« L’Intelligence Artificielle (IA) est le domaine de l’informatique qui étudie comment faire faire à l’ordinateur des tâches pour lesquelles l’homme est aujourd’hui encore le meilleur »1.
Après l’euphorie presque utopique des années 60-70 et les espoirs déçus des années 1980 qui ont vu reculer l’approche symbolique, l’IA a su renaitre de ses cendres à cette même période au travers d’une approche connexionniste qui voit l’avènement de systèmes multi-agents, de mémoires auto-associatives et de réseaux de neurones artificiels (RNA) performants.
Une soixantaine d’années de recherches et d’avancées majeures font ainsi de l’IA un puissant vecteur de transformation du monde qui bouleverse aujourd’hui l’ensemble des activités humaines, l’entreprise et les modèles économiques. Oscar Wilde considérait le progrès comme l’accomplissement des utopies. C’est finalement cette approche qui convient le mieux aux évolutions actuelles de l’intelligence artificielle qui augure les plus grandes innovations.
L’apprentissage machine (Machine Learning)
Apparus au début des années 1950, les réseaux de neurones constituent les éléments fondateurs de l’apprentissage automatisé. Grâce à eux, un programme est désormais capable « d’apprendre » et d’améliorer ses réponses par l’expérience. C’est cette capacité d’apprentissage (supervisé ou non supervisé) transférée à une machine qui révolutionne les pratiques numériques et font le succès de l’IA. Les progrès de l’IA impactent en effet l’ensemble des activités humaines, de l’industrie aux services, de la santé à l’enseignement, de l’agriculture aux transports, de la sécurité à la défense.
Aucune expertise ne peut se prévaloir aujourd’hui de spécificités qui la rendrait incompatible avec les capacités fonctionnelles de l’IA. Accompagnant l’augmentation des puissances de calculs (la loi de Moore), l’IA constitue le principal moteur de la révolution numérique, premier enjeu des entreprises.
Elle fait l’objet d’une course à l’innovation de la part des grands acteurs du domaine. Qu’ils soient privés ou étatiques, ces acteurs ont parfaitement mesuré le caractère « stratégique » de son développement et tentent pour cela d’imposer leurs normes en mettant à disposition des plates-formes de briques algorithmiques « Opensource ». D’une manière générale, l’IA permet d’exploiter de façon pertinente les mégadonnées (Big Data) issues des capteurs, des objets connectés, et toutes les données produites sur internet et les réseaux sociaux.
L’apprentissage machine se révèle ainsi des plus performants dans de nombreuses tâches : traitement du signal, maîtrise des processus, robotique, classification, pré-traitement des données, reconnaissance de formes, analyse de l’image et synthèse vocale, cybersécurité, diagnostics et suivi médical, marché boursier et prévisions, demande de crédits et de prêts immobiliers, recrutement et analyse automatique de cv…
Un savoir-faire européen et une French Tech hyperactive
En matière d’IA, les géants américains GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) occupent une position dominante. Ce leadership ne doit pourtant pas masquer le fort potentiel européen et l’excellence française, régulièrement reconnus à l’international.
En choisissant d’implanter à Zurich son groupe de recherche (GRE) dédié au Machine Learning et en confiant sa direction au français Emmanuel Mogenet, Google mise pleinement sur l’excellence européenne. Sa filiale londonienne Google Deep Mind, fleuron mondial de l’IA, enchaîne les succès d’innovation avec notamment les victoires d’AlphaGo contre le champion du monde Lee Sedol.
Facebook a installé ses trois laboratoires « Facebook Artificial Intelligence Research (FAIR) » à Paris, dirigés par le français Yann Le Cun, considéré comme l’un des meilleurs spécialistes au monde du Deep Learning. Ces implantations « stratégiques » dessinent un axe européen de l’IA qui témoigne de l’intérêt des GAFAM pour le savoir-faire européen.
L’Europe et notamment la France font preuve d’un réel dynamisme dans la création de startups centrées sur l’Intelligence Artificielle. De nombreux élèves ingénieurs et doctorants travaillent pendant leur scolarité sur un projet embarquant de l’IA puis concrétisent ce projet par la création d’une startup soutenue par l’incubateur de l’école d’ingénieurs. Ce mode opératoire (qui a fait ses preuves) permet d’accompagner efficacement l’entreprise et de la stabiliser durant ses premiers mois d’existence.
Parmi les startups françaises qui ont fait le pari de l’Intelligence Artificielle, on peut citer Alkemics pour une connexion intelligente des marques et des distributeurs afin de mieux servir l’expérience omnicanal des consommateurs, Blue Frogs Robotics pour les robots compagnons (Buddy), Cardiologs Technologies pour la prise en charge des pathologies cardiaques, Elum Energy pour la gestion intelligente de l’énergie photovoltaïque, Scortex et Craft.Ai pour l’application de l’IA aux objets connectés, Julie Desk pour l’assistant personnel, ou encore Smart Me Up pour la reconnaissance faciale en temps réel.
On notera que plusieurs startups de cette liste ont remporté des prix d’innovation en 2015 et 2016. Soutenues par des incubateurs académiques (ParisTech Entrepreneurs, X-UP l’accélérateur de l’École polytechnique…), ces startups font preuve aujourd’hui d’un fort dynamisme susceptible d’inspirer les différents acteurs de l’économie numérique et les décideurs politiques. Les grands groupes industriels français doivent eux-aussi jouer leur rôle en acceptant le risque et en rachetant ces startups lorsqu’elles sont mises en vente pour ne plus laisser s’échapper des concentrés d’excellences technologiques.
La France ne manquera pas le train de l’Intelligence Artificielle. Elle n’a pas d’autres choix que de soutenir cet écosystème en créant un environnement favorable à l’innovation numérique. Elle dispose pour cela d’un vivier de compétences et d’expertises unanimement reconnu qui devrait favoriser une transformation réussie de ses entreprises et par là, de l’économie française !
1Elaine Rich et Kevin Knight – Artificial Intelligence – McGraw-Hill