L’arrivée de Gérald Karsenti à la tête d’Oracle France soulève à la fois espoir et scepticisme de la part des clients et partenaires. Officiellement, l’ex patron de HP France, a été nommé pour assurer la transition des clients vers le Cloud. En pratique il a la lourde tâche de restaurer l’image d’Oracle France.
Et il y a fort à faire en la matière : « les audits de licences à répétition donnant systématiquement lieu à lourdes factures de mise en conformité ont profondément dégradé l’image d’Oracle auprès des clients », souligne le PDG d’un gros partenaire français de la marque. « La politique de licencing d’Oracle est devenue extrêmement complexe et surtout piégeuse ce qui la rend difficile à respecter à la lettre », poursuit-il. Même les commerciaux d’Oracle en interne finissent par s’y perdre. Des partenaires d’autant plus mal à l’aise que c’est à eux que les clients redressés viennent ensuite se plaindre d’avoir mal estimé le coût de leurs licences.
Autre problème que le nouveau country manager aura à résoudre : la concurrence que se livrent en interne les deux principales divisions d’oracle. Une concurrence qui devient « vraiment gênante » selon les termes d’un partenaire. D’un côté la division systèmes conduite jusque-là par Harry Zarrouk pousse l’offre physique, dont le fer de lance est l’offre Exadata, et de l’autre la division jusque-là conduite par Karim Zein et aujourd’hui reprise par Gérald Karsenti, qui pousse les offres Cloud et notamment les offres Cloud at Customer – une déclinaison du Cloud Oracle installée dans les data centers des clients.
Dernier point, et non des moindres, incombant à Gérald Karsenti : redresser l’image employeur d’Oracle France après « quinze mois de méthodes brutales, de licenciements, de brimades, de mises au pas qui, loin de donner l’électrochoc d’un rebond, ont eu l’effet inverse », regrette en off un membre des instances représentatives. Des méthodes dont les partenaires ont particulièrement fait les frais. Selon nos informations, une grosse moitié de l’équipe partenaires (soit une bonne douzaine de commerciaux, dont le patron des ventes indirectes Brieux Courcoux) a quitté l’entreprise à l’occasion du dernier plan social, ainsi qu’une bonne moitié de l’équipe avant-vente (soit une trentaine de personnes), laissant un sentiment de flottement général et de nombreux partenaires sans interlocuteurs (ou gérés par un vague interlocuteur roumain).
La tâche de Gérald Karsenti sera d’autant plus ardue que, contrairement à ce qui prévaut chez HP, le country manager France d’Oracle n’a pas réellement de pouvoir. « Les filiales sont pilotées directement par la Corp, assure un partenaire. Même l’Europe n’a pas de pouvoir ». Cela se vérifie notamment avec les audits : le country manager n’a non seulement pas le pouvoir de les empêcher mais il n’a pas non plus celui d’arranger les choses. Il doit systématiquement obtenir l’arbitrage de la Corp. qui ne lui donne jamais raison. Ce serait d’ailleurs l’une des raisons du départ d’Harry Zarrouk à l’Europe.
Même interrogation sur le plan social. Gérald Karsenti est certes connu pour ses théories progressistes en matière de leadership et de management et pour sa grande habileté politique mais, selon nos informations, il n’est pas mandataire social chez Oracle France, ce qui limite son pouvoir.
Toutefois, certains y croient. « Gérald a été nommé country leader avec une mission qui parait dépasser largement la seule organisation License TSBU, pour réduire la pression de concurrence interne vis-à-vis de nos clients, indique notre représentant du personnel. Après des années de segmentation des organisations, avec des lignes de management présentant des points de rencontre de plus en plus hauts vers la Corp, la mise en place d’un nouveau DG France, même sans mandat social, devrait ramener un point d’arbitrage national visible et accessible dans l’élaboration des stratégies des différents patrons de LOB (lignes de business), avec en sus un carnet d’adresse et une crédibilité sur le marché qui devraient décourager la poursuite de stratégies individuelles. »
« L’arrivée de Gérald Karsenti est un très bon signal pour redresser l’image très dégradée de l’entreprise et la concurrence interne des divisions Systems et Technology », expose sobrement le directeur général d’un des principaux partenaires d’Oracle. À l’inverse, le PDG du partenaire déjà cité pronostique que « Gérald Karsenti n’aura jamais l’autonomie qu’il avait chez HP. Je ne vois pas comment il va pouvoir changer les choses chez Oracle ».
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