Le projet de loi sur le renseignement voté*, deux hébergeurs Altern.org et Eu.org viennent d’annoncer qu’ils allaient mettre leur menace à exécution et quitter le territoire. Parmi les plus anciens hébergeurs de France, Altern.org a d’ores et déjà fermé son site avec en guise d’explication le message suivant :
« Suite au vote de la loi sur les services secrets à l’assemblée nationale hier #PJLRenseignement, l’hébergeur altern.org ferme ses services le temps de les déménager […] dans un pays plus respectueux des libertés individuelles ». Le site, qui dit « participer depuis vingt ans à faire du droit à la liberté d’expression une réalité pour les citoyens et résidents de ce pays » explique qu’il « refuse ces analyseurs sous le contrôle des services secrets » que la loi l’oblige « à installer au coeur de [ses] infrastructures ». « Pour nous un seul jour sous écoute globale est un jour de trop », conclu le site hébergement gratuit créé en 1992 par Valentin Lacambre.
« Eu.org ne peut moralement laisser le trafic de ses utilisateurs exposé à de telles écoutes »
Même genre d’avertissement de la part d’Eu.org qui indique sur son site qu’« il procèdera au déménagement de tous ses serveurs de noms hors de France » en réaction à cette loi qui « instaure une surveillance légale systématique du trafic Internet par les services de renseignement français, dans des conditions d’opacité complète, sous la seule responsabilité de l’exécutif, sans contre-pouvoir ». Et le l’hébergeur gratuit de se justifier : « Eu.org ne peut moralement laisser en toute connaissance de cause le trafic de ses utilisateurs — incluant des sites d’activisme politique dans le monde entier — et, par ricochet, le trafic d’accès de leurs propres utilisateurs, exposé à de telles écoutes ».
Côté gouvernement, tout son discours a consisté à réfuter cette notion de surveillance systématique. Un amendement de dernière minute a même été adopté à la suite d’une réunion avec les principaux hébergeurs français censés lever les principales objections qu’ils avaient formulées via le mouvement « Ni Pigeons Ni Espions », à l’origine des menaces d’exil des hébergeurs français.
Cet amendement, assez technique, prévoit notamment que la boîte noire ne pourra plus être mise en œuvre dans le cadre d’une procédure d’urgence (821-5) et que les opérateurs (hébergeurs) pourront s’assurer que les données de contenu seront exclues de la mise en œuvre des traitements. Le texte a en tout cas semblé convaincre les principaux signataires de Ni Pigeons Ni Espions.
Un amendement qui apporte des garanties suffisantes aux yeux de Gandi et OVH
Ainsi OVH a publié sur son site un communiqué expliquant que « des engagements concrets à la préservation des données personnelles et au caractère ciblé, limité dans le temps et non systématique de ce dispositif de surveillance ont été apportés ». De son côté, Gandi a souligné à propos du projet de loi qu’ « il ne s’agit pas d’un système d’écoute global mais bien de mesures spécifiques et ponctuelles, dont la mise en oeuvre est limitée à un périmètre technique bien défini. Ces dispositifs, classés « Secret défense », ne pourront être mis en oeuvre que dans le strict cadre de la lutte anti-terroriste ».
À voir. Pour rappel, dans leur manifeste publié il y a une semaine les signataires de « Ni Pigeons Ni Espions » rappelaient que 30% à 40% de leur activité provenait de clients étrangers qui venaient s’héberger en France précisémment parce qu’elle n’avait pas de Patriot Act. Est-ce que cet amendement sera de nature à préserver leur confiance ? D’aucuns pensent** qu’il ne change pas grand-chose au fond et qu’il sert surtout de prétexte à certains hébergeurs pour ne pas mettre leur menace d’exil à exécution.
Voir à en complément ci-dessous l’infographie que Gandi a publiée pour décrire la manière dont la loi devrait s’appliquer.
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