Lors du OVHcloud Summit 2025 qui s’est tenu le 20 novembre à Paris, devant plus de 2000 participants, OVHcloud a dévoilé sa Quantum Platform, sa première offre de Quantum-as-a-Service. Une annonce qui pourrait bien marquer un tournant stratégique pour l’indépendance technologique européenne face aux géants américains et chinois.

Fini le temps où l’informatique quantique restait confinée aux laboratoires de recherche. Grâce au cloud, étudiants, chercheurs, entreprises, agences gouvernementales peuvent explorer le potentiel du quantique grâce à des services clouds exposant de véritables machines quantiques même si ces dernières demandent beaucoup d’attention aux équipes R&D qui les opèrent et les optimisent. Mais jusqu’ici, si on omet les plateformes Cloud pas toujours très ouvertes des fabricants de machines quantiques, ces offres QaaS (Quantum as a Service) étaient opérées par les géants américains du Cloud à commencer par Azure, AWS, Google Cloud (en version accès restreint) et surtout IBM avec sa quinzaine de machines accessibles, probablement le service QaaS le plus mature et le plus fréquenté.

Il était temps qu’un acteur européen vienne se mêler à la bataille alors que l’Europe et la France en particulier disposent de DeepTech très avancées aussi bien dans le hardware quantique que dans le software quantique.

Et il y avait comme une évidence à voir OVHcloud devenir le pionnier du QaaS européen, lui qui a intégré une machine quantique dans ses datacenters depuis plusieurs années et a même généralisé une solution de chiffrement à base de quantique pour protéger les sites Web.

À OVHcloud Summit 2025, la semaine dernière, l’hyperscaler français a ainsi lancé sa Quantum Platform. Non seulement le service propose 7 émulateurs quantiques (à base de CPU classiques) et 3 émulateurs classiques à base de GPU (dont l’émulateur quantique CUDA-Q de Nvidia), mais il donne surtout accès à une véritable machine quantique avec le QPU Orion Beta de Pasqal, doté de 100 qubits basés sur la technologie des atomes neutres.

Les qubits d’atomes neutres, piégés et manipulés par des lasers dans le vide, offrent une meilleure évolutivité que les approches à ions piégés ou supraconducteurs. Cette architecture ouvre déjà la voie à des applications industrielles expérimentales mais concrètes : optimisation logistique, simulation moléculaire pour la pharmacie, intelligence artificielle hybride. Des entreprises comme EDF, BASF, BMW et Thales explorent déjà ces possibilités avec Pasqal.

Un écosystème quantique européen en pleine expansion

La stratégie d’OVHcloud ne s’arrête pas là. Le groupe prévoit d’intégrer huit systèmes quantiques supplémentaires d’ici fin 2027, dont sept européens. Cette montée en puissance progressive permet aux entreprises de se familiariser avec la technologie sans investissements massifs en infrastructure spécialisée.

Octave Klaba, fondateur et PDG d’OVHcloud, souligne que « l’informatique quantique va redéfinir les frontières économiques grâce à une puissance de calcul et de simulation sans précédent ». Une vision ambitieuse qui s’appuie sur des bases solides : plus de 1000 utilisateurs exploitent déjà la gamme d’émulateurs quantiques d’OVHcloud, préparant ainsi le terrain pour l’adoption des véritables ordinateurs quantiques.

OVHcloud a également intégré la plateforme cuQuantum de NVIDIA dans son offre cloud et son NGC (NVidia GPU Cloud) afin de permettre aux chercheurs et entreprises de simuler efficacement des circuits quantiques sur GPU. cuQuantum est une plateforme logicielle de NVIDIA qui accélère la simulation de circuits quantiques en exploitant la puissance des GPU. Elle fournit des bibliothèques optimisées (state vector, tensor network, density matrix) permettant de simuler des systèmes quantiques de grande taille avec des gains de performance de plusieurs ordres de grandeur. Enfin, elle s’intègre à des frameworks existants (notamment le nouveau framework Cuda-Q de Nvidia) et peut être déployée sur des clusters multi-GPU ou dans le cloud, ouvrant la voie à des recherches et validations à grande échelle.

La souveraineté numérique au cœur de la stratégie

Au-delà de la prouesse technologique, cette initiative revêt une dimension géopolitique cruciale. Loïc Henriet, CEO de Pasqal, affirme que cette collaboration représente « une étape majeure vers la souveraineté numérique européenne’, garantissant que l’informatique quantique puisse être développée, déployée et opérée entièrement en Europe.

Le modèle « as-a-service » démocratise l’accès à ces technologies de pointe. Les entreprises peuvent désormais expérimenter des algorithmes quantiques dans des conditions réelles, itérer sur des cas d’usage complexes, et intégrer progressivement ces ressources dans leurs flux de R&D, le tout sans dépendre de fournisseurs extra-européens.

Parallèlement, la R&D quantique française continue de faire parler d’elle. Pasqal a franchi un cap symbolique en juin 2024 en dépassant la barre des 1000 atomes piégés dans une même QPU, avec une feuille de route ambitieuse visant 10 000 qubits d’ici 2026 et une architecture tolérante aux fautes. Ces avancées techniques se traduisent par des applications concrètes : optimisation énergétique, simulation de matériaux, résolution de problèmes complexes d’optimisation logistique. Alice & Bob a confirmé son statut de pionnier mondial en janvier 2025 avec une levée de 100 millions d’euros pour accélérer le développement de ses “qubits de chat”, intrinsèquement protégés contre certaines erreurs et conçus pour rendre l’informatique quantique tolérante aux fautes d’ici 2030. Quandela, de son côté, a inauguré à Massy une usine dédiée à la photonique et livré plusieurs ordinateurs quantiques photoniques, dont le premier commercial en partenariat avec OVHcloud, tout en visant la production industrielle à l’horizon 2028 et l’obtention de qubits logiques sans erreur dès 2026. La jeune pousse a livré récemment une de ses machines au TGCC du CEA dans le cadre du programme de calcul hybride HPC-Quantique. Enfin, C12 explore une voie radicalement différente avec ses qubits basés sur des nanotubes de carbone : après une levée de 18 millions d’euros en juin 2024, la start-up a démontré des temps de cohérence record et prépare une “Quantum Fab” parisienne pour passer à l’échelle, avec l’ambition de construire un ordinateur quantique universel d’ici 2032.

Cette annonce d’un service QaaS accessible à tous dans OVHcloud s’inscrit dans une dynamique plus large décrite lors du OVHcloud Summit 2025, où l’hébergeur a également dévoilé des solutions pour les jumeaux numériques professionnels, des infrastructures IA pour l’inférence, et un programme d’accompagnement des éditeurs vers l’IA agentique.

 

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