Toutes les compétences « vieillissent » ; il en va de même des méthodes en usage et du style de management : on ne travaille plus aujourd’hui comme on le faisait ne serait-ce qu’il y a dix ans. Quand l’accélération des transformations reste intense, que faire pour rester « dans le coup », c’est à dire en phase avec l’activité de l’entreprise et ses mutations ?

Les compétences les plus recherchées aujourd’hui finiront, elles-aussi, par vieillir et/ou devenir simplement inadaptées aux nouvelles exigences professionnelles. L’accélération de la transformation des organisations (nouvelle donne concurrentielle, évolutions de l’activité, des méthodes et outils) le prouve : savoir se préparer à prendre des virages importants s’avère essentiel. En effet, si en 2017, le délai pour trouver un emploi n’a jamais été aussi court pour les jeunes diplômés (8 semaines[1]), pour des professionnels expérimentés, la perspective peut s’avérer moins souriante. Aussi aura-t-on tout à gagner en cultivant une employabilité maximale pour « s’accorder » au devenir de son activité. Quels réflexes acquérir et dans quels pièges ne pas tomber ?

Ne pas attendre pour observer et apprendre 
S’il est vrai qu’on ne devient pas « has been » en un jour, se transformer soi est aussi une question de durée. Cela implique donc de se questionner régulièrement sur le devenir de son activité ; de se demander ce qui a changé (et continue à changer) dans le marché, chez les clients, chez les concurrents, à l’intérieur de l’organisation même, etc. Il ne faut pas attendre que les années passent pour adopter les bons réflexes de « veille ». Les abonnements aux newsletters, la visite des salons, les participations aux workshops et conférences, ne sont pas encore pleinement identifiés comme faisant partie d’une « routine » professionnelle, et c’est regrettable. L’erreur la plus fréquente aujourd’hui est sans doute de s’imaginer que ce travail de questionnement serait uniquement l’affaire de l’employeur et de la RH, (ou plus généralement de la société), bref, l’affaire… de quelqu’un d’autre !

Des moyens de plus en plus accessibles 
De fait, on se trouvera difficilement des excuses à ne pas s’informer : s’il était encore difficile dans le passé d’accéder à certaines informations (distance, complexité, périodicité), jamais elles n’auront été aussi disponibles. Un keynote à San Francisco vous intéresse : il sera retransmis en ligne et vous pourrez y assister ; plus besoin d’être à Paris pour découvrir l’essentiel des nouveautés : conférences, tables rondes, rencontres, etc. Beaucoup sont (la plupart du temps) accessibles en ligne (en live et en replay), voire gratuitement ; Mooc, webinars, chaînes Youtube, etc., il est possible d’obtenir l’avis de professionnels venant du monde entier, de suivre les tendances, de prendre l’air du temps. C’est encore sans compter sur les réseaux sociaux, qui fournissent aussi quantité de feed-back, réflexions, remarques et avis, diffusés par des pairs.

L’employabilité : des enjeux d’échange et de partage 
Porter un regard sur son activité, c’est aussi porter un regard sur soi : demander régulièrement des feedbacks internes, de la part des managers, des collègues, comme des partenaires n’est pas un luxe inutile. Faire le point, se mesurer aux attentes du marché, effectuer un bilan de compétences, et pourquoi pas, des échanges avec les recruteurs du secteur où l’on évolue ? Suis-je capable de faire telle chose ? Ai-je envie de le faire ? Quel plaisir puis-je y trouver et pourquoi ? S’assurer de son employabilité, c’est aussi, d’une certaine façon tester sa capacité de séduction. Cette autre façon de prendre soin de soi ne doit pas être un impératif contraignant, mais l’occasion de gagner, à terme, en bien-être au travail. C’est ainsi que de nombreux professionnels, tous secteurs confondus, n’hésitent plus aujourd’hui à demander, (voire à s’offrir) des formations à la prise de parole en public, à la communication non violente, etc. Leur objectif : ne pas perdre de vue l’évolution des modes d’échange professionnel (plus de communications skype, de vidéo-conférences, de prises de parole, etc.), et des nouvelles méthodes de travail et de management.

Une démarche permanente à intégrer à l’activité ? 
On ne le dira jamais assez, l’employabilité, ce sont avant tout des réflexes et des habitudes prises, bien plus que des efforts ponctuels ou des « remises à jour » radicales. C’est précisément là que se situe le piège car nous sommes plus coutumiers de l’opération exceptionnelle que de la démarche permanente ! Or, on ne se transforme pas en un jour, mais dans la continuité.
L’employabilité n’est donc pas uniquement une affaire de dispositifs légaux, d’accompagnement dans la recherche d’emploi ou de responsabilité de l’employeur, c’est aussi l’affaire de chacun. Cependant, face au « tout accessible », se pose encore la question du temps consacré à se tenir informé des dernières évolutions. Jusqu’à quel point est-ce aujourd’hui possible ? 71% des professionnels se plaignent de manquer de temps[2]. On peut se demander si un véritable temps de « veille » au travail, ne mériterait pas d’être négocié avec l’employeur et ce, en complément (voire en lieu et place) des plans de formation occasionnels.

[1] Baromètre Deloitte 2017 – Enquête OpinionWay pour Deloitte, janvier 2017
[2] 9ème Baromètre OPE – 2017 (salariés).

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Emmanuel Stanislas est Fondateur de Clémentine, Cabinet de recrutement digital & IT