Workday est un éditeur de logiciel de gestion du capital humain et de gestion financière en mode SaaS. Il a été fondé par David Duffield, fondateur et ancien PDG de PeopleSoft, et Aneel Bhusri également ex-PeopleSoft, après la prise de contrôle hostile de l’éditeur par Oracle en 2005. Ses principaux concurrents sont Oracle et SAP. En octobre 2012, Workday s’est introduite en bourse valorisant la société à 9,5 milliards de dollars. Aujourd’hui, la capitalisation boursière de l’éditeur est de $31Mds.

Dave Sohigian, lui aussi ex-PeopleSoft et CTO EMEA de Workday explique les dernières annonces – Benchmarking, solution Data as a Service, Cloud Platform – et présente la stratégie de l’entreprise.

InformatiqueNews : Est-il trop simpliste de dire que vous êtes le PeopleSoft sur le cloud ?

Dave Sohigian : Oui et non. Il y a très peu de similarités entre nos solutions, mais la culture d’entreprise de PeopleSoft en son temps et celle de Workday aujourd’hui sont très comparables, ce qui n’est trop surprenant puisque les fondateurs sont à l’origine des deux entreprises. Mais pour développer les applications Workday, nous sommes partis d’une page blanche avec un résultat totalement différent.

InformatiqueNews : Qu’est-ce que vous mettez dans le terme culture d’entreprise ?

D.-S. : La manière avec laquelle est gérée l’entreprise, comment les gens sont considérés et la hiérarchisation des valeurs. Dave et Aneel, les co-fondateurs de Workday, considèrent que les salariés constituent le principal capital de l’entreprise et d’ailleurs ils sont placés au premier rang de nos priorités, viennent ensuite les clients, l’innovation, l’intégrité, la profitabilité et le « fun ».

InformatiqueNews : Et pour ce qui concerne les solutions que vous proposez ?

D.-S. : Avec l’équipe de départ, nous avions une expertise très importante. Les 12 premiers employés devaient posséder plusieurs centaines d’expertise dans le domaine des ERP et avaient compris les défis auxquels étaient confrontés les utilisateurs. Pour développer Workday, nous avons analysé ce qui existait sur le marché et nous avons retenu quelques principes simples. D’abord, une et une seule version pour l’application Workday. A un moment donné, tous les utilisateurs ont accès à la même version. Cela peut paraît trivial, mais est en fait très compliqué pour les développeurs. Car à chaque fois qu’ils ajoutent quelque chose à la solution en place, ils doivent toujours avoir en tête que cela ne doit pas « casser » le système existant. À tous moments, tous nos clients ont accès à la même version du logiciel.

Autre principe très bénéfique pour les utilisateurs, notre solution qui regroupe toutes les applications – RH, finance, gestion des frais, gestion des commissions, gestions des absences, intégration des nouveaux salariés, … – est basée sur une seule architecture. A chaque nouvelle version – une en mars, une en septembre – tous les utilisateurs en bénéficient simultanément. La dernière fois en septembre 2017, le passage à la nouvelle version s’est effectué en 4 heures pour tous les clients.

InformatiqueNews : Comment facturez-vous les clients ?

D.-S. : D’abord, comme tout logiciel en mode SaaS, nous les facturons sous la forme d’un abonnement en fonction des modules utilisés dans la solution Workday. Par exemple, les modules RH, formation et recrutement. D’autres y ajouteront le module finance et paie.

InformatiqueNews : Vous avez racheté il y a quelques jours la société Skipflag, spécialisée dans l’Intelligence artificielle et le Machine Learning. Quel en est l’objectif ?

D.-S. : L’IA et le Machine Learning (ML) ont un impact très important sur nos activités. Nous avons une vision un peu différente de celle communément admise. Nous pensons que tout commence avec les données. Autre principe que je n’ai pas mentionné, nous avons un seul modèle de données pour toutes les données, quelles qu’elles soient : RH, paie, finance… Ce qui nous permet de penser au machine learning d’une manière un peu différente. Notre démarche s’inspire de ce que font les entreprises numériques orientées grand public plus que de celles spécialisées dans le B2B. D’ailleurs, notre orientation open source nous permet d’utiliser les mêmes souches logicielles.

Par conception, les données qui entrent dans nos systèmes de ML sont de bonne qualité de telle sorte que le ratio signal/bruit de données utilisées est élevé et permet donc de faire des prévisions pertinentes. Ensuite, plutôt qu’une approche fondée sur les algorithmes, notre démarche s’appuie sur les « use cases » c’est-à-dire « ce que souhaitent faire les utilisateurs ». Par exemple, un salarié qui se poserait une question d’orientation de carrière : quel poste envisager ? Une grande entreprise qui manipule des volumes importants de données et d’employés, peut mieux appréhender cette question avec des données réelles en interne. Cela peut d’ailleurs être utilisé par l’employeur, mais aussi par le salarié (si l’entreprise est d’accord pour ouvrir ses données). Ce type de fonctionnalités n’est pertinent que pour des entreprises de grande taille dont le volume de données est suffisamment grand.

InformatiqueNews : Et les entreprises de plus petite taille ?

D.-S. : C’est là où intervient notre offre Data as a Service, un service offrant aux entreprises de toutes tailles, petites et grandes, avec des informations basées sur l’ensemble des données de nos clients (ceux qui sont d’accord pour partager leurs données sous des conditions très strictes, notamment d’anonymisation). Premier-né de cette nouvelle offre DaaS, annoncé en octobre dernier, Workday Benchmarking génère des indicateurs clés permettant aux clients de mieux évaluer leurs performances par rapport à celles des autres entreprises, dans le but d’optimiser leurs activités sur leurs marchés respectifs.

Avec cette solution, les clients peuvent tirer parti de la puissance mondiale de la vaste communauté Workday, forte de plus de 26 millions d’employés représentant plus de 1 800 entreprises. Le service est complètement unifié à l’ensemble des solutions Workday (Financial Management, Human Capital Management (HCM), Planning, Prism Analytics…).

InformatiqueNews : Comment vos clients ont réagi à cette nouvelle offre ?

D.-S. : De manière très positive et plus d’une centaine d’entreprises a déjà signé pour ce nouveau service. Un nombre très encourageant qui montre que les entreprises sont mûres et ont confiance dans le cloud et l’exploitation des données.

InformatiqueNews : Où en êtes-vous dans la conformité à la future réglementation GDPR ?

D.-S. : De par la conception de notre solution (une version, une architecture, un modèle de données), nous avons intégré la confidentialité et la sécurité des données dès le début. De telle sorte que la mise en conformité à la GDPR pour nos clients en est largement facilitée. Et nous sommes aussi préparés pour les futures réglementations qui pourraient intervenir.

InformatiqueNews : Comme certains éditeurs SaaS, vous êtes entrés sur le PaaS en ouvrant votre solution et en permettant à des partenaires d’y ajouter des extensions. Quel est le but ?

D.-S. : Nous n’utilisons pas le terme PaaS et de nombreuses plates-formes existent déjà : Force.com, Google, AWS… En revanche, beaucoup de nos clients demandent à pouvoir intégrer les données qu’ils utilisent dans d’autres solutions (Salesforce, Slack, Gmail…) dans Workday et ainsi augmenter la pertinence des analyses qu’ils pourront faire avec un volume de données plus important et lié à leurs activités. Cette interaction devra pouvoir se faire dans les deux sens. C’est l’objectif de notre Workday Cloud Platform qui fonctionne avec une API RESTful permettant d’accéder aux données et aux fonctionnalités de Workday. Nous allons développer cette initiative en trois étapes. D’abord nos clients qui pourront ainsi étendre leur analyse avec des données tierces. Ensuite des partenaires qui pourront développer des applications utilisant les données de Workday. Enfin, les partenaires qui pourront développer leur propre application en complément à notre solution. Cette dernière étape ne sera sans doute pas pour cette année.