée », Numspot vise une qualification et une certification « sur le premier trimestre 2026 ». Mais il insiste surtout sur l’approche « by design », avec une organisation d’entreprise structurée autour des exigences d’audit — « il ne se passe pas un jour sans (…) un audit blanc, (…) un audit réel ». Et sur l’extraterritorialité, la ligne est tranchée : « on ne fera rien (…) sur des infrastructures qui soient américaines ou chinoises ».

Au final, Eric Haddad appelle les DSI à regarder au-delà des slogans : « il faut apporter la preuve », et ensuite, « c’est à l’appréciation du DSI » en fonction des risques et des données. Et de terminer sur une conviction : « la partie n’est pas dite… à condition de ne pas subir la révolution IA mais de la prendre, de façon offensive, sans compromis sur la sécurité ».


À lire également :

NumSpot mise sur l’écosystème IT français pour créer une plateforme cloud de confiance

Numspot se réinvente en plateforme hybride de confiance face aux hyperscalers américains

NumSpot renforce son équipe dirigeante avec cinq personnes

NumSpot annonce la disponibilité de ses services PaaS managés

CloudWeek 2025 : NumSpot mise sur l’écosystème français pour créer une plateforme cloud souveraine

Abonnements forcés, tarifs en hausse : la facture cachée du cloud propriétaire…

Avec l’IA, le cloud souverain inaugure une nouvelle ère d’innovation et d’inclusivité technologique…