Plus grand, plus international, le FIC, le Forum International de la Cybersécurité, organisé en grande partie par la Gendarmerie Nationale a été marqué par les interventions des représentants de L’ANSSI et du ministre de l’Intérieur.

L’année 2015, marquée par les attentats et la loi de programmation militaire dont les arrêtés spécifiques tardent à être mis en œuvre, ont servis de fil directeur à la plupart des interventions du Forum lillois. Invitée d’honneur, cette année, l’Angleterre montrait en partie le rapprochement des services des polices européennes, mais aussi une collaboration accrue entre la France et l’OTAN.

Pour l’ouverture du Forum, une conférence dont le titre était « retrouver la confiance numérique » était animée par Guillaume Poupard, directeur de l’ANSSI (photo à droite) poupard_gface à l’ancien directeur des services secrets britanniques, David Omand, et à Jean Yves Latournerie, préfet chargé de la lutte contre les cybermenaces. Complétant le panel et paraissant donner l’avis des entreprises et celles des internautes, François Lavaste, directeur cybersécurité du groupe Airbus Defence and Space, Nicolas Arpagian, expert en cybersécurité et Jeremie Zimmermann, farouche défenseur de la liberté individuelle. Ils sont intervenus pour préciser le périmètre de vie privée et celui des entreprises qui méritent d’être défendus à tout prix. Zimmermann d’emblée (photo ci-dessous) précisait : « Comment peut-on construire la confiance quand des gouvernements mettent en place une société de surveillance de masse, s’arrogent le droit d’intercepter les communications ou d’interférer dans les protocoles de cryptographie ? ». Capture d’écran 2016-01-26 à 12.10.40

Du côté du préfet Latournerie, la position était celle de l’optimisme : « Comment peut-il y avoir une crise de confiance lorsqu’on voit l’explosion des usages de l’internet ? » Pour Guillaume Poupard, la confiance reviendra lorsque toutes les infrastructures seront parfaitement protégées et que les habitudes de prudence seront prises.

La lutte contre le terrorisme par internet

Au fond de la discussion, la remise en cause de la prolongation de l’état d’urgence qui sera effective le mercredi 27 janvier. Cette situation qui devait être provisoire permet à l’état d’écouter quiconque est soupçonné (les avocats aussi), de lire ses mails, sans préambule et d’effectuer des perquisitions sans délai, était sur la sellette. Mais que ce soit pour le directeur de l’ANSSI ou David Omand, la fin justifie les moyens.

188 000 fiches de signalement ont étés créées en 2015 sur Pharos

Présent à l’ouverture de la deuxième journée du FIC, Bernard Cazeneuve, le ministre de l’Intérieur (photo d’ouverture) a rappelé aussi l’année difficile que fut 2015 avec les attentats du 7 janvier et du 13 novembre. Selon lui, pas moins de 11 attentats ont été déjoués en 2015, dont 6 depuis le printemps dernier. Mais le combat contre le terrorisme se livre sur le Cyberespace. 283 blocages de sites ont été réalisés et plus de 188 000 fiches de signalements ont étés créées en 2015 sur la plate forme de renseignements Pharos dont 32 000 liées uniquement au terrorisme. Mais ces chiffres sont à relativiser, car une simple campagne de Phishing peut, à elle seule, créer des centaines de déclarations sincères.

« Un certain nombre de sites était commandité par ceux qui nous ont frappés le 13 novembre », précisait le ministre de l’Intérieur. De retour de la réunion d’hier, à Amsterdam où se sont retrouvés les différents ministres de l’Intérieur autour, entre autre, de la problématique Passenger Name Record,  il n’a pas évoqué ces projets de PNR (une liste, comme dans les avions allant aux États-Unis, des passagers vérifiés par la police). Une formule européenne serait à l’étude au delà des seuls avions, pour les trains et les bus, ce qui pourrait devenir un objectif pour la SNCF. Le PNR permet de générer des alertes en rapprochant certaines données, dans le cadre de la lutte antiterroriste, mais aussi du trafic de drogue. Le PNR européen devrait permettre aussi de tracer les allers et retours en Syrie, en Irak, au Yémen, et dans tous les pays avoisinants. Par contre, Bernard Cazeneuve est encore revenu sur l’importance du système d’information Schengen qui recense les personnes recherchées et celles qui sont interdites d’entrée dans l’Union européenne. Il a aussi souligné que « l’analyse fine avec des outils d’analyse décisionnels doit donner des résultats de plus en plus précis.

Plateforme-de-signalement-des-contenus-illicites-de-l-Internet-Pharos-visuel-1

Eurodac, le fichier qui permet d’enregistrer les personnes à l’entrée de l’espace Schengen, “doit être aussi utilisé à des fins judiciaires dans le contexte de risque terroriste auquel nous sommes confrontés”. Bref, ceux qui craignaient que dans le futur, imaginé par Orwell dans son Livre 1984, l’on soit fichés et suivis dans tous nos déplacements par ordinateurs n’avaient pas tort. “C’est le prix à payer pour garantir nos libertés”, un discours qui était dans toutes les bouches des exposants au FIC 2016.