Aujourd’hui, l’école de Jules Ferry n’a plus le même visage. De la Troisième République au XXIème siècle, les tableaux noirs à craies blanches sont devenus plus interactifs. Les ardoises plus tactiles. Le papier pactise avec l’écran.
Et les paradigmes temporels se sont aussi inversés. Le temps matinal de la classe et le temps des devoirs du soir s’entrecroisent sans toutefois s’entrechoquer.
Il faut dire que depuis une petite décennie, le numérique a bouleversé l’enseignement et la pédagogie traditionnelle des professeurs. Tant et si bien que des critiques parfois virulentes ont pu être émises à son égard. Véritable boîte à outils, le numérique ouvre pourtant aux enseignants de nouveaux horizons en personnalisant les contenus et en impliquant les élèves à tous les niveaux scolaires. Du primaire au supérieur, en passant par le secondaire, le digital est devenu la boîte à outils d’un enseignement sur mesure, qui communique mieux et qui permet de plus impliquer les élèves quel que soit leur niveau.
L’outil personnalisé des intelligences multiples
« Les élèves apprennent tous de manière différente. » Cette maxime pourrait être celle du professeur Howard Gardner, professeur en cognition et éducation, à la Harvard Graduate School of Education. Howard Gardner est le théoricien des « intelligences multiples ». En 1983, ses recherches démontrent qu’il n’existerait pas un mais plusieurs types d’intelligences. Principalement huit parmi lesquels l’intelligence spatiale, linguistique, musicale et bien d’autres.
Pourtant, ces deux dernières décennies, on a pu constater que le système scolaire du primaire à l’université a été pensé sur un modèle collectif qui ne répondait pas au besoin hétérogène de tous les élèves. Or l’émergence des outils numériques et plus significativement des environnements numériques de travail (ENT) ont été l’occasion de repenser les pédagogies anciennes. En 2019, l’heure est à la personnalisation des contenus. L’enjeu pour le professeur consiste à adapter sa propre pédagogie avec les outils numériques et à varier ses styles d’apprentissage pour s’adresser à l’intelligence – forcément diverse – de tous ses élèves. Par exemple, proposer la création d’un podcast a des élèves qui ont une intelligence musicale ou favoriser l’usage de la vidéo pour les élèves à l’intelligence corporelle kinesthésique.
Un canal de communication
Par ailleurs, le numérique permet d’instaurer une meilleure communication entre tous les acteurs du système scolaire. Si les portails ENT ont facilité la communication au premier degré d’un professeur à son élève, ils ont également contribué à casser les silos entre les organes administratifs et les instances professorales (échanges de notations, compte-rendu de réunion). Dans les universités par exemple, on constate que par le biais de ces portails, les enseignants communiquaient mieux avec la direction et les autorités de tutelle.
Au delà, les outils de chat, et les plateformes d’échange fluidifient la communication entre les élèves eux-mêmes et facilitent l’organisation des travaux d’étudiants en petit groupe. Entre tous les utilisateurs, le numérique – en plus d’être l’outil d’une vraie personnalisation – est aussi celui d’une autre communication.
Un facteur d’implication
La transformation digitale a également bousculé les schémas traditionnels de l’enseignement en favorisant l’essor de la pédagogie inversée. Plus sollicité et donc plus impliqué, l’élève a l’opportunité de découvrir, à la maison et à son rythme, les contenus qu’hier, il aurait vus en classe. Inversement, le temps de la classe est dévolu à la restitution et à l’application par les élèves de leur compréhension du contenu, permettant à l’enseignant de se focaliser ainsi sur les élèves en difficulté. On passe ainsi d’un modèle centré sur le professeur, à un modèle centré sur l’élève, permettant de mieux répondre aux besoins individuels de chacun.
L’exemple le plus significatif du succès de cette pédagogie a été le cas d’école du Lycée Plaine de Neauphle à Trappes. Il y a quelques années, ses résultats au baccalauréat – de l’ordre de 63% – ont poussé le lycée à prendre en considération les évolutions numériques et à changer sa façon de fonctionner. L’adoption d’un enseignement mixte, à cheval entre contenu en ligne et contenu en classe, a fait grimper les résultats au bac de plus de 20 % en l’espace d’une année. La recette a fait ses preuves en remotivant des élèves en situation d’échec scolaire.
Sur les bancs de l’école, le numérique a pris désormais place. Ses outils ont permis une plus grande personnalisation des contenus. Il s’est inscrit comme un meilleur canal de communication entre toutes les instances d’enseignement. Il a favorisé l’essor de pédagogies modernes et redistribué, d’une manière moins attendue, les cartes de l’égalité des chances entre les élèves de différents niveaux.
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Alain Ecuvillon est Directeur Général d’itslearning France