Dans un monde des télécommunications où tout s’accélère, sous la pression des opérateurs d’un côté, et de l’autre par l’émergence des acteurs « Over the top » (OTT), la virtualisation s’impose comme un axe d’évolution majeur. Néanmoins ces technologies doivent aussi répondre aux exigences des télécommunications. Problème de culture pour les uns ou méconnaissance des contraintes du temps réel pour les autres ?

La virtualisation n’est pas la panacée …

De plus en plus, les opérateurs de services de télécommunication, en particulier ceux issus des services IT ou Web, attendent des équipementiers télécom que leurs solutions soient  « logicielles », comme le sont leurs services IT ou Internet. Ici, la distinction entre logiciel et solutions télécom classiques repose sur la possibilité d’être déployé sur des serveurs standards,  dans des datacenters informatiques, voire être hébergés par d’autres acteurs, spécialistes de l’hébergement informatique. L’intérêt de ces déploiements, en termes de facilités, rationalisation des coûts d’achat et de maintenance, est encore augmenté par la modularité et l’évolutivité qu’apporte la flexibilité de la virtualisation. Cette flexibilité permet aussi de rendre des services multi-tenant, c’est-à-dire des infrastructures mutualisées partagées entre plusieurs exploitants, beaucoup plus facilement qu’avant, grâce au partitionnement inhérent à la virtualisation.

Or, les communications temps réel, c’est-à-dire principalement le transport de la voix  de la vidéo, sont soumises à des contraintes plus fortes que les services IT, voire Web comme le e-commerce. Le temps de réponse variable sur une application de vente en ligne, a peu d’incidence sur la qualité de service perçue par l’internaute. En revanche, des interruptions dans les flux multimédias, sont difficilement tolérées, en particulier dans  un contexte professionnel, et même pour des communications riches, ou dites unifiées, qui marient audio ou vidéo-conférence avec partage de données, par exemple.

La cohabitation… pourquoi pas ?

En d’autres termes, comment dans un contexte de communication temps réel, les  opérateurs pourraient adopter des solutions et techniques issues davantage du monde informatique? S’il faudrait profiter des atouts de la virtualisation, dont les principaux sont la souplesse, l’évolutivité et la pérennité, il faut préserver la disponibilité, de résilience et de qualité de service des solutions télécoms, garantie historiquement par l’usage de hardware dédié.

Rappelons que les technologies de virtualisation n’ont pu se développer qu’à travers la montée en puissance des processeurs multi-cœurs sur l’architecture Intel X86, la baisse relative des composants mémoire et les nouvelles technologies de stockage sur disque, le tout intégré dans des serveurs standardisés. Gérer à travers un hyperviseur plusieurs machines virtuelles, requiert en effet des machines puissantes.

NFV en embuscade !

NFV (Network Function Virtualization) permet de construire l’architecture du réseau de communication à l’aide, non plus de fonctions de réseau réalisées par des équipements dédiés, mais par de véritables fonctions logicielles s’appuyant sur les techniques de virtualisation, et du matériel standard de l’industrie IT. Ainsi, l’exploitation du réseau devient nettement plus aisée dans la mesure où le logiciel peut dynamiquement être installé ou déplacé sur divers équipements standards du réseau au gré des besoins, sans devoir installer de nouveaux équipements dédiés.

NFV redessine l’architecture réseau en deux principaux blocs distincts : les fonction de réseau virtuelles, qui assurent les services rendus par le réseau, et l’infrastructure de virtualisation des fonctions de réseau  qui regroupe le matériel (serveur, cartes, mémoires, disques…) ainsi que le logiciel support de la virtualisation, dont les hyperviseurs de virtualisation et les orchestrateurs sont les principaux composants.

Les travaux de l’ETSI (European Telecommunications Standards Institute) auxquels Cirpack participe au sein du groupe de travail NFV ISG (Industrie Spécification Group), visent à contribuer à la définition et aux évolutions de cette nouvelle approche virtualisée de la conception et de la gestion de solutions réseau. Créé en novembre 2012, le groupe de travail NFV ISG a été principalement initié par les grands opérateurs pour faire avancer la standardisation.

Deux phases de travail ont été planifiées : mettre en place l’architecture ; définir ensuite le modèle d’interface et intégrer la notion de management et d’orchestration. Cette seconde phase, qui constitue une grande première en matière de standardisation, a pour objectif de faciliter le déploiement, l’administration, la configuration et la maintenance.

Aujourd’hui, les solutions de virtualisation développées par Cirpack sont basées sur la norme NFV et supporteront les évolutions relatives à la phase 2.

Cirpack offre deux choix possible : l’option « clé en main » (logiciels et matériels intégrés) et l’option NFV qui repose sur une infrastructure de virtualisation basées sur des hyperviseurs du marché.

SDN et NFV: deux approches complémentaires en faveur du tout IP !

Pour les opérateurs de service, NFV a le mérite de rendre les applications indépendantes du matériel.

Situé au niveau inférieur de NFV, SDN (Software-Defined Networking) est une approche qui découple le plan de contrôle (contrôleur logiciel) du plan d’infrastructure (équipements de transport) des équipements de transport IP. SDN permet donc d’optimiser les utilisations et les communications entre des différents équipements du réseau à l’aide d’un protocole standard, tel que OpenFlow. SDN représente une évolution du modèle basé sur les « boîtes noires » dédiées vers le modèle distribué d’équipements de réseau pilotés par un contrôleur centralisé.

Lorsque SDN et NVF seront massivement adoptés par l’industrie des télécommunications, les opérateurs pourront disposer d’avantages tangibles en matière de flexibilité et d’optimisation des coûts. Ils seront par conséquent plus enclins à migrer leurs réseaux vers des architectures tout IP. Déjà bien amorcée, cette migration va s’accélérer face à l’arrivée de solutions s’appuyant sur la complémentarité entre SDN et NFV qui pérennise davantage les investissements. En outre, elle s’impose dans le mobile avec le déploiement de la 4G LTE qui nécessite un cœur de réseau IP basé sur le protocole SIP et une architecture IMS.

NFV va naturellement favoriser le développement de nombreuses applications qui vont proportionnellement exiger plus de flexibilité et d’agilité de déploiement. À terme, les  services fondés sur NFV et SDN seront situés dans le cloud et les opérateurs pourront ainsi bénéficier d’une plus grande souplesse de mise en œuvre et de déploiement afin de pouvoir « reprendre la main » dans la bataille commerciale qui s’engage avec les grands acteurs du Web.

L’exemple du WebRTC en deux dimensions

Accessibles via un simple navigateur Web, les applications WebRTC destinées à des clients résidentiels ou professionnels offrent non seulement des services classiques de communication voix/vidéo, mais également des services plus évolués, tels que les solutions de que l’on nomme Communication Unifiée : messagerie instantanée, partage de fichiers, présence, visioconférence, etc.

À la différence des  services multimédia classiques proposées par des acteurs OTT, qui nécessitent l’installation d’application spécifique sur l’équipement de l’utilisateur, les applications WebRTC sont accessibles à travers un simple lien ‘http’ depuis un navigateur conforme à la norme W3C (World Wide Web Consortium), tel que Chrome et Firefox. Or, les Communications Unifiées telles qu’elles devraient être proposées par les opérateurs sur la technologie WebRTC supposent une qualité de service bien supérieure au mode « Best effort » inhérent aux services OTT. C’est là que le rôle du SBC (Session Border Controller) prend toute sa dimension pour assurer les fonctions de transcodages (Codecs), d’encryptions, de sécurité, et de passerelle vers le reste du réseau téléphonique.

Deux approches sont alors possibles : intégrer les fonctions du SBC dans l’application logicielle WebRTC ou intégrer sur un équipement SBC la gestion spécifique de la connectivité WebRTC. Dans le premier cas, le NFV pourra être appliqué, dans le second on pourra considérer l’approche comme hybride. En effet, les contraintes du temps réel pour supporter la voix, l’image et la vidéo, sont de nature à complexifier l’approche purement logicielle. Le SBC est un équipement qui gère la signalisation et le média et qui intègre des fonctions d’encryptions de paquets et de transcodage complexes à virtualiser lorsque l’on souhaite atteindre un bon niveau de capacité et de performance.

La solution hybride se compose alors d’une partie purement logicielle pour le plan de contrôle gérant la signalisation et d’une partie matérielle qui régit les médias grâce à des cartes accélératrices ou serveurs dédiés afin d’assurer des performances adaptées à des contextes d’opérateurs adressant des centaines de milliers, voire million d’utilisateurs. Cirpack propose les deux approches afin de répondre aux attentes diversifiées de ses clients.

Quel avenir pour la virtualisation ?

Les technologies de virtualisation développées à l’origine pour optimiser l’usage des serveurs ont peu à peu changé le paysage de l’informatique en contribuant fortement à l’essor du Cloud computing.

Au cœur de cette transformation numérique, les opérateurs de télécommunication désire profiter de l’accélération massive des technologies IT. Tout naturellement, la virtualisation s’est donc imposée comme une évidence. La première consistait à simplifier l’administration des services réseau et la seconde impliquait le déploiement de fonctions ou d’applications en évitant la mise en place d’équipements spécifiques et onéreux, sources de complexité en termes de déploiement, de mises à jour et d’exploitation. Ainsi les technologies SDN et NFV sont arrivées à point nommé pour apporter un nouveau souffle aux opérateurs et fournisseurs de services, qui cherchaient avant tout, un moyen de réduire et d’optimiser leurs coûts d’investissement et d’exploitation. Sous l’effet des accords de normalisation, le train est en marche de façon inexorable. Reste à observer comment les acteurs du marché vont pouvoir s’appuyer sur ces technologies pour créer de nouvelles opportunités et s’orienter vers d’autres modèles économiques.

Alban  Couturier, Chef de produit