Avec la montée en puissance des PC-Plus, alias machines Windroid, le CES 2014, qui se tient actuellement à Las Vegas, marquera une étape importante dans la lutte de titans qui oppose le clan Microsoft à la tribu Google, avec un Apple qui entend jouer sa propre partition.

Lors de l’une des conférences plénières du CES, Brian Krzawich, CEO d’Intel, a confirmé que son entreprise promouvrait le double OS, qualifié par certains de Windroid, combinant Windows et Android. Selon le CEO d’Intel, les futurs ordinateurs supportant ce double OS offriront le « meilleur des deux mondes », les applications du monde PC sous Windows et les apps d’Android, chacune avec l’interface homme/machine la mieux adaptée ou choisie par l’utilisateur.

Cette possibilité était offerte par différents plates-formes comme Bluestack mais le fait  qu’elle soit poussée par Intel change la donne. Rosen Sharma, CEO de BlueStack, a déclaré au magazine VentureBeat que cette concurrence ne l’effrayait pas outre-mesure (BlueStacks responds to Intel’s Android-on-Windows plan: We did this years ago). A signaler qu’Intel possède une participation au capital de BlueStack (tout comme dans celui de Qualcomm et AMD, ses deux grands rivaux dans les mondes des microprocesseurs pour mobiles et X86).

C’est donc une évolution significative dans le partenariat qui lie Intel à Microsoft depuis plus de 30 ans connu sous le label Wintel. Intel ne peut pas se permettre de rester en retrait dans l’environnement Android. Adopté par les grands constructeurs de mobiles, Samsung, HTC, Sony entre autres, Android devrait équiper 1,1 milliard de tablettes et smartphones en 2014, soit une hausse de 26% par rapport à 2013. En comparaison, le monde Windows ne représentera que 328 millions d’appareils sachant qu’il est marginal sur les deux segments les plus dynamiques.

L’enjeu est de taille, pas moins que la suprématie des terminaux intelligents désormais omniprésents. Car si Bill Gates a bien réussi à mettre un PC sur chaque bureau, les tablettes et autres smartphones ont vocations à être présents partout ailleurs. Dans cette bataille, l’avantage est plutôt à Google tandis que Microsoft est sur la défensive et essaye tant bien que mal de défendre son empire.

Petit retour en arrière.

Acte 1 : Google, qui ne s’intéresse que d’assez loin aux PC, rachète en 2005 la société Android qui a développé un OS pour tablettes, smartphones. Cet OS est basé sur un noyau Linux est conçu pour des équipements mobiles disposant de peu de ressources.

Acte 2 : Avec l’iPhone (janvier 2007) et l’iPad (janvier 2010), Apple défriche les terres vierges des smartphones et des tablettes et en engrange les premiers bénéfices. La firme de Cupertino est devenu le leader de la high tech avec un chiffre d’affaires de 171 Mds$ et un bénéfice net de 41 Mds$. HP, le numéro Un du secteur IT, est loin derrière et surtout beaucoup moins profitable.

Acte 3 : Dans le sillage d’Apple, des constructeurs emmenés par Samsung mènent la contre-attaque. Les derniers chiffres connus donnent plus de 80 % d’un marché des smartphones dominé par Samsung (Au troisième trimestre 2013, Samsung a vendu 40 % des smartphones Android soit 84 millions d’unités, plus du double d’Apple. Côté tablettes, Apple reste leader mais perd du terrain. De juin 2012 au 3e trimestre 2013, Apple est passé de 60 à 30 de parts de marché tandis que Samsung effectue le mouvement inverse pour atteindre.

Acte 4 : Alors que les ventes de PC sont en chute libre, celles des tablettes explosent. Parallèlement à ce mouvement, Google pose une empreinte de plus en plus forte sur le marché des mobiles. Microsoft tente une synthèse (impossible ?) : un même OS pour PC et tablettes. Pendant ce temps, les constructeurs de PC doivent bien trouver de nouveaux débouchés et se lancent sur le marché des tablettes avec un succès inégal. Malgré l’offensive de Microsoft avec Windows 8, les particuliers se ruent sur les tablettes Apple et Android et les DSI rechignent à passer au nouvel OS et continuent à acheter des PC équipés de Windows 7 (ce que ne peuvent pas faire les particuliers, cas de figure bien connu). Elles sont assez lasses de ces migrations à répétition qui font l’affaire des fournisseurs mais n’apportent pas de retour sur investissement très net. Certaines sont encore sous Windows XP alors même que le système d’exploitation ne sera plus supporté par Microsoft à partir d’avril prochain. Côté smartphone, Microsoft rachète la division mobile de Nokia pour tenter de reprendre son destin en main sur ce marché.

Aujourd’hui, quelle stratégie pour les fournisseurs de PC ? Les fabricants de PC espéraient que la fronde antiWindows 8 s’essoufflerait. De telle sorte que HP, Lenovo, Dell et Asus se sont mis à proposer des tablettes sous Android car malgré la promotion d’Intel, les tablettes X86 ne jouent même pas en deuxième division.  Par ailleurs, les marges sur les tablettes y sont encore plus faibles. Ne s’agissait-il pas de lâcher la proie pour l’ombre ? De telle sorte qu’ils se sont lancés dans cette nouvelle aventure des PC-Plus qui supportent simultanément les deux systèmes d’exploitation : Windows en natif et Android en émulation. 2 machines en une seule en quelque sorte. Les prochains nous dirons si c’est là une bonne idée car ce que le CEO d’Intel qualifie de meilleur des deux mondes peut en fait se transformer en pire des solutions.

Livraison des 4 premiers OS (en millions) et parts de marché

Système d’exploitation

3T13

En %

3T12

En %

3T13/3T12

Android

211,6

81,0

139,9

74,9

51,3

iOS

33,8

12,9

26,9

14,4

25,6

Windows Phone

9,5

3,6

3,7

2,0

156,0

BlackBerry

4,5

1,7

7,7

4,1

-41,6

Autres

1,7

0,6

8,4

4,5

-80,1

Total

261,1

100,0

186,7

100,0

39,9

(Source: IDC Worldwide Mobile Phone Tracker, November 12, 2013)