Le Code de pratique GPAI européen vise à préparer les acteurs de l’IA à usage général à la future application de l’AI Act, en imposant transparence, respect du droit d’auteur et sûreté des modèles à risque. La signature de Google, aux côtés d’OpenAI et Anthropic, marque une étape dans la pré-conformité tout en illustrant les tensions réglementaires et économiques. L’Europe doit publier demain la liste officielle des signataires de son pacte volontaire sur l’IA.
Outil transitoire et préparatoire en attendant la pleine application de l’AI Act en 2026, le « Code de pratique pour l’IA à usage général » de l’Union européenne, aussi appelé « Pacte volontaire sur l’IA » ou « Code de pratique GPAI », veut encourager les entreprises technologiques à adopter des pratiques responsables dès aujourd’hui sans attendre la future législation. Il représente l’instrument d’une mise en œuvre volontaire et anticipée de l’AI Act européen. Élaboré par des experts indépendants dans un processus multipartite et publié le 10 juillet 2025, ce code permet aux fournisseurs de modèles d’IA de démontrer leur conformité actuelle aux futures obligations légales en matière de sécurité, transparence et droits d’auteur.
Structuré en trois chapitres distincts, ce code de pratique couvre la transparence (avec un formulaire standardisé de documentation des modèles), les droits d’auteur (définissant des solutions pratiques pour respecter la législation européenne et ne pas utiliser d’œuvres piratées) et la sûreté/sécurité (applicable uniquement aux modèles présentant des risques systémiques). Sur le papier, les entreprises qui y adhèrent volontairement bénéficient d’une réduction de leur charge administrative et d’une plus grande certitude juridique par rapport aux autres méthodes de mise en conformité.
Rejoignant OpenAI et Anthropic, qui ont déjà annoncé leur volonté de signer le pacte européen, Google est le premier GAFAM à officiellement annoncer signer ce pacte (même s’il semble assez couru d’avance que Microsoft en fasse de même après les déclarations de son président Brad Smith).
Cette décision intervient alors qu’à l’inverse Meta a officiellement refusé de s’y soumettre, qualifiant la mise en œuvre de la législation IA européenne de « dépassement de mesure ».
À ce jour, ni Apple, ni Amazon Web Services, ni IBM n’ont annoncé publiquement leur intention de signer le Code. Leur position officielle reste donc à confirmer.
Google dit « Oui, mais… »
L’Union européenne s’est donnée jusqu’au 1er août pour publier la liste officielle des signataires de ce pacte IA européen. Mais rien n’interdit aux entreprises de se déclarer ultérieurement.
Google montre donc ici très ouvertement l’exemple tout en y mettant quelques bémols. Kent Walker, président des affaires mondiales de Google, a justifié cette signature par la volonté de promouvoir « l’accès des citoyens et entreprises européens à des outils d’IA sécurisés et de premier ordre ». Mais il a néanmoins parallèlement émis de fortes réserves. « Nous restons préoccupés par le fait que l’AI Act et le Code risquent de ralentir le développement et le déploiement de l’IA en Europe », explique-t-il.
Google identifie ainsi trois menaces principales : les écarts par rapport au droit d’auteur européen, les processus d’approbation trop lents et les exigences qui « exposent les secrets commerciaux », ce dernier point constituant une préoccupation majeure pour tous les développeurs d’IA qui considèrent leur architecture de modèle et leurs données d’entraînement comme propriétaires.
L’enjeu économique sous-tend cette tension réglementaire. Google met en avant le potentiel de croissance de 8% (1,4 trillion d’euros) par an d’ici 2034 pour l’économie européenne grâce à l’IA. L’entreprise s’engage à travailler avec l’AI Office européen pour garantir un code « proportionné et réactif à l’évolution rapide et dynamique de l’IA », tout en promettant d’être « une voix active pour soutenir une approche pro-innovation ».
Dit autrement, la décision de Google n’est pas une réelle adhésion et bien plus une stratégie calculée. La firme accepte le cadre réglementaire européen tout en cherchant activement à influencer son interprétation et son application, notamment en demandant à l’Europe de se montrer bien plus précise et claire sur sa perception des termes « pro-innovation », « proportionné » et « réactif »…
Cette signature intervient alors que les règles pour les fournisseurs de « modèles d’IA à usage général présentant un risque systémique » entreront en vigueur le 2 août, affectant potentiellement Anthropic, Google, Meta et OpenAI. Ces entreprises disposeront de deux ans pour se conformer pleinement à l’AI Act.