Malgré les avantages connus du cloud (réduction des coûts, de l’investissement initial, évolutivité, mobilité, mises à jour régulières, résilience en cas de sinistre, etc.), les entreprises françaises et plus particulièrement les PME sont encore réticentes face aux solutions ERP en mode SaaS. Selon la dernière étude du CXP, « l’adoption de l’ERP dans le cloud ne bénéficie pas de la même dynamique que le reste du marché logiciel. L’ERP est très majoritaire hébergé au sein de l’entreprise (84%) ». Pourtant, la mise à disposition de l’ERP en mode SaaS est une rupture technologique majeure dont les enjeux sont aussi importants pour les utilisateurs que pour les éditeurs.
Le cloud n’offrirait pas les mêmes fonctionnalités
La migration de l’ERP vers le cloud implique une standardisation contraire à l’objectif de différenciation de chaque entreprise. Alors qu’elles ont acquis un ERP pour disposer d’une meilleure réactivité, d’un outil de pilotage, de maîtrise des stocks, etc., les sociétés redoutent aujourd’hui de devoir abandonner leurs logiciels personnalisés pour adopter un outil standard sans avantage concurrentiel.
D’autre part, l’ERP en mode SaaS n’est envisageable que si la part de développement spécifique reste minime et que les mises à jour sont maîtrisées. En effet, il est difficile de faire accepter à l’utilisateur qu’il disposera de mises à jour régulières indépendantes de sa volonté et pour lesquels il ne sera pas systématiquement formé.
De plus, disposer d’une connexion internet suffisante pour accéder à son ERP partout et tout le temps n’est pas garanti. Ce paramètre pourrait amener à retarder certaines commandes ou le lancement de la production, devenant un obstacle au bon déroulé des activités d’une entreprise : toutes ne sont pas prêtes à prendre ce risque.
Les patrons de PME ne sont pas prêts…
La présence d’un serveur physique dans les locaux a tendance à rassurer les entreprises, pour qui cette matérialisation de la ressource informatique crée une sensation de contrôle. Pourtant, la plupart des applications comme le CRM, la paie ou encore la comptabilité sont déjà externalisées. D’après le CXP, c’est souvent « le principe même d’externalisation de l’ERP qui freine les entreprises, plus que l’idée du cloud ou du SaaS en soi ». Empreint du culte du secret, le secteur industriel en est l’exemple le plus marquant : les secrets de fabrication, les procédés utilisés, sont des données sensibles pour lesquelles les prestataires signent des clauses de confidentialité.
C’est donc un frein culturel plus que technique qui empêche les entreprises de mettre leurs données dans le cloud.
… tous les éditeurs non plus
La migration des solutions ERP sur le web est un virage stratégique voire critique pour les éditeurs. Ce long processus entraîne d’importants coûts en Recherche & Développement. Or les technologies évoluent rapidement et même pour les éditeurs, premier maillon de la chaîne de transformation numérique, la mutation est parfois trop rapide.
D’autre part, ce changement de technologie implique un changement du modèle économique : l’acquisition de l’ERP ne se fera plus grâce à un ticket d’entrée mais via un abonnement au service. Ce nouveau modèle de financement amène la nécessité d’une réflexion autour de la trésorerie, d’autant plus que beaucoup de progiciels sont aujourd’hui disponibles sans engagement.
De ce fait, beaucoup d’éditeurs continuent à proposer le mode licence en parallèle du mode SaaS. On voit d’ailleurs émerger des ERP hybrides qui conservent le cœur du métier sur un serveur physique et les fonctionnalités commerciales dans le cloud.
L’ERP cloud déjà adopté par certaines structures
Les sociétés qui ont des processus simples ou génériques, transposables dans un logiciel standard avec peu de personnalisation font plus facilement le choix d’un ERP cloud. Il en est de même pour les jeunes entreprises qui possèdent peu de données et travaillent souvent sur des marchés concurrentiels qui nécessitent une réactivité maximum. Le cloud est alors véritablement perçu comme un moyen de disposer rapidement de nouvelles fonctionnalités avec un ticket d’entrée moins élevé.
De manière générale, les entreprises qui ont besoin de mobilité auront tendance à se tourner vers des ERP en mode SaaS. La dispersion géographique des ressources humaines et la nécessité d’accéder aux données depuis un appareil nomade sont facilitées grâce aux solutions hébergées.
Les générations X et Y disposent d’une profonde culture du web et de la mobilité. Il y a donc fort à parier qu’elles encouragent l’utilisation d’ERP en mode SaaS lorsqu’elles accèderont à des postes décisionnaires, l’imposant ainsi comme modèle de référence dans les années à venir.
Le marché des objets connectés ouvre également les possibilités de rendre les données encore plus accessibles en imaginant de pouvoir disposer de reporting en temps réel ou encore de récupérer des données de production sur une montre connectée.
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Thomas Cattelain est animateur des ventes Silog