Alors qu’IBM, qui fut surnommé Blanche Neige, puis Big Blue, est le dernier des mohicans, que sont devenus les membres du groupe baptisé Bunch : Burroughs, Univac, NCR, Control Data, Honeywell ?

General Electric pourrait-il racheter IBM ? Telle est l’idée peut-être pas si farfelue qu’il n’y parait exprimée sur le site du fonds d’investissement Seeking Alpha (GE Could Buy IBM). Les arguments sont relativement simples : A environ 144 milliards de dollars et un PER inférieur à 10, la valorisation d’IBM est au plus bas, GE a les poches pleines, plus de 90 milliards de dollars de liquidités et la firme de Jim Immelt veut se développer dans le logiciel et d’Internet des objets. GE qui a lancé une grande offensive dans ce que l’on appelle l’Internet industriel et entend intégrer le Top10 du logiciel avec un chiffre d’affaires de plus de 6milliards de dollars en 2020.

L’acquisition d’IBM serait une sorte de retour aux sources pour GE qui était un des pionniers de l’informatique et était le premier constructeur d’ordinateurs dans les années 50. GE a revendu ses activités informatiques à Honeywell en 1970 qui a ensuite fait équipé avec Bull dans l’attelage Honeywell-Bull pour s’en retirer définitivement en 1986 laissant le constructeur français maître de son destin. Comme tous les membres du Bunch, Bull s’est peu à peu transformé en sociétés de services ou s’est recentré sur ses métiers d’origine pour être rachetée en 2104 par Atos.

Dans la décennie 50, on parla d’IBM et des 7 nains pour désigner les 7 petits concurrents du leader incontesté : Burroughs, Univac, NCR, Control Data Corporation, Honeywell, RCA et General Electric. Avec la sortie des deux derniers acteurs, les sept nains sont devenus le Bunch.

Que sont devenus les autres membres du Bunch ?

Burroughs et Sperry Univac ont fusionné en 1986 pour former Unisys (en fait c’est Burroughs qui rachetait Sperry pour 4,8 mds$) devenue alors la deuxième entreprise du secteur derrière IBM avec un chiffre d’affaires de 10,5 milliards de dollars et employait 120 000 salariés. La fusion a donné lieu à des discours sur la complémentarité des deux entreprises tant sur le plan des secteurs que des applications et des zones géographiques. L’ancien secrétaire d’Etat au Trésor Michael Blumenthal devenu CEO affichait alors des ambitions sans limites avec l’objectif de doubler le chiffre d’affaires en quelques années. La firme de Blue Bell (Pennsylvanie) a pris le virage des systèmes Windows d’un côté et des systèmes de bureautique intégrés en rachetant Convergent Technologies en 1988. En 1997, l’entreprise était passé à seulement 30 000 salariés et amorcé son lent mais assuré déclin. Ainsi que sa transformation en sociétés de services. Elle a mis un terme à ses systèmes propriétaires CMOS en 2014 pour ne commercialiser que des serveurs x86 capables de faire tourner les applications OS 2200 (Sperry) et MCP (Burroughs). Aujourd’hui, l’entreprise emploie 20 000 salariés et a réalisé un chiffre d’affaires de 3,3 milliards de dollars.

NCR (National Cash Register) est synonyme de caisse enregistreuse et a eu beaucoup de mal à se départir de cette image lorsqu’elle s’est impliquée dans l’informatique. Créée à Dayton en 1884, la firme a déménagé son siège pour aller s’installer en Georgie en 2009. NCR est entré en informatique avec le rachat de Computer Research Corporation dans les années 50. NCR est venu assez tôt sur les systèmes ouverts en introduisant la gamme des systèmes Tower basés sur Unix. NCR créé également Teradata, une division spécialisée dans la fabrication de machine de base de données, redevenue indépendante en 2007. En 1991, elle est racheté pour 7,4 mds$ par le géant des télécoms AT&T qui promeut alors une grande stratégie de convergence entre les télécoms et l’informatique. L’acquisition est un échec total. NCR est rebaptisée AT&T Global Information Solutions pour reprendre son nom d’origine et son indépendance au début 1997. Depuis, NCR s’est largement recentré sur son métier d’origine de fournisseurs de solutions pour la distribution et la banque. NCR a réalisé un chiffre d’affaires de 6,6 milliards de dollars en 2014.

Control Data Control Data est une entreprise américaine pionnière dans la fabrication de supercalculateurs créée en 1957 à Minneapolis dans le Minnesota (États-Unis) par des scientifiques américains issus des centres de recherche de la Navy, dont Seymour Cray (ce dernier fonda en 1972 la société Cray Research) et William Norris. Control Data a développé les supercalculateurs superscalaires de la gamme Cyber mais aussi des mainframes.

En 1983, Control Data perdait des parts de marché et son patron fondateur, William Norris décida de créé ETA Systems, une spin-off uniquement spécialisée dans les supercalculateurs.

Au travers de Magnetic Peripherals Inc (MPI), une joint-venture avec Honeywell et Honeywell-Bull, CDC est devenu un acteur majeur dans le domaine des disques. Elle fut en particulier un des leaders des disques 14 pouces. CDC développa en partenariat avec Shugart Associates une ligne de produits 8 pouces qui fut l’occasion pour de nombreuses start ups de se lancer dans l’aventure des disques, en particulier Micropolis, Atasi, Maxtor, and Quantum. CDC a été à l’origine avec Compaq et Western Digital de l’interface ATA (Advanced Technology Attachment). En 1988, MPI devint indépendante sous l’appellation Imprimis qui fut rachetée l’année suivante par Seagate.

Control Data abandonna l’activité de constructeurs d’ordinateurs pour se concentrer sur les services. Elle fut rachetée en 2007 par des fonds d’investissement pour redevenir une société privée. Opérant aujourd’hui sous le nom de Ceridian, elle emploie aujourd’hui 7000 salariés pour un chiffre d’affaires d’environ 1 milliard de dollars.

Retour sur IBM

Face à ce retrait en rase campagne des principaux acteurs de la première vague informatique, celle des mainframes, la survie d’IBM pourrait donc apparaitre comme une sorte de miracle. Suite aux deux exercices catastrophiques des années 92 et 93 Lou Gerstner a pris les commandes de l’entreprise et engagé une révolution sans précédent évitant le démantèlement et emmenant l’entreprise sur le terrain des services. Son Successeur Sam Palmisano a poursuivi l’œuvre de son prédécesseur dans le domaine des services et en développant largement l’activité logiciels. Sam Palmisano a développé une stratégie croissance externe (près de 140 acquisitions depuis l’année 2000), de rachat d’actions pour en soutenir le cours et de transfert d’emploi vers l’Inde. IBM s’est peu à peu retiré de la fabrication de matériels informatiques (PC, disques, imprimantes, serveursx86, semiconducteurs) et ne conserve aujourd’hui que les mainframes et les serveurs Power.