Nombreuses sont les entreprises qui ont d’ores et déjà compris les enjeux du big data pour améliorer leurs prises de décisions. Avec son jargon qui fait peur (Hadoop-hein ? Péta-quoi ?), cette technologie nouvelle se perfectionne et se démocratise de jour en jour. Et si le vrai défi du big data n’était finalement ni stratégique, ni technologique, mais dépendait des compétences requises pour faire correctement « tourner la machine » ?

Les stratégies entourant le big data ne sont pas nouvelles. De tous temps, les entreprises ont collecté, recoupé et analysé les données à leur disposition pour améliorer tel ou tel aspect de leur activité : mieux définir leur cœur de cible, mieux comprendre leurs clients, mieux produire, mieux tout. Seulement, là où elles exploitaient hier des informations internes, ou au plus loin en provenance de leurs outils de CRM, elles disposent aujourd’hui grâce à internet et aux médias sociaux de myriades de données externes en ligne.

Et bien soit, analysons-les, elles aussi. Plus de données, ce ne peut être que mieux ! En fait, ce n’est pas si simple. Car, accolés au big data, se trouvent trois V auxquels les technologies actuellement présentes dans la plupart des entreprises ne sont pas en mesure de répondre. Au-delà des simples capacités de stockage, elles n’ont pas la puissance nécessaire pour traiter le Volume de données générées, ni de quoi gérer leur Variété (données structurées ou non, types de formats – vidéo, audio, texte, etc.) ; dans ce contexte, inutile de préciser que ces outils ne sont pas non plus capables d’en suivre la Vélocité, soit leur fréquence élevée de création. Alors que ces données, pour être pertinentes, devraient être exploitées en temps réel.

Pourtant, si l’offre de solutions big data est encore jeune et disparate, elle existe, et nul doute qu’elle finira par se structurer. Et par faciliter la mise en œuvre d’infrastructures ad hoc pour des entreprises de toutes tailles, désireuses d’entrer dans l’ère du big data. Finalement, ce n’est ni dans la volonté, ni dans la technologie que réside la difficulté.

Le vrai challenge du big data est humain. Car les compétences associées sont spécifiques. Les collaborateurs hissés au rang de petits génies de la donnée, plus simplement appelés data Scientists, devront en effet présenter certaines dispositions techniques : maîtriser MapReduce, un nouveau modèle de traitement en parallèle des données, qui permet d’analyser plus d’informations, plus vite ; savoir déployer et gérer une plateforme de type Hadoop, pour implémenter ce modèle ; utiliser des bases de données orientées colonnes ou documents, pour pouvoir modéliser des données non structurées.

D’autres compétences prédictives sont nécessaires. Le big data n’est pas magie blanche, les analyses reposent principalement sur l’expérience et l’intuition. Ce sera le rôle des data Analysts de savoir où et quoi chercher pour mettre en lumière des tendances, détecter des corrélations, et les transformer en aide à la prise de décisions. Leurs compétences devront aussi être transversales, les données et leur analyse concernant tous les services de l’entreprise et tous ses métiers.

De nombreuses formations au big data ont vu le jour en France. Pourtant, à l’instar de ce qui se passe aux Etats-Unis, la pénurie de compétences en la matière est proche, notamment sur les profils les plus expérimentés. Dès lors, les entreprises ont tout intérêt à approcher des talents qui n’avaient jusqu’à maintenant pas profité de la « bulle digitale » et qui ont pourtant d’ores et déjà développé la plupart des compétences attendues : les analystes de panélistes comme IPSOS ou Nielsen, ou ceux d’institutions de type INSEE.

Alimenté par la transformation digitale, il y a fort à parier qu’un grand vent de renouveau va souffler sur leurs activités, faisant radicalement évoluer leur métier. Avec de belles opportunités de carrière en perspective pour les plus motivés d’entre eux, ceux qui seront prêts à faire le bilan lucide de leurs acquis, à se former en conséquence – notamment aux outils du big data, à s’adapter et à se réinventer.

 

===============
Emmanuel Stanislas est fondateur de Clémentine