Alors qu’une nouvelle étude Oracle montre que les Français n’ont pas les mêmes attentes que le reste du monde, les débats se multiplient autour de la 5G ne faisant qu’aggraver le retard de la France face à ses voisins.

Les principaux blocs de fréquences 5G mises aux enchères par le gouvernement ont été attribués cette semaine et ont rapporté près de 2,79 milliards d’euros à l’État. Une manne significativement supérieure aux 2,10 milliards minimum attendus. Mais une manne très inférieure à ce que des pays comme l’Allemagne ou l’Italie ont obtenu (plus de 6 milliards), l’ARCEP ayant préféré que nos opérateurs aient les moyens de continuer d’investir massivement aussi bien dans le réseau mobile que dans le réseau Fibre.

Qui prend quoi?

Rappelons que chaque opérateur s’était déjà vu attribuer un bloc de 50 MHz au prix fixe de 350 millions d’euros. Restaient à distribuer 11 blocs de 10 MHz. Après 17 tours d’enchères, Orange en emporte quatre (ce qui lui procure au total une bande 5G de 90 MHz), SFR en gagne trois (pour bénéficier au total de 80 MHz), Bouygues Telecom et Free Mobile se partageant à parts égales les quatre derniers blocs (pour disposer ainsi chacun de 70 MHz de bande 5G).
Orange aura donc investi 854 millions d’euros pour acquérir sa bande 5G, SFR aura dépensé 728 millions d’euros, Bouygues Telecom et Free Mobile auront déboursé 602 millions d’euros chacun.

C’est une étape importante franchie, mais il en reste d’autres. La première sera le positionnement de chacun dans la bande de fréquences. Une enchère « de positionnement » sera organisée courant octobre pour déterminer la position des fréquences, chaque opérateur exprimant alors ses préférences de position.
La seconde étape consistera pour l’Arcep à délivrer les autorisations d’utilisation des fréquences avant leur publication au Journal Officiel.

Une exception Française…

Une étape qui en théorie ne devrait être qu’une formalité à moins que les très houleux débats politiques et dans l’opinion publique ne viennent encore ralentir une procédure. Un sondage mené par Odoxa et Oracle dans le cadre l’Observatoire de la Tech montre que 60% des Français interrogés estiment que la mise en place de la 5G en France ne devra se faire qu’une fois que son impact environnemental et sanitaire aura été pleinement étudié ! Seuls 39% des Français privilégient avant toute chose la nécessité de faire progresser le réseau Internet mobile en France.
Un résultat tout de même surprenant, qui démontre que « les attentes des Français semblent être très spécifiques comparés au reste du monde » selon les rapporteurs de l’étude.

L’environnement et le réchauffement climatique ne sont d’ailleurs pas les principales préoccupations des Français face à la 5G, des Français dont les craintes se portent d’abord sur l’utilisation malveillante des données personnelles, les risques d’espionnage, la consommation d’énergie et la place trop importante de l’Internet dans le quotidien.

« Les craintes sous-jacentes quant au déploiement de cette nouvelle technologie sont encore très présentes dans le débat public. La 5G va démultiplier en effet les risques en matière de cybersécurité, en créant davantage de points d’entrée pour les acteurs malveillants. La protection des données personnelles est un point crucial à considérer pour les opérateurs français » explique Karine Picard, Country Manager, Oracle France. Avant d’ajouter qu’ « Au-delà de fournir une vitesse de connexion supérieure pour nos téléphones, la 5G est en passe de devenir le moteur d’innovation et de transformation de notre société. Les acteurs télécoms, technologiques et l’État devront tout mettre en œuvre pour assurer cette transition, et renforcer la vitalité de notre écosystème Tech français ».

Un retard qui impacte surtout les entreprises

Car bien avant le grand public, ce sont d’abord les entreprises qui ont besoin de cette 5G. Une réalité malheureusement totalement masquée dans les débats politiques actuels. Dans une interview à nos confrères d’IT For Business, François Treuil, Directeur général de Bouygues Telecom Entreprises, rappelait « 30% des connexions entreprises dites fixes sont des connexions 4G ! Quand vous avez un routeur 4G qui offre 30 à 40 mégas de débit dans une zone sans FTTH/FTTO et où vous ne pouvez pas amener en xDSL plus de 2 ou 3 mégas, la 4G devient très compétitive d’un point de vue service. Nous pensons que la 5G prendra rapidement le relais, au rythme de son déploiement… Par ailleurs, nous pensons que bien des industriels – qui s’interrogent aujourd’hui sur leur plateforme DECT ou Wi-Fi et sur comment communiquer avec des IoTs, des robots, des machines et des personnes dans un lieu donné – vont réfléchir à l’opportunité de disposer d’un réseau propre en 5G. ».

Rappelons que la France est très en retard. Les Finlandais se sont lancés dans la 5G dès 2018. Le déploiement a commencé depuis plus d’un an en Allemagne, Angleterre, Autriche, Irlande, Roumanie, Belgique, Pays-Bas, Italie et Espagne. Il n’y a guère que le Portugal et le Danemark qui soit autant en retard que nous. Bien sûr, il faut différencier le déploiement commercial et le déploiement technique. Ce dernier a déjà démarré dans l’hexagone avec 500 antennes déployées à des fins expérimentales sous autorisation spéciale de l’ANFR autour des métropoles de Lille, Nantes, Lyon, Toulouse, Bordeaux, Montpellier et Marseille. Finalement, la 5G sera peut-être là pour Noël… Ou pas…