A l ‘occasion des 100 ans de la grande guerre de 14, l’état à ouvert un grand mémorial virtuel où sont recensés prés 8,5 millions de français combattants, le fruit de la réunion des listes de morts et des fichiers des matricules des « poilus ».
Même si cette base de données n’est pas tout à fait exhaustive, elle est extrêmement visitée. Elle donne une idée de la fracture démographique et économique pour notre pays à l’époque et l’impact sur leurs familles. Le drame que représentaient les 1,6918 millions de morts français auxquels il faut rajouter les 4,266 millions de blessés n’a jamais été oublié. La base de données est consultable sur http://www.culture.fr/Genealogie/Grand-Memorial.
Des chiffres pour mieux comprendre l’histoire
A l’occasion de l’inauguration de l’anneau de mémoire, le mémorial de Notre-Dame-de-Lorette, dans le Pas-de-Calais, le 11 novembre dernier, François Hollande, précisait que près de 579 606 soldats de toutes nationalités sont morts dans le seul département du Nord-Pas-de-Calais pendant la première guerre mondiale. Ce fut l’occasion de comprendre l’incroyable succès de la généalogie pour laquelle existent une dizaine de logiciels et de sites spécialisés.
A l’occasion de l’inauguration de l’anneau de mémoire, le site de Généalogie Geneanet a recensé sur des centaines de photos par ordre alphabétique les noms des victimes. Ce travail complète celui des photographies de toutes les tombes françaises très anciennes qui ne sont plus entretenues. Dans les deux cas, l’objectif est d’offrir de nouvelles pistes de recherches aux adhérents de cette association.
Considérées comme un index des index, ses bases de données sont alimentées par ses participants et s’ouvrent au grand public. L’accès à la plupart des données est gratuit mais un abonnement annuel permet de disposer de fonctions de recherche plus élaborées et de consulter des sources supplémentaires.
L’internet et plus de 250 clubs de généalogies regorgent désormais de statistiques, de bases de données de sites web communautaires pour montrer que la vraie rupture démographique remonte à la fin de la première grande guerre.
L’absence de prés de 3 millions d’hommes morts ou incapables de travailler dans les champs et les usines à cette époque explique déjà l’immigration d’étrangers, bien avant la fin de l’empire français et en particulier du Maghreb dans les années 60. Tous ces chiffres n’étaient pas auparavant accessibles à tous et l’internet a permis de mieux comprendre la situation démographique de l’époque.
Le succés de la généalogie
L’ouverture des archives régionales, municipales, des registres paroissiaux ont permis de multiplier les points de recherches. Plusieurs millions de français font de la généalogie et plus de 250 clubs rassemblent plusieurs dizaines de milliers de passionnés, ce qui explique le succés de logiciels sur ce sujet. Mais la loi de juillet de 2008 a limité la consultation de certaines archives aux seuls professionnels. Du coup, la fédération française de généalogie tente de faire modifier la loi qui compliquerait les recherches de ses membres.
Elle propose sur son site genefede.eu, une pétition pour une révision de la loi. Le propos de l’état à l’époque était d’être en phase avec ‘Le droit à l’oubli numérique’. Un principe « qui nous parait liberticide » affirme le président de la FFG, Jean-François Pellan, élu en 2013. Celui-ci évoque une «atteinte à la mémoire » aux « conséquences douloureuses pour les historiens qui se pencheront sur l’histoire du XXIème siècle ».
Entre loisirs et besoin de transmettre.
Cette association (photo) s’inquiète aussi de la monétisation des archives.
De nombreuses fois utilisées par les services publics, la fédération de généalogie s’insurge sous les critiques à peine voilées de certains professionnels de l’état qui s’inquiètent de la prolifération de retraités enthousiastes qui submergent de questions les services concernés : « Nous serions des amateurs ! En fait, seulement des auxiliaires de l’histoire par la retranscription et la collecte d’informations nominatives. Nos membres ont participé, par exemple, à l’enquête dite « TRA » du Laboratoire de Démographie historique sur la mobilité́ géographique et sociale des populations.»
Interrogé sur les raisons des restrictions induites par la loi de juillet 2008, un fonctionnaire des services de la Cnil ( mais qui n’a pas voulu être cité ) nous a répondu : « Imaginez que vous ayez un parent condamné pour un meurtre abominable. Si ces informations sont en ligne, immédiatement vous serez pénalisé dans votre vie quotidienne car son nom sortira en premier dans des moteurs de recherches. Le droit à l’oubli numérique, c’est plus de liberté pour tous. Mais je comprends que compliquer la vie des chercheurs en généalogie puisse leur paraître absurde ». Mais à l’heure d’internet où des bases de données sur plusieurs millions de personnes peuvent être copiées sur le disque d’un simple portable, la prudence s’impose. Toutes les populations qui souffrent ont naturellement besoin de désigner des boucs émissaires pour cristalliser leurs frustrations. Dès la Saint-Barthélemy, le 24 août 1572, dans un pays qui se disait déjà très civilisé, on s’est mis à tuer collectivement et systématiquement par simple vengeance. Heureusement, depuis 1962, les guerres civiles ou coloniales n’ont plus fait beaucoup de victimes.