Tandis que les nouvelles technologies créent de nouveaux besoins, le vivier d’experts en informatique s’avère de moins en moins abondant et les talents disponibles se font de plus en plus rares.

Selon l’étude Gartner Talent Management for Tech CEOs Survey, publiée en décembre 2019  « les PDG du secteur high-tech considèrent que le recrutement et la fidélisation des talents représentent l’une de leurs trois principales priorités pour l’année à venir ».
Par ailleurs, Gartner indique que « chaque année, le coût de support des logiciels en place augmente, contrairement aux avantages que l’entreprise peut en tirer. Résultat, un nombre croissant d’entreprises recherchent des options tiers moins onéreuses » .

Quelles conséquences pour les entreprises ?

Dans la plupart des cas, les entreprises cherchent à renforcer leurs effectifs pour pallier le manque de talents informatiques à court terme. Mais, cette démarche a un coût, et c’est souvent au moment où les nouveaux collègues commencent à être les plus performants ê dans une activité qu’ils sont recrutés ailleurs. Lorsque l’expertise IT va de pair avec la maîtrise des fonctions métier, les DSI sont confrontés à une tâche pour le moins complexe.

De plus, les stratégies traditionnelles d’externalisation (« offshore » ou « nearshore »), les services partagés et les centres captifs pour services métier et IT ne sont généralement pas suffisants face à une telle pénurie. Cette situation exerce une pression sur les modèles d’exploitation des technologies de l’information déployés aux quatre coins du monde, et dégage deux grandes tendances en découlent :

  • les experts en ERP originaux disparaissent rapidement ;
  • les nouveaux environnements en cloud et SaaS requièrent de nouveaux talents et de nouvelles compétences.

 

Quel impact pour l’entreprise sur sa capacité à déployer de nouveaux services informatiques critiques ?

Pat Phelan, Vice-présidente, Études de marché, Rimini Street

Le réservoir de talents aptes à comprendre les besoins d’une entreprise va inéluctablement diminuer au fil des années à venir, avec les conséquences suivantes : des systèmes instables, davantage de remontées (escalations), moins de contrôle, étapes manquées et friction croissante avec les fonctions métier.

Dans son étude 2019 Strategic Roadmap for Postmodern ERP, Gartner souligne le problème aigu que ressentent de nombreux DSI : « la pénurie d’experts en progiciels de gestion intégrés pose déjà des problèmes, et elle constituera un obstacle majeur à la réussite des entreprises au cours des trois à cinq prochaines années ».

Confrontées à une hausse de leurs coûts d’exploitation et de problèmes de productivité, de nombreuses entreprises se tournent vers l’automatisation ou le « swarming » pour combler la pénurie de compétences. D’autres s’efforcent de calquer les talents ou les compétences nécessaires selon la méthodologie ITIL 4 et envisagent de recourir à la fois au swarming et au left-shifting. Cependant, toutes demeurent confrontées à une forte pénurie de talents et de compétences en ERP qui retarde leurs projets informatiques et provoque des incidents qu’elles semblent incapables de résoudre.

 

Les prestataires de services de gestion des applications (ASM) tirent leur épingle du jeu

Pourquoi ? Tout simplement parce que leurs modèles métier ne sont pas adaptés et qu’ils appliquent le principe visant à s’implanter dans les entreprises pour y croître (land and expand) sur la base du temps-hommes. Le secteur des services de gestion des applications (AMS — Application Management Services) fonctionne selon cette méthode depuis des années, tout en reconnaissant que ces services tirés par la valeur ont été insaisissables et problématiques, si l’on en croit les observations historiques de Deloitte :

  • « Le volume et l’arbitrage des coûts de main d’œuvre ont autorisé un certain allègement des frais initiaux, mais en exerçant une pression supplémentaire sur la qualité, le risque, l’agilité et la gestion interneLa séparation entre la maintenance et l’apport continu de valeur a favorisé l’ingénierie hâtive, la rapidité l’emportant sur la réflexion. Les tentatives visant à enrichir les ressources disponibles en recrutant des talents qualifiés ont provoqué une hausse des coûts prohibitive, en particulier pour les architectes, les chefs de projet et les analystes de haut niveau.
  • Le coût, la capacité et l’exécution des contrats par rapport à des accords de niveau de service (SLA) tactiques ont été les moteurs des projets, et non pas les résultats ou la valeur. 
  • Les contrats étant structurés autour de l’amélioration des processus métier, le succès a rarement été au rendez-vous. Tout ce qui comptait, c’était le nombre de personnes impliquées ».

 

Quelles sont les options pour lutter contre la pénurie de talents ?

Anne Plese, directrice du marketing produit mondial, Rimini Street

De nombreux responsables informatiques continuent de faire confiance aux programmes traditionnels d’externalisation vers des structures à faible coût, de renforcement du personnel et d’apprentissage, ainsi que de planification de scénarios afin de déterminer quelles compétences et quels talents seront nécessaires. Gartner présente les approches clés dans ses livres blancs intitulés How to Develop an IT Strategic Workforce Plan et Getting started on Your Apprenticeship Program. Ces études couvrent l’utilisation de méthodologies avancées telles que la planification de scénarios, pour examiner les compétences et les talents qui s’adapteront aux besoins de l’entreprise, ainsi que les programmes pour transformer votre main-d’œuvre.

Au-delà de l’automatisation et du swarming, nos clients optent de façon croissante pour des approches créatives, telles que le micro-entrepreneuriat. Les différences relatives aux coûts de main-d’œuvre entre les pays créent un réservoir stratégique de talents invisibles qui existent au-delà des frontières. Dans son étude intitulée Maverik Research: CIOs Must Tap Into the Invisible Talent Pool, Gartner reconnait que les DSI doivent apprendre à exploiter ce vivier qui représente une ressource majeure à l’ère de la transformation numérique. Mais cela sera-t-il suffisant ?

Il est possible que les compétences ne soient pas disponibles. Si l’adéquation entre les compétences et leur disponibilité n’est pas garantie, les talents existent déjà dans des modèles de support logiciels tiers et indépendants, lesquels commencent à s’étendre aux services de gestion des applications (AMS).

 

Les grands comptes conservent leur avance grâce à une approche intégrée du support et des services AMS

Les grandes entreprises anticipent déjà les pénuries de personnel compétent. En atteste la société BrandSafway, l’un des principaux fournisseurs mondiaux de solutions d’accès, de services spécialisés, de coffrage et d’étaiement pour les métiers de l’énergie, de l’industrie et de la construction. Elle bénéficie d’une valeur accrue grâce à l’incorporation de services indépendants de support tiers et de gestion des applications (AMS) dans un modèle de prestation de services IT adapté à son application Salesforce. « Nous croulions sous le poids d’une montagne de tâches, qui nécessitaient énormément de temps, et nous envisagions de recruter du personnel supplémentaire pour nous aider à gérer la charge de travail », explique Jay Fisher, directeur informatique de BrandSafway. « Nous savions également que nous n’exploitions pas le plein potentiel de notre système Salesforce, en raison de cette accumulation de tâches. »

Autre exemple, la société brésilienne Promon Engenharia, fournisseur de solutions d’infrastructure pour les marchés de l’électricité et de la bioénergie, de l’exploitation minière et de la métallurgie, du pétrole et du gaz, des engrais, des produits chimiques et de la pétrochimie, a choisi d’associer les services de gestion des applications et de support tiers pour rationaliser ses activités informatiques dans SAP.

« Nous pensons que les technologies de l’information sont essentielles pour atteindre nos objectifs métier, créer un avantage concurrentiel et accompagner notre croissance. Dans ce contexte, le progiciel de gestion intégré SAP occupe une place centrale dans notre stratégie. Nous comptons sur lui pour fonctionner en permanence avec une fluidité optimale », a déclaré Marco A. Lamim, DSI de Promon Engenharia.

Un vivier de talents équilibré nécessite d’une part le recours à des experts qui comprennent les besoins de l’entreprise et, d’autre part, une combinaison optimale de compétences dans les logiciels hérités et le cloud. À cet égard, il est recommandé d’établir une feuille de route « business driven » pour guider l’élaboration d’une feuille de route dédiée aux compétences informatiques capable de répondre aux besoins technologiques à court et long termes.
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Par Pat Phelan, Vice-présidente, Études de marché, et Anne Plese, directrice du marketing produit mondial, Rimini Street