L’IA générative envahit les entreprises. Ce n’est plus une impression, c’est une réalité chiffrée. Des taux d’adoption énormes chez les collaborateurs engendrant un effet « Shadow IA » que les DSI essayent de contrôler, des investissements importants mais réfléchis, des cas d’usages toujours mieux identifiés… tel est le paysage dépeint par la dernière étude ABBYY.

L’édition 2025 de l’étude ABBYY sur l’état de l’automatisation intelligente révèle que les entreprises françaises embrassent l’intelligence artificielle avec un mélange d’enthousiasme et de prudence caractéristique. Avec 76% des organisations ayant déjà intégré l’IA générative dans leurs processus, la France se positionne certes en retrait par rapport aux États-Unis et à l’Allemagne où l’adoption dépasse les 80%, mais témoigne néanmoins d’une transformation numérique bien engagée.

Et les DSI ne comptent pas lever le pied en 2026 : 98 % des organisations hexagonales prévoient d’augmenter leurs investissements en intelligence artificielle dans les douze prochains mois. L’élan est réel mais mesuré, la hausse la plus courante envisagée se situant entre +16 % et +20 % en France, signe d’un passage à l’échelle pragmatique plutôt que d’une fuite en avant budgétaire.

Cette adoption massive de l’IA s’explique par des motivations très concrètes. Les entreprises françaises recherchent avant tout l’automatisation des processus documentaires, particulièrement en comptabilité fournisseurs et logistique, ainsi que l’amélioration de la productivité et l’analyse approfondie des données. La moitié des décideurs affirment que l’IA générative leur permet de gagner du temps tout en rationalisant leurs opérations et en améliorant l’expérience client.

Cependant, cette progression rapide de l’IA générative contraste avec une adoption plus mesurée de l’IA spécialisée alors même que c’est celle-ci qui porte le plus de cas d’usages métier. Seulement 47% des entreprises françaises l’utilise contre 58 % au Royaume-Uni et 64 % en Allemagne.
Autre témoignage d’une certaine « prudence à la française », l’IA agentique est déjà adoptée par 48% des entreprises interrogées, un taux déjà élevé mais inférieur aux 56% du Royaume-Uni et aux 50% en Allemagne.
Autrement dit, l’Hexagone a embrassé la GenAI mais aborde plus prudemment les technologies plus ciblées ou autonomes, souvent plus complexes à maîtrise, plus coûteuses à déployer et plus exigeantes en matière de gouvernance.

Un phénomène, finalement assez attendu, émerge avec l’IA fantôme ou « Shadow AI » : près d’une entreprise sur cinq constate que leurs employés utilisent des outils d’IA générative uniquement pour leur productivité personnelle, sans supervision informatique. Cette pratique soulève d’importantes questions de gouvernance et de sécurité des données que les organisations peinent encore à maîtriser.

Sur le terrain, les cas d’usage français restent très opérationnels. Les entreprises s’appuient sur la GenAI pour automatiser les processus documentaires – de la comptabilité fournisseurs à la logistique – dans 57 % des cas, améliorer la productivité des collaborateurs (54 %), analyser les données (52 %) et fluidifier le service client (48 %).

Conscientes des limites de la GenAI « généraliste », elles la complètent de plus en plus par des briques dédiées souvent « clé en mains » : 29 % utilisent de la Process Intelligence, 26 % par de l’Intelligent Document Processing et 28 % par du RAG pour contextualiser les réponses avec leurs données internes.
À l’échelle mondiale, ce couplage paye : 98 % des organisations qui ont ajouté ces technologies constatent de meilleurs résultats, avec en tête une hausse de la qualité et de la constance des outputs (50 %) et de la précision (43 %) .

Les défis rencontrés sont multiples. Un quart des entreprises françaises avouent manquer de structures de gouvernance appropriées, avoir sous-estimé la difficulté de formation des modèles d’IA, ou constater que leurs équipes n’ont pas les compétences nécessaires au déploiement. Face à ces obstacles, les entreprises françaises investissent dans la formation, avec près de la moitié ayant lancé des programmes dédiés, et encouragent le partage de bonnes pratiques entre équipes.

Parallèlement, l’accueil des employés français est remarquablement positif : près de neuf collaborateurs sur dix voient dans l’IA générative un moyen d’améliorer leur productivité et de développer leur créativité. Cette adhésion du personnel constitue un atout majeur pour la DSI et son besoin d’accélérer une nouvelle phase de transformation digitale portée par l’IA.

Reste la ligne de crête à tenir : accélérer sans perdre la maîtrise. La mise à l’échelle de l’IA passe par des fondations robustes (gouvernance, gestion des risques, intégration aux processus, data quality) autant que par des cas d’usage à ROI rapide, souvent documentaires et transverses. Comme le résume Ulf Persson, CEO d’ABBYY : « La GenAI offre des opportunités remarquables pour repenser la manière dont le travail est effectué, ce qui suscite à juste titre beaucoup d’enthousiasme. Cependant, l’IA parallèle […] soulève potentiellement de graves préoccupations en matière de confidentialité des données et de conformité. Les avantages potentiels de la GenAI […] ne peuvent être pleinement exploités que lorsque les dirigeants encouragent une adoption sécurisée et stratégique, en accordant la priorité à la gestion des risques. »

 

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