C’est fait… Broadcom a officialisé cette semaine VMware Cloud Foundation (VCF) 9.0, première mouture entièrement conçue en interne depuis l’acquisition de VMware en 2023. Cette version refond l’architecture du portefeuille historique pour livrer une plateforme unifiée de cloud privé couvrant datacentres, edge et environnements opérés par des fournisseurs de services ou des hyperscalers. Bref, concrétise une vision ancienne que Nutanix a su réaliser bien avant Broadcom.
Cela fait désormais des années que les concepts d’infrastructure de virtualisation et d’hyperconvergence cherchent à se moderniser en adoptant une approche très « cloud privé » devenue très logique à l’ère de l’informatique « as a service ». Nutanix a typiquement fait largement évoluer son socle HCI vers une offre cloud privée dénommée « Nutanix Cloud Platform » très intégrée.
L’idée de faire de ses briques d’infrastructure une véritable offre « cloud privé » est née chez VMware en 2018. Mais « VMware Cloud Foundation » ou VCF a toujours été une offre et non un produit, autrement dit un assemblage de produits distincts packagés sous une même enseigne. Et c’est exactement ce que Broadcom voulait absolument changer.
La sortie de VMware Cloud Foundation (VCF) 9.0 matérialise sa stratégie post-acquisition de VMware. Cette mise à jour majeure vise à transformer un portefeuille de produits distincts en une plateforme de cloud privé moderne, unifiée et intégrée. Et comme si l’idée d’une offre « cloud privé » ne se suffisait pas en elle-même, Broadcom insiste pour nous expliquer que VCF 9.0 est aussi une réponse directe à une tendance de fond de l’industrie : la réévaluation des stratégies cloud et le rapatriement de certaines charges de travail depuis le cloud public. Une tendance qui reste encore largement débattue et contestée.
Le socle technique repose désormais sur un plan de contrôle unique qui fait disparaître les silos formés par vSphere, vSAN et NSX en une architecture unifiée. Les administrateurs disposent d’une console consolidée, assistée par l’application Quick Start, qui réduit drastiquement le temps d’installation et centralise l’identité, les journaux et la conformité. Broadcom revendique un gain de productivité pouvant aller jusqu’à « un facteur 10 », chiffre issu de tests internes et qui reste forcément très largement à démontrer.
Et le côté le plus visible de cette intégration est à aller chercher du côté exploitation, avec une gestion en flotte qui permet de planifier et d’orchestrer les mises à jour sur plusieurs clusters depuis un unique tableau de bord.
Et quand Broadcom parle de plan de contrôle unique, ce n’est pas forcément très vrai. En réalité, le produit procure deux expériences différentes. La gestion de la plateforme a en effet été rationalisée via une nouvelle interface unifiée pour les administrateurs, leur offrant une vue holistique des opérations. Mais une seconde interface, dédiée aux développeurs, fait son apparition pour un provisionnement en libre-service. Dit autrement, Broadcom a pris soin d’intégrer VCF 9.0 dans les pratiques DevOps actuelles. D’autant que, parallèlement, l’unification opérée par VCF 9.0 place les machines virtuelles et les conteneurs sur un pied d’égalité avec l’intégration en standard de vSphere Kubernetes (VKS), permettant de gérer tous les types d’applications depuis une seule plateforme.
Un cloud privé qui n’oublie pas l’IA
Dit autrement, VCF 9.0 traite de la même manière machines virtuelles, conteneurs et charges AI grâce à l’intégration native. Les équipes DevOps peuvent donc déployer indifféremment workloads traditionnels et cloud-native sans empiler d’outils tiers, tandis que les opérations conservent un modèle commun de sécurité et de gouvernance.
Au-delà des aspects « héritages VM » et « cloud native », Broadcom veut aussi surfer sur la vague IA. L’éditeur affirme avoir spécifiquement optimisé sa plateforme pour les workloads IA. Broadcom annonce avoir atteint 99 % des performances bare-metal pour l’inférence IA, vMotion prenant désormais en charge la migration des GPU sans interruption.
Le volet financier a été retravaillé afin de répondre aux critiques liées au coût du cloud public. VCF 9.0 intègre des outils d’analyse avancée offrant une visibilité détaillée sur l’utilisation des ressources et le coût total de possession (TCO). La plateforme embarque un moteur d’analytique prédictive capable de modéliser le TCO en intégrant licences, salles blanches et énergie. Des fonctions de showback et de chargeback détaillent la consommation par service, et un module d’optimisation récupère automatiquement la capacité sous-utilisée afin de limiter l’empreinte matérielle.
Une sécurité musclée et uniformisée
La sécurité fait l’objet d’une véritable approche « SecOps » dans VCF 9.0, un effort louable. Un tableau de bord dédié agrège posture, correctifs et contrôles réglementaires. Les politiques sont appliquées de manière cohérente sur de nombreux sites.
Autre innovation originale (qui a plus de sens dans le contexte de fournisseurs de solutions managées), VCF 9.0 étend le « Confidential Computing » au cloud privé. La prise en charge des dernières extensions de confidential computing d’AMD et d’Intel permet de déployer des charges sensibles en mode enclave chiffrée sur une infrastructure hétérogène « on premises ».
Au-delà du cœur de plateforme, Broadcom étoffe son catalogue de services avancés. Private AI Foundation, co-développé avec NVIDIA, introduit un mode air-gap et le GPU-as-a-Service multi-tenant. vDefend gagne la micro-segmentation en libre-service et la gestion IDS/IPS multisite, tandis que Live Recovery étend la résilience cyber avec un environnement de remise en ligne isolé. Data Services Manager automatise la mise à disposition de PostgreSQL, MySQL (et bientôt SQL Server) en DBaaS, et Avi Load Balancer s’ouvre au provisioning self-service et aux déploiements VPC-aware.
Adoptez VCF 9.0… ou allez voir ailleurs
Côté écosystème, les OEM se rangent derrière la nouvelle version : Dell, HPE, Lenovo ou encore les plateformes Azure et Google Cloud et même AMD et Intel via les processeurs EPYC SEV-SNP ou Xeon TDX annoncent des offres co-ingénierisées à court terme.
De son côté, Broadcom affirme que 87 % de ses 10 000 plus grands clients ont déjà souscrit à l’abonnement VCF, même si certains analystes, comme Michael Warrilow de Gartner, notent que de nombreuses entreprises ont souscrit pour se donner le temps d’évaluer leurs options. Car cette sortie intervient dans un contexte de marché tendu, marqué par la controverse sur la nouvelle politique de licences par abonnement de Broadcom. La fin du support pour VCF 8, prévue pour octobre 2027, apparaît comme une échéance décisive qui forcera les organisations à trancher entre l’adhésion à la vision intégrée de Broadcom ou une migration vers des solutions concurrentes.
« Avec cette génération, nous simplifions radicalement l’expérience cloud privée », résume Krish Prasad, vice-président et directeur général de la division VCF chez Broadcom. Dans un contexte où la maîtrise des coûts, la souveraineté des données et l’industrialisation des environnements IA sont redevenues prioritaires, la proposition de Broadcom a bien évidemment du sens. Et pas uniquement pour Broadcom. Les DSI décidés à évoluer en cloud privé avec VMware y trouveront un cadre solide pour moderniser leur infrastructure tout en gardant la main sur la sécurité et la gouvernance.