Alexa, Ok Google, Siri, l’informatique ambiante est devenue une réalité avec la multiplication des enceintes intelligentes et des écrans « smart-displays ». Mais ces systèmes étaient jusqu’ici tous incompatibles entre eux. Cela pourrait bientôt changer…
On ne refait pas les grandes entreprises américaines de la High Tech. Leur envie de domination l’emporte systématiquement et leur premier réflexe est toujours de chercher à imposer leur propre technologie aux détriments des autres.
Un grand bazar
La maison intelligente, ce qu’on appelait autrefois la domotique, se cherche des standards depuis fort longtemps. Mais personne n’a jamais réussi à s’entendre. Zigbee, KNX, Z-Wave, RFXCom, EnOcean, les protocoles se sont multipliés. Déjà complexes, les choses se sont encore aggravées avec l’apparition des assistants vocaux et leur insertion au cœur des enceintes connectés et des cadres intelligents. OK Google, Alexa, Siri… Tous veulent pouvoir tout contrôler dans le foyer par la voix. Mais une enceinte Google est incapable de parler à Alexa et inversement. Les équipements contrôlés par l’un ne le sont pas par l’autre sans une gymnastique très compliquée. Bref les utilisateurs sont obligés de faire des choix drastiques pour une technologie et pas une autre. Et l’informatique ambiante perd forcément la simplicité et la pluralité qui aurait dû être sa marque de fabrique. Et cette guerre perpétuelle finit aussi par coûter cher à chaque acteur puisqu’ils doivent se battre sur deux fronts : populariser l’informatique ambiante et imposer leur petit standard monopolistique.
L’union fait la force
Sous la pression des utilisateurs et probablement aussi le constat que l’addition commence à être un peu trop lourde, les principaux acteurs du marché, dont Google, Apple et Amazon, ont enfin décidé de travailler sur un socle commun pour s’assurer de l’interconnexion de tous ces appareils connectés du foyer, à commencer par un protocole d’échange commun basé sur IP.
Demain, les Échos d’Amazon pourront donc contrôler des thermostats Nest de Google ! Voilà une bonne nouvelle.
Amazon, Apple, Google, Zigbee, Ikea, Legrand, Leedarson, MMB Networks, NXP, Resideo, SmartThings, Schneider Electric, Signify (Philips Hue), Silicon Labs, Somfy, Wulian… Ils sont 16 grands noms de la domotique et de l’IoT à annoncer la création d’un groupe de travail commun autour de l’initiative « Connected Home Over IP » avec la volonté de faire émerger des technologies en open source.
Une marmite collective
Dans un premier temps, chacun semble vouloir venir avec une de ses technologies clés pour la transformer en standard open source. Google veut mettre ses protocoles Thread et Weave dans la marmite, Apple une partie de son HomeKit, Amazon certaines technologies d’Alexa, ZigBee son Dordot, etc. L’idée est de mélanger le tout pour accélérer l’émergence de protocoles et de technologies communes avec l’espoir d’arriver à concrétiser cet effort dès 2021.
La volonté mérite d’être saluée même si l’approche reste assez surprenante. Mais l’exploit d’avoir mis Google, Amazon et Apple autour de la même marmite change forcément la donne.
Une concurrence soudain désarmée
Après tout, l’initiative n’est pas une première. Intel a déjà lancé un projet similaire IoTivity dans le cadre de l’Open Connectivity Foundation (OCF). Une initiative aux fruits disponibles en open source mais qui n’a jamais eu l’adhésion d’Amazon, Apple et Google mais qui compte dans ses rangs certains acteurs de la nouvelle alliance (Samsung, Legrand), ainsi que Microsoft, Qualcomm ou Broadcom.
Si le projet « Connected Home over IP » aboutit, c’est tout le projet « IoTivity » qui prend du plomb dans l’aile. Mais il n’est pas le seul perdant. Z-Wave, X10, LightwaveRF, Homeseer, Belkin WeMo, et tous ces acteurs qui la joue « en solo » et sont déjà marginalisés vont devoir adopter un camp ou disparaître.
Une mauvaise nouvelle quand même
Si les utilisateurs seront les grands gagnants à long terme de cette initiative, ils ne le seront malheureusement probablement pas à court terme. Car si les appareils intelligents Alexa, Google Home, et Apple continueront bien évidemment de fonctionner, les multiples périphériques connectés qui pilotent le foyer devront très probablement être changés en faveur de nouveaux appareils compatibles avec les nouveaux protocoles qui seront édictés. Certains pourront probablement être mis à jour mais les acteurs de la nouvelle initiative ne cachent pas que cela ne sera pas toujours possible et que l’acquisition de nouveaux équipements sera parfois la seule solution.
Reste désormais à cette initiative à se mettre en ordre de marche et à tenir ses promesses. Le voyage s’annonce assez chaotique mais s’il aboutit, ce sera une grande victoire pour l’informatique ambiante et ses utilisateurs…