Après les fabricants d’imprimantes, c’est au tour d’Apple d’être dans le collimateur de l’association HOP (Halte à l’Obsolescence Programmée) pour cause d’obsolescence programmée de ses iPhone.

Suite à la plainte pénale (LIRE LA PLAINTE) contre Apple déposée par l’association HOP en raison du ralentissement volontaire de ses iPhone, un appel à témoin a été lancé sur le site de l’association. Deux chefs d’infractions principaux ont été définis : obsolescence programmée et tromperie.

Selon l’association, les résultats corroborent clairement les éléments avancés dans la plainte. Cette nouvelle action faite suite à celle engagée de celle engagée contre les pratiques des fabricants d’imprimantes qui visent à raccourcir délibérément la durée de vie des imprimantes et des cartouches (Les imprimantes face à l’obsolescence programmée).

Suite aux révélations récentes faisant état de ralentissement des iPhone 6, 6S, SE et 7 après la mise à jour du dernier système d’exploitation, l’association HOP a déposé hier une plainte pénale contre Apple sur le fondement du délit d’obsolescence programmée.

En parallèle, l’association a mis en ligne un formulaire afin de recueillir les témoignages des clients. Les résultats sont édifiants. Sur plus de 350 personnes qui ont répondu en quelques heures on constate que les modèles les plus touchés sont les iPhone 6 et 6S (73% des réponses). Ces téléphones ont subi à 88% des ralentissements qui sont tous apparus en septembre et octobre 2017 à la suite de la mise à jour de la version iOS 11 du système d’exploitation. 88% des personnes concernées ont indiqué vouloir changer de téléphone à la suite de ce ralentissement. Ces résultats ont été transmis au procureur de Paris qui a été saisi par la plainte pénale visant à montrer trois éléments :

– un élément matériel : le recours à des techniques ;
– un élément intentionnel : viser à réduire délibérément la durée de vie du mobile ;
– un mobile ou un résultat espéré : la volonté d’augmenter le taux de remplacement.

Pour l’association, il apparaît donc qu’Apple a mis en place une stratégie globale d’obsolescence programmée en vue d’augmenter ses ventes, étant précisé qu’un iPhone neuf peut coûter jusqu’à 1 200€ :

– l’obsolescence logicielle avec une mise à jour ;
– l’obsolescence technique avec le ralentissement du téléphone ;
– l’obsolescence esthétique avec les meilleurs techniques marketing pour convaincre les clients qu’il faut à tout prix acquérir un nouveau modèle au moment même du ralentissement.

Cette initiative fait suite à plusieurs autres montrant clairement la coïncidence entre le ralentissement des produits et la sortie de nouveaux appareils. Fin 2016, une association internationale de consommateurs, SumOfUs, a lancé la pétition « Apple : arrêtez d’imposer des mises à jour qui sabotent les plus anciens modèles d’iPhone et d’iPad ! » qui a réuni près de 340 000 signataires : « Apple sabote ses appareils avec des mises à jour qui ralentissent tous les iPhone et iPad à moins qu’ils ne soient du plus récent modèle, accusent les auteurs de la pétition. Ainsi, frustré de se retrouver avec un appareil aussi lent qu’un escargot, l’utilisateur n’a d’autre choix que d’en acheter un nouveau. »

Comme à chaque nouvelle sortie d’iPhone, les plaintes ont repris en novembre et décembre 2017 pour l’iPhone 8, notamment sur la plateforme en ligne Reddit. A cette occasion, John Poole, le créateur de l’outil de mesure de performance Geekbench, a réalisé un test sur plusieurs milliers de téléphones (Article The Guardian 21 décembre 2017). Les résultats ont été publiés sur ce blog le 18 décembre (iPhone Performance and Battery Age). Dans cet article, l’auteur constate une dégradation très nette des performances des iPhones 6S et 7 après la mise à jour du système d’exploitation iOS 10.2 à iOS 11.2. Les smartphones les plus touchés voient leur temps de calcul multiplié par plus de deux, c’est-à-dire deux fois plus lents qu’avant.

Face au tollé international, aux plaintes des utilisateurs et aux preuves apportées par John Poole, Apple a reconnu le 20 décembre être intervenue sur des fonctions d’une partie des iPhones SE, 6, 6s durant l’année dernière et sur l’iPhone 7 via la mise à jour iOS 11.26.

Sur la base de cette déclaration, deux plaignants de Chicago et « les résidents de l’Ohio, de l’Indiana et de la Caroline du Nord », ont lancé une « class action » contre Apple, accusant les mises à jour iOS « d’avoir forcé frauduleusement les propriétaires d’iPhone à acheter le dernier modèle proposé par Apple. »

« Tout est orchestré pour contraindre les consommateurs à renouveler leurs smartphones, commente Laetitia Vasseur, Co-fondatrice et déléguée générale de l’association HOP en marge de la Plainte au Procureur de la République. Or, à plus de 1 200€ le téléphone, soit plus d’un SMIC, ces pratiques sont inacceptables et ne peuvent rester impunies. C’est notre mission de défendre les consommateurs et l’environnement face à ce gaspillage organisé par Apple.

Cela fait plusieurs années que des ralentissements sont constatés par les clients d’Apple juste au moment de la sortie d’un nouveau modèle, complète Emile Meunier, avocat de l’association HOP. Mais cette fois-ci, des experts l’ont démontré techniquement et Apple n’a pas eu d’autre choix que de le reconnaître. Pourquoi ce silence toutes ces années ? Pourquoi ce ralentissement au moment de la sortie du nouveau modèle ? Pourquoi ce phénomène ne se rencontre-t-il pas chez d’autres constructeurs tels que Samsung ? C’est à ces questions que l’enquête pénale permettra de répondre, espère-t-il