Malgré un chiffre d’affaires en assez forte baisse, IBM a réussi le tour de force de maintenir les bénéfices à un niveau élevé (pour combien de temps ?) avec des ventes de matériels catastrophiques.
Le point positif des résultats 2013 publiés par IBM est la capacité de Big Blue à dégager des bénéfices. Qu’on en juge : avec un chiffre d’affaires à peine supérieur à celui réalisé en 2004, IBM a engrangé des bénéfices deux fois plus importants. Mais c’est sans doute le seul car on a beau chercher dans les chiffres et les tendances, on ne voit rien de très positif. C’est là le premier exercice dont la responsabilité peut-être imputée entièrement à Ginni Rometty, qui a succédé à Sam Palmisano en janvier 2012. Sans entrer dans les théories de l’héritage, on peut raisonnablement penser qu’une bonne partie de l’exercice 2012 résultait des décisions prises par son prédécesseur.
IBM n’arrive plus à générer de croissance et est pleinement axé (obnubilé) sur la génération d’activités à hautes marges. En 2004, il y a dix ans, IBM avait réalisé $96,2mds de CA, dix ans plus tard et malgré 110 acquisitions, IBM a réalisé un CA à peine supérieur de $99,8mds, en baisse de 5% par rapport à 2012. Depuis cette date, IBM a réalisé un CA qui oscille entre 92 et 107 milliards de dollars mais sans marquer de tendance particulière. Un exercice est meilleur ou moins bon que le précédent mais pour des raisons plus conjoncturelles que structurelles.
La ventilation par type d’activités pointe un problème récurrent qui devient désormais préoccupant : la baisse des ventes de serveurs, et ce, quel que soit le type de matériels. Les ventes de serveurs ont atteint 14,4 milliards de dollars (-19 %) contre 28,2 mds en 2003. Et la tendance est encore plus problématique. Au quatrième trimestre 2013, les ventes de mainframes (system z) ont baissé de 37 %, celles de Power System (System i et p) de 26 % et les serveurs x86 (system x) de 16%. Une situation paradoxale si l’on considère que c’est cette dernière activité qu’IBM serait en train de céder (Lenovo en passe de racheter l’activité serveur x86 d’IBM ?). Il est vrai que les Systems x génèrent moins de revenus complémentaires (Logiciels et services) que les autres serveurs. Autre point à mentionner, la puissance délivrée en Mips avec les Systems z a baissé de 26 %.
L’activité logiciels, qui est de loin la plus rentable avec une marge brute imbattable de 90 %, est an augmentation de seulement 2%.
L’Analytics, segment sur lequel IBM mise beaucoup, représente un chiffre d’affaires de 15,7 % de dollars en hausse de 9 %. Watson, qui est la dernière innovation d’IBM, aurait plus de mal à trouver une concrétisation commerciale que prévue (Watson d’IBM à la peine). IBM a redonné du lustre à cette nouvelle offre avec une présentation montrant les applications possibles avec ce système (IBM réaffirme ses ambitions avec Watson). Smarter Planet qui est devenu l’un des alphas et omégas de l’entreprise a produit des ventes en hausse de 20 % mais dont IBM ne précise pas le montant. Enfin, les revenus provenant du cloud qui auraient atteint 4,4 milliards de dollars en hausse de 69 % montrent que c’est une activité encore très modeste. Par ailleurs, on se souvient des doutes émis par la SEC sur le bien-fondé des chiffres avancés par Big Blue dans le domaine du cloud.
IBM communique massivement depuis plusieurs années sur son investissement dans les pays émergents, notamment les BRIC. Sur ce terrain, les résultats 2013 ne sont pas bons non plus et révèlent une baisse de 12 % dans la zone Asie-Pacifique censée être la plus dynamique des régions couvertes par IBM.
Dans un article publié par la société de conseil en IT Net(net) qui se donne pour objectif d’expliquer pourquoi Ginni Rometty échouera (Top 10 Reasons Why Ginni Rometty Will Fail as IBM’s New CEO), un IBMer avec 16 ans d’expérience donne une vision des choses très négative sur l’action de l’actuelle CEO mais qui résume assez bien la situation : « Ginni is my 3rd CEO. Under Lou, we had a ‘let’s do it together’ teaming and mentality. Sam is actually the one who created the whole mess we’re in now, we shouldn’t forget that, Ginni is only following the path he laid out. But She is the worst CEO, because she doesn’t turn the steering wheel around even though she see’s cliff we’re navigating to. »
En tous cas, première réaction concrète de ces mauvais résultats, la direction de l’entreprise a annoncé qu’elle renonçait à ses bonus. Jusqu’ici le cours de l’action a réussi à tenir dans la mesure où IBM a réalisé ses prévisions en termes de bénéfices et de revenus par action. Mais pour combien de temps ?