L’IT européen migre au rythme de 3,6 % vers le cloud public et de 2,4 % vers les data centers de colocation, alimentant un mouvement assez rapide vers l’externalisation des data centers des entreprises.
C’est ce qu’indique l’enquête « La place des data centers à l’heure de l’ère de l’informatique hybride » réalisée par le cabinet Data Center Dynamics Intelligence pour le spécialiste de la colocation DATA4. Selon cette enquête, plus de trois DSI sur 4 souhaitent mettre en œuvre une informatique hybride maîtrisée tout en revendiquant des garanties de services élevées.
Lors de la deuxième révolution industrielle, on avait déjà connu le phénomène avec l’énergie électrique. Après les premiers pas qui avait permis de fabriquer les premières dynamos, le moteur électrique s’est généralisé dans les ateliers et les usines de la fin du 19e siècle et au début du 20e, il est encore encombrant et lourd et mais supplante rapidement le moteur à vapeur en permettant un meilleur partage de la force motrice au sein des ateliers. Le moteur électrique a ainsi permis une rationalisation de la production à travers un nouvel agencement des usines respectant mieux les étapes de la production, et offert de meilleurs rendements et une meilleure qualité, à moindre coût. « Mais la possibilité de construire des lignes HT à longue distance et de diviser indéfiniment l’énergie ouvrait l’ère des grands réseaux d’électricité. Ce fut une rupture radicale dans l’histoire de l’humanité »[1].
Va-t-on assister au même phénomène pour l’énergie informatique ? Bien sûr, la comparaison entre l’électricité et l’information a ses limites car cette dernière est infiniment plus complexe que la première mais néanmoins le mouvement vers l’externalisation de l’informatique des entreprises est lancé depuis longtemps déjà et connaît une accélération ces dernières années avec les technologies du cloud.
Dans le nouveau monde numérique où tout est application, où le « logiciel définit tout » (SDE pour Software Defines Everything), l’entreprise doit se considérer comme une « App » évolutive, capable de se réinventer en permanence et de maintenir un dialogue continu avec l’ensemble de son écosystème. C’est pourquoi le rôle du DSI a considérablement changé. Bras droit armé de la Direction, il doit, plus que jamais, se mettre au service des activités et de la performance, avec un niveau d’anticipation, d’exigence, d’adaptabilité et de réactivité extrêmement élevé. Car intégrer tout à la fois de multiples technologies, choisir les bons partenaires et développer rapidement des applications et des services métier, n’est pas chose aisée. L’enjeu : marier les plateformes physiques non « cloudisables » (car toutes les données ne sont pas et n’iront pas dans le cloud) et le cloud privé, avec de multiples ressources de cloud public. L’informatique hybride, encore baptisée « Hybrid IT », apparait donc comme le sésame pour réussir cette combinaison complexe mais efficace.
La réorganisation de la filière économique des data center influe sur la manière dont les grands fournisseurs de cloud s’organisent et agencent leurs plateformes mondiales -et inversement-. Les ruptures réglementaires (RGPD pour l’UE ; Privacy Shield pour les USA) ont des incidences importantes sur le Cloud, l’industrie des opérateurs de data center et, plus largement, sur les DSI, qui voient dans l’hébergement de leurs actifs informatiques un processus complexe et risqué.
Le data center évolue vers la colocation
Les data centers privés ou centres informatiques des entreprises se vident au profit des data centers commerciaux, dits data centers de colocation. Entre 2012 et 2020, le parc existant informatique en Europe aura migré vers la colocation à raison de 2,4% par an, ce qui équivaut à une migration complète (sur cette même période) du parc informatique français vers les data centers de colocation, au détriment des centres informatiques privés. Aujourd’hui, alors que 80% des actifs informatiques des pays d’Europe du Nord sont hébergés en colocation, ce taux n’est que de 40% en France et de 30% en Allemagne, ce qui laisse une marge de progression importante.
Dans le même temps, les entreprises recherchent des services clés-en-main. Ainsi, sur la période 2012-2020, les services informatiques managés devraient progresser en moyenne de plus de 10% par an, soit deux fois plus que le rythme auquel se développe la construction de nouveaux data centers (+4,7%/an), qu’ils soient commerciaux ou privés. Il faut dire que l’externalisation de services donne un degré de liberté supplémentaire aux entreprises, dans la mesure où elle limite les investissements.
Dans ce contexte, le cloud public et les services managés externalisés se verront attribués la plus grande part du mouvement de migration des centres informatiques vers la colocation.
Ainsi, l’investissement vers la colocation devrait progresser de 13,6% par an entre 2016 et 2020, soit 6 fois plus que le nombre de data centers construits à titre privé. Les services managés devraient progresser, quant à eux, d’environ 16 % par an.
En 2020, alors que les opérateurs de data centers de colocation devraient posséder 6% du marché global des data centers, ils devraient par contre en représenter 40% en termes d’espace occupé et 45% en matière de capacité électrique disponible.
Informatique répartie et Cloud : la migration n’est pas si simple !
Plus de 30% des entreprises utilisent déjà des ressources de calcul et de stockage dans le Cloud (le IaaS) dont 30 % ont un cloud privé et 30% encore font héberger des plateformes dédiées. La solution réside donc dans la combinaison de la sécurité des plateformes privées et de la « scalabilité » du cloud public. En gardant le meilleur des deux mondes, l’informatique hybride ou « Hybrid IT » est devenue le Graal du DSI. Plus de 25% des sondés et 77% des DSI envisagent d’y recourir.
Toutefois, dans le même temps, ces DSIs expriment de fortes inquiétudes, dont les plus importantes sont :
– L’accès sécurisé aux ressources de cloud
– La pertinence encore limitée des engagements de services
– Les problématiques liées à la localisation de leurs données
A noter que 66% des DSI qui s’engagent dans l’Hybrid IT la perçoivent comme une solution capable de répondre aux demandes de capacités supplémentaires et 50% comme le meilleur moyen de tirer avantage du cloud.
Un peu de méthodologie
Ce livre blanc a été rédigé par le cabinet d’analyse DCD pour le groupe DATA4. Ces informations reposent sur plus de 2 000 réponses recueillies dans le cadre de l’enquête mondiale de DCD auprès d’entreprises utilisatrices et de 500 réponses de fournisseurs d’hébergement, de cloud et de colocation. Le rapport explore le pourquoi et le comment du changement de l’industrie et s’intéresse plus particulièrement à certaines thématiques telles que l’influence croissante du cloud, les implications pour la colocation et la manière dont les clients gèrent les nouvelles options d’infrastructures informatiques qui s’offrent à eux, ou bien encore l’impact de questions telles que la souveraineté numérique et le Brexit sur l’activité informatique à travers l’Europe. Premièrement, il importe d’étudier l’impact du cloud sur la colocation.
[1][1] La dynamique de l’innovation – Changement technique et changement social (XVIe -XXe siècle) par François Caron – Editions Gallimard