On pourrait penser que dans le contexte économique actuel, de plus en plus centré sur le client, les entreprises feraient tout, pour ne pas laisser passer les réclamations de leurs clients. Pourtant, une étude d’Iron Mountain (1) révèle que plus de la moitié (55 %) des sociétés en Europe ignorent tout bonnement les correspondances papier de leurs clients. Elles attendent que le client agacé finisse par se manifester par téléphone ou par e-mail avant de s’inquiéter des raisons de son mécontentement.

Ce constat lève le voile sur une situation inquiétante, à savoir que les entreprises qui ont adopté une gestion automatisée de leur service client ne savent plus gérer les documents papier. Or 59 % des sociétés confirment qu’elles continuent de recevoir la plupart des informations de leurs clients par courrier ou tout du moins sur papier. Un client sur sept (13 %) préfère le courrier pour contacter le service client, et ce taux monte à près d’un quart (23 %) pour des clients qui sont des managers. Les clients qui adressent des courriers de réclamations doivent donc savoir que leur lettre a de grandes chances de s’égarer si l’organisation n’a pas de processus en place pour gérer la correspondance.

D’ailleurs, un tiers des sociétés interrogées nous ont confirmé qu’elles ont souvent affaire à des clients mécontents dont la correspondance a été égarée.

Dans notre monde multi-canal et connecté, les clients attendent de plus en plus des entreprises qu’elles puissent avoir instantanément accès à un dossier qui retrace tout l’historique de leur relation avec elles. Or un tiers seulement de celles que nous avons consultées (35 %) disent avoir des processus opérationnels pour ce faire. Conclusion, les consommateurs doivent souvent répéter la même réclamation à des interlocuteurs différents. C’est d’ailleurs ce dont 77 % des consommateurs se plaignent le plus quand ils ont affaire à un service client.

L’actuel modèle centré sur les consommateurs impose aux entreprises qui veulent survivre, de se doter d’un système de gestion de la relation client capable d’intégrer en toute transparence toute information obtenue par téléphone fixe ou mobile, par e-mail, sur les réseaux sociaux, etc. Sans laisser de côté les documents papier.

Les clients n’hésitent pas à montrer leur mécontentement. Notre étude révèle que 43 % des consommateurs considèrent comme rédhibitoire l’obligation de devoir s’enquérir par téléphone de la suite qui est donnée à leur demande écrite. Pour le groupe spécialiste de la satisfaction client, Zengage, nous sommes 82 % à avoir cessé de faire appel à une société suite à une mauvaise expérience du service client. Et les effets de cette mauvaise impression sont durables ! Dimensional Research a démontré que plus d’un tiers (39 %) de ceux qui ont vécu une mauvaise expérience continueront d’éviter tout contact avec la société en question pendant au moins deux ans. A cela s’ajoute qu’avec la généralisation des médias sociaux, l’effet boule de neige des répercussions d’un seul témoignage négatif peut être extrêmement rapide.

Alors que faire ? On ne change pas en une nuit la culture d’une entreprise, le comportement des employés et les processus internes. Et les budgets ne sont pas infinis. Une évolution progressive a plus de chances de réussir qu’une révolution imposée.

Nous recommandons aux entreprises d’envisager une approche modérée de la gestion du papier plutôt que de s’en défaire une fois pour toutes et de risquer de laisser démunis de nombreux clients et salariés.

Par une consommation modérée du papier, nous préconisons la numérisation systématique des documents de tout nouveau client ou client important pour en extraire les données utiles, les valider et les enregistrer dans le système du service client. Les documents existants ou moins stratégiques pourront être indexés et archivés pour pouvoir y effectuer des recherches au besoin.

Dans près de deux entreprises sur trois (62 %) qui s’efforcent d’intégrer les documents papiers, les salariés se retrouvent à devoir enregistrer manuellement les données dans un système automatisé. Une approche sujette aux erreurs qui mobilise beaucoup de temps et de ressources. Une sur trois seulement numérise actuellement les documents papier pour en extraire l’information. Ce qui signifie que deux entreprises sur trois en Europe ne le font pas, comme deux sur trois ne savent par retrouver les informations client une fois que les documents papier ont été archivés.

Les dirigeants pourraient se dire que, comme l’utilisation du papier est en recul et que diminuent avec lui les difficultés à venir de gestion des correspondances, le problème pourrait se résoudre de lui-même. Mais ne pas intégrer et traiter avec respect les demandes de service client reçues sur papier, c’est courir le risque de ne pas satisfaire des clients, qui se tourneront probablement vers la concurrence.

Cela revient aussi à accepter de perdre à jamais les précieux renseignements et les informations décisionnelles que contiennent ces correspondances. Pensez-vous que votre entreprise peut prendre un tel risque ?

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Marc Delhaie est Pdg d’Iron Mountain France et Suisse

 

(1) Opinion Matters pour Iron Mountain, février 2014. Opinion Matters a enquêté auprès de 1 257 employés de bureau des secteurs juridique, financier, pharmaceutique, de la fabrication/ingénierie et des assurances au Royaume-Uni, en France, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Espagne. L’étude s’est déroulée entre le 10/01/2014 et le 22/01/2014