La proposition de loi relative à la sécurité globale examinée par le gouvernement fin novembre 2020 entend fournir un cadre à l’utilisation des drones pour des situations de surveillance. Si celle-ci n’est pas nouvelle, elle restait jusqu’alors marginale et n’était régie par aucune règle particulière en dehors de celles applicables aux aéronefs civils. Surtout, elle ne définissait pas quel type de drone utiliser, au risque d’une utilisation inadéquate d’engins conçus à l’origine pour les activités de loisir, et/ou provenant de fabricants, asiatiques pour la plupart, suspects de ne pas assurer un strict contrôle de la confidentialité des données captées.

Le développement de l’utilisation des drones dans la surveillance est inéluctable. En effet, ils offrent des possibilités inédites et multiples pour renforcer la sécurité et la sûreté, publique ou privée.

Afin de pallier les éventuels débordements, plusieurs dispositions sont désormais prévues pour fournir un cadre légal répondant aux questions de respect de la vie privée. Cependant, il semble tout autant nécessaire d’enfin définir strictement les types de drones accrédités pour assurer les missions de surveillance, en tenant compte par ailleurs des impératifs de sûreté nationale.

Le « système de drone » est une technologie mobile qui permet « vu de dessus » une surveillance à 360° et continue, et qui ne souffre d’aucune interruption liée à l’activité humaine (congés, arrêts maladies…). La captation, l’enregistrement et la transmission d’images sont permis dans divers cas de figure dont la sécurité des rassemblements de personnes sur la voie publique ou dans des lieux publics (manifestations), la prévention d’actes de terrorisme, la surveillance des littoraux et des zones frontalières ou encore le constat des infractions et la poursuite de leurs auteurs par la collecte de preuve.

Pourquoi parler de « système de drone » et non pas simplement de « drone » ? Le « drone » en lui-même est un simple porteur de charges, constitué de pièces mécaniques, d’une batterie et d’un autopilote lui permettant de naviguer et d’évoluer dans l’espace, qui a la capacité de voler de manière autonome, sans personne à bord.

Il intègre deux types de charges : des composants électroniques et des supports d’applications logicielles de haute technologie (disques durs) qui vont lui permettre de se diriger, de communiquer avec le sol, d’analyser en temps réel des données, de les stocker et les transmettre. Des charges utiles, enfin, qui sont des capteurs de diverse nature : optique, infrarouge, thermique, etc.

On comprend donc aisément que le point crucial d’une utilisation d’un système de drone respectueuse des règles de vie privée et de la préservation du droit individuel de droit à l’image dépend de deux facteurs essentiels.

  • Le premier est que les données (images) captées, voire enregistrées par les systèmes de drone doivent pouvoir être consultées uniquement par des personnes appartenant à des structures qualifiées, services de Police et de Gendarmerie, personnels assermentés.
  • Le second réside dans la faculté à tout moment, sur simple requête, de pouvoir accéder aux codes sources des composants électroniques et des logiciels, afin de s’assurer de leur parfaite cohérence avec les missions à réaliser, de manière également à intégrer des fonctions additionnelles relevant de l’Intelligence artificielle (IA) telles que la reconnaissance de formes, le floutage, etc.

En amont, le concepteur du système de drone doit s’assurer que les produits qu’il propose sont conformes aux exigences de l’autorité aérienne civile, en réalité de chaque autorité dans chacun des pays où le système sera opéré.

Il doit également être en mesure de prouver que son équipement est en capacité de fonctionner en « mode dégradé » afin de prévenir tout incident : c’est ce que l’on appelle la « sécurité embarquée ». Une attention toute particulière doit être apportée à ce type d’usage afin de s’assurer que le drone peut, en cas d’incident, atterrir sans dommage pour autrui.

Il lui incombe enfin la charge de vérifier l’exemplarité de la structure qui utilise son matériel en sélectionnant ses clients avec soin, et ne pas mettre cette technologie entre les mains de n’importe qui ! En effet, le drone peut comme de nombreux appareils, s’il se retrouve entre de « mauvaises mains », être utilisé à mauvais escient. Les entreprises de drones doivent donc être en capacité de qualifier leur clientèle au maximum, mais également de former les futurs utilisateurs à l’utilisation responsable de ces technologies.

Très récemment, les autorités américaines ont décidé de bannir de leur territoire les drones DJI, de manière très générale au-delà des seules applications dans le secteur de la surveillance et de la sécurité. Le creuset de cette décision, au fond, se trouve dans l’impossibilité de déverrouiller et d’accéder aux codes sources des équipements électroniques et informatiques embarqués, ce qui est du reste une constante dans tous les composants chinois, entraînant inexorablement une légitime suspicion.

Dès lors, quelle est la politique à suivre pour les acteurs du drone, face à cette évolution majeure issue d’un pays qui souvent « donne le ton » en prélude à des décisions internationales ? Il est difficile de répondre de manière catégorique, tant les stratégies peuvent être différentes.

Ainsi, en ne retenant que l’exemple de deux sociétés françaises cotées à la bourse de Paris, dont les informations sont publiques, le positionnement est diamétralement opposé : Delta Drone a fait le pari de systèmes entièrement conçus, fabriqués et assemblés en France (hormis quelques éléments non critiques tels que les moteurs). A l’inverse, Drone Volt indique dans son dernier Document Universel d’Enregistrement que 90% des composants de ses drones proviennent de Chine.
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Par Christian Viguié, Président Directeur Général de Delta Drone