Les robots qui marchent comme nous, saisissent une tasse de café ou montent un escalier cessent peu à peu d’appartenir à la science-fiction. Boostés par l’IA, ils apprennent dans des mondes virtuels peuplés de jumeaux numériques à survivre au chaos de notre réalité 3D physique, de l’usine au domicile. OpenUSD, données synthétiques et simulateurs physiques fabriquent en continu les scènes dont leurs modèles ont faim. Avec une chaîne de calcul en trois étages (création, entraînement, exécution embarquée), la robotique humanoïde commence à s’inviter dans les flux de production.

Lorsqu’on demande à quelqu’un d’imaginer un robot, il pensera plutôt à une figure semblable à C-3PO de Star Wars qu’à un robot opérant sur une chaîne de production automatisée ou nettoyant le sol d’une maison.

Jusqu’à présent, l’absence de robots humanoïdes dans notre quotidien soulevait une question essentielle : “Pourquoi est-il si difficile de créer des robots humanoïdes fonctionnels dans la réalité ?”

Mais l’attente touche à sa fin. Les robots humanoïdes se rapprochent chaque jour un peu plus de la réalité quotidienne : ils accomplissent déjà certaines tâches dans des environnements spécialisés et grâce aux récentes avancées en intelligence artificielle, leur généralisation n’est plus très loin.

Quels sont les avantages des robots humanoïdes ?

Le monde est conçu pour les humains : nos maisons, usines, entrepôts et systèmes de transport sont tous pensés en fonction de la morphologie humaine. Pour les entreprises souhaitant tirer parti de la technologie et de l’automatisation afin d’améliorer le quotidien, la voie la plus rapide consiste à développer des systèmes robotiques reprenant les grandes lignes du corps humain. Cela permet un déploiement plus rapide et plus fluide de ces technologies dans la société.

Les robots humanoïdes peuvent contribuer à répondre à la pénurie croissante de main-d’œuvre. Par exemple, l’Organisation mondiale de la santé estime qu’il manquera 4 millions de professionnels de la santé et de l’aide sociale en Europe d’ici 2030 – dont 2,3 millions d’infirmiers, et 1,1 million d’aides-soignants et personnels d’accompagnement – ce qui affecte directement la qualité des soins apportés aux populations fragiles, notamment les personnes âgées. Parallèlement, la moitié des PME industrielles en Europe déclarent rencontrer des difficultés à recruter des profils disposant des compétences techniques adéquates.

Les robots humanoïdes peuvent également soulager les employés dans l’exécution de tâches difficiles, comme le port de charges lourdes, les actions répétitives ou la manipulation de substances toxiques, qui peuvent avoir des effets néfastes sur la santé.

Pourquoi les robots humanoïdes ne sont-ils pas encore largement disponibles ?

Évoluer dans un environnement en trois dimensions est extrêmement complexe. Les humains bénéficient de millions d’années d’évolution, ce qui rend naturel l’interaction dans un monde en 3D. En revanche, pour une machine, créer ces règles de fonctionnement à partir de rien représente un défi titanesque.

Le principal défi réside dans la création du “cerveau” des robots. Comme les humains, les robots apprennent à interagir avec leur environnement par l’expérimentation. Ils ont besoin d’une quantité massive de données d’apprentissage pour assimiler les bases : comment se déplacent des objets de formes et de poids différents selon les conditions environnementales, comment maintenir l’équilibre du corps, ou encore comment contourner les obstacles.

Mais ces données d’entraînement n’existent pas encore : elles doivent être créées de toutes pièces. Même pour les actions les plus courantes, comme attraper une tasse de café ou monter un escalier, il n’existe aucun jeu de données prêt à l’emploi décrivant ces gestes à accomplir en détail. La collecte de ces données, en plus d’être chronophage, est particulièrement coûteuse. C’est là qu’interviennent les données synthétiques, générées à partir de jumeaux numériques, physiquement réalistes. Ils permettent aux chercheurs et développeurs d’entraîner et valider leurs modèles d’IA en simulation, avant de les déployer dans le monde réel.

Créer de telles données à très grande échelle et dans un format exploitable par les logiciels de simulation robotique présente un autre défi. Le Universal Scene Description (OpenUSD) constitue l’infrastructure technique nécessaire à la modélisation, l’édition, le rendu et la simulation de mondes virtuels en 3D. Une fois les environnements recréés numériquement, des plateformes spécialisées peuvent générer des données physiquement réalistes, en y ajoutant un niveau de réalisme visuel et une diversité de situations essentiels pour que les robots puissent généraliser leurs comportements dans le monde réel.

Ces données synthétiques sont essentielles pour permettre aux robots humanoïdes d’apprendre des comportements humains comme la marche, la préhension d’objets ou la navigation dans des environnements complexes.

La solution des trois ordinateurs

Un robot humanoïde nécessite trois systèmes informatiques distincts et interconnectés : un pour créer, un pour entrainer et un autre pour exécuter le système dans le réel. Grâce aux récents progrès de l’IA, cette architecture devient enfin réalisable.

Pour aider à relever le défi de la formation, les modèles d’IA analysent les ensembles de données fournis pour créer les règles de comportement et d’interaction permettant aux robots de naviguer dans le monde réel. D’autres outils d’IA construisent des mondes simulés dans lesquels les robots peuvent apprendre et perfectionner leurs compétences. Enfin, un système embarqué dans le robot est désormais capable de traiter en temps réel les données et appliquer ces règles pour interagir avec son environnement.

Cette configuration – un système pour entraîner le « cerveau » des robots, un second pour générer et simuler des environnements et un troisième pour déployer ces cerveaux – est aujourd’hui utilisée par les développeurs du monde entier pour concevoir des robots humanoïdes de toutes formes et tailles, et les intégrer dans le monde physique.

Grâce aux avancées de l’IA, de la simulation et de la puissance de calcul informatique, les robots humanoïdes deviennent enfin une réalité. En relevant les défis liés à la formation, à la génération de données et au traitement en temps réel, ces robots sont sur le point d’entrer dans notre quotidien. Ils pourraient ainsi aider à pallier les pénuries critiques de main-d’œuvre et transformer en profondeur nos industries.
____________________________

Par Vincent Nguyen, Solutions Architecte Robotique chez NVIDIA

 

À lire également :

Meta et Apple investiraient lourdement dans la robotique humanoïde

Humanoïdes : Une petite démo qui en dit long…

Hugging Face lance son premier robot à assembler et en open source, « Reachy Mini »

Fusion de l’IA et de la robotique, l’IA physique ouvre une nouvelle ère de progrès technologique…

Optimus, le robot de Tesla, n’est pas pour bientôt…