La volonté permanente des entreprises de réduire leurs coûts, d’améliorer la qualité de service et leur efficacité nécessite d’optimiser la performance opérationnelle et économique de leurs modèles de fourniture de services, voire d’en redéfinir la pertinence.
Dans le cadre des projets d’externalisation, cette tendance se traduit par une véritable mutation dans les relations établies avec les fournisseurs métiers ou IT. Celles-ci doivent à présent intégrer les pratiques liées au cloud, la généralisation des principes d’agilité et le développement de nouveaux services (DevOps).
Les trois grandes transformations qui conduisent les entreprises à externaliser

Quels types de mutations influent sur les choix des organisations en matière d’infogérance ? Quelles réponses l’externalisation est-elle capable d’apporter à chaque catégorie de transformation et quelles en sont les limites ? Il existe globalement trois grands cas de figure :

1. L’entreprise opère une réorientation stratégique forte

Fusion, cession, acquisition, déploiement d’une nouvelle stratégie… sont autant de facteurs de réorganisations structurantes dans la vie d’une entreprise. De fait, elles engendrent de nombreuses problématiques d’ordres différents : reconstruire, désimbriquer, développer de nouveaux SI, unifier les processus ou encore rationaliser les contrats existants et adapter les organisations et les compétences. A chacun de ces challenges, l’externalisation peut apporter une réponse pertinente. A titre d’exemple, elle permet à l’entreprise de bénéficier de l’état de l’art sur les processus et les outils et de disposer de compétences spécifiques ou rares.  Elle offre également un engagement portant à la fois sur le chantier de transformation et sur le « run » associé et permet d’adapter les capacités pour accélérer le projet.
Mais dans le cadre d’une réorganisation stratégique quelle qu’elle soit, plusieurs points de vigilance sont à prendre en compte. Les limites de l’externalisation, dans ces contextes-là, concernent d’une part la maitrise des choix pouvant être structurants pour l’entreprise, dans l’immédiat, ou à moyen/long terme. La question de la maturité de l’organisation vis-à-vis des modèles de Sourcing retenus est d’autre part essentielle, que l’on parle de culture, de processus ou encore de pilotage. Par ailleurs, en cas de multi-acteurs, il est souvent complexe de trouver le bon compromis entre les objectifs du build et les contraintes du run.

2. L’entreprise vise une amélioration qualitative de son service

L’agilité demeure au cœur des préoccupations des organisations aujourd’hui, avec une volonté continue d’offrir un service plus fluide, plus réactif et plus fiable. Grands groupes ou PME, beaucoup veulent concentrer les efforts sur le développement de leur activité avec un engagement plus fort vis-à-vis des métiers et un meilleur déploiement des ressources. Dans cette optique, ils sont en perpétuelle quête d’innovation et de ruptures technologiques (IoT, DevOps, Cloud,…).
Pour optimiser la qualité de son service, faire appel à l’externalisation de tout ou partie de certains processus, regorge d’avantages qui ne sont plus à prouver : adapter les capacités avec flexibilité (pics d’activité,…), automatiser les processus existants, développer une culture de service et d’innovation ou encore bénéficier des bonnes pratiques du marché sur les nouvelles technologies.
Pour autant, certains facteurs peuvent freiner la réussite de ce type de projets. Outre sa maturité par rapport au modèle de sourcing choisi, il y a aussi le risque d’une moindre compréhension des attentes métiers, sa gestion des compétences et connaissances externalisées, mais aussi sa capacité à inciter le prestataire à proposer les innovations.

3. L’entreprise se focalise sur la maitrise des coûts et l’augmentation des marges

Véritable nerf de la guerre, la réduction des coûts est souvent, à raison ou à tort, la première raison qui pousse les entreprises à externaliser, qu’il s’agisse par exemple de mieux affecter sa capacité d’investissement ou de réduire l’engagement financier.

Et sur l’aspect financier, force est de constater que les bénéfices engendrés par la voie d’une externalisation réussie sont alléchants : innovation et ruptures technologiques, investissement et mutualisation des fournisseurs, gains de productivité par l’amélioration continue…
Néanmoins, l’entreprise, en s’en remettant à un prestataire expert en sourcing et performance économique, doit redoubler de vigilance quant aux changements induits par sa transformation, notamment en termes de process et de culture. Une attention toute particulière doit être également portée sur les « coûts cachés » (prérequis liés au modèle, pilotage, limites de fourniture,…) et la baisse des coûts  sur la durée du contrat et non uniquement à sa signature.

Les clés de succès pour une externalisation réussie

Quels leviers d’actions les entreprises sont-elles en mesure d’activer pour faire reculer les limites de l’externalisation ? On peut identifier trois grands axes d’amélioration qu’il estime primordiaux pour optimiser sa stratégie de sourcing.

1. La maturité du client vis-à-vis du modèle de sourcing retenu

Sujet sensible et transverse quelle que soit la transformation ciblée par l’entreprise (réduction des coûts, amélioration de la qualité de service,…), il est essentiel de l’aborder par paliers.
Il doit s’agir en premier lieu d’effectuer un diagnostic de maturité reposant sur le référentiel eSCM qui regroupe les bonnes pratiques en matière de Sourcing. Effectué en une dizaine de jours, ce diagnostic dresse le bilan des forces et des faiblesses de l’entreprise au regard du modèle d’externalisation choisi.  S’en suit la réalisation de scénarios de Sourcing, c’est-à-dire, d’une stratégie pertinente et jugée adaptée aux objectifs du projet d’externalisation. Cette démarche dure généralement entre 5 et 7 semaines. Une fois finalisée, les pré-requis opérationnels doivent être listés et un plan de convergence établi pour assurer à l’entreprise une mise en œuvre « rodée » du scénario retenu. Les pré-requis opérationnels, peuvent, selon les cas, être mis en œuvre, soit pas le client lui-même, soit par son futur prestataire.
La maturité de l’entreprise par rapport au modèle d’externalisation est un facteur de réussite qui doit se dessiner dès les phases amont du cycle du projet et se gérer en aval de la signature du contrat.

2. L’incitation du prestataire à innover et à proposer des améliorations

Cet axe constitue une difficulté typique qui intervient dans la plupart des projets d’externalisation. Pour la contrer, le cabinet émet plusieurs pistes. Tout d’abord, ne pas hésiter à challenger son prestataire notamment par le biais de remises en concurrence (même partielles) ou en raccourcissant la durée des contrats. Ensuite, il est contractuellement possible d’instaurer un gain financier annuel et de définir un certain nombre de SLA en amélioration continue pour obtenir des indicateurs qui évoluent dans le temps. Budgétairement, il est également important qu’une enveloppe définie – et stipulée dans le contrat – soit allouée à l’innovation.
Autre point crucial : l’innovation n’est pas l’affaire du seul DSI et de son prestataire. Au contraire, elle est une question de collaboration à tous les niveaux, et tout au long du cycle du projet, où les métiers doivent être fortement impliqués.

3. La maturité du Capacity Planning

Parce qu’externaliser c’est aussi prévoir, il est primordial pour l’entreprise de fournir au prestataire une visibilité sur son activité afin d’accroitre sa capacité de réactivité et in fine, gagner en agilité. Pour y parvenir, la proximité métier est essentielle : les métiers doivent sponsoriser la démarche de capacity planning, fournir des informations fiables sur leurs futurs besoins et poursuivre cet accompagnement en phase projet et au démarrage. De plus, de nombreux processus peuvent évoluer dans le cadre de la mise en place du capacity planning (processus d’engagement, de planification, de suivi du budgété et du réalisé,…). Ceux-ci doivent être définis avec le prestataire. Il faut ensuite configurer et paramétrer un certain nombre d’outillages afin de disposer d’informations exploitables en termes opérationnel et budgétaire. Enfin, il est crucial de déployer des instances de pilotage à plusieurs niveaux : des roadmap projets trimestriels pour réactualiser la vision des besoins et des points mensuels de visibilité opérationnelle selon le type de service.

Mis en place en amont du projet d’externalisation, la maturité du capacity planning constitue un sujet fondamental qui inscrit l’entreprise dans une logique de prévision pour gagner en souplesse tant sur son dispositif opérationnel qu’au niveau des coûts.

 

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Cet article a été rédigé par Jean-Michel Goubert, Directeur Associé chez Rhapsodies Conseil, en charge de l’expertise Sourcing & Performance Economique et Pierre Moulin, Senior Manager chez Rhapsodies Conseil.