A l’occasion de l’édition 2018 de l’IBM Investor Briefor qui s’est tenu la semaine dernière à New York, Ginni Rometty a fait preuve d’un optimisme qui contraste avec les résultats de ces dernières années

« Cette année, nous avons changé le format de notre présentation aux investisseurs car notre système de prévision météorologique basé sur Watson est tellement précis que nous avions prévu la tempête de neige il y a plusieurs mois ». C’est avec cette introduction sous la forme de boutade que Ginni Rometty, CEO d’IBM a ouvert cette édition 2018 de la présentation d’IBM aux investisseurs.

Malgré 22 trimestres de baisse consécutive de son chiffre d’affaires ponctués par une légère éclaircie lors du 4e trimestre, Ginni Rometty met en avant trois éléments majeurs qui caractérisent IBM aujourd’hui. D’abord, IBM est une entreprise différente aujourd’hui de ce qu’elle était dix, cinq voire même il y a seulement trois ans. Ensuite, je suis très confiante sur le présent, mais surtout sur l’avenir car IBM présente trois éléments différenciants : des technologies innovantes, une expertise sur les différents industries et secteurs économiques et enfin des compétences reconnues en matière de confiance et de sécurité. Enfin, un alignement de notre stratégie sur les besoins des entreprises. En seulement dix ans, la répartition du chiffre d’affaires dans les trois grandes activités a radicalement changé : les ventes de matériel sont passées de 25 à 10 % du total alors que dans le même temps, le logiciel a augmenté de 20 à 31 %. Cette évolution a été accélérée par des cessions d’un côté et des acquisitions de l’autre. IBM a en effet cédé son activité serveurs x86 à Lenovo ne gardant que les serveurs Power (fonctionnant sous les OS i, Linux et AIX) et les mainframes z dont IBM a récemment annoncé le z14. Sur les dix dernières années, IBM a procédé à plus de 100 acquisitions.


Principales acquisitions d’IBM ces dix dernières années

Deux lois régissent notre industrie depuis des décennies, commente Ginni Rometty : la loi de Moore selon laquelle la puissance des processeurs double tous les 18 mois, la loi de Metcalfe selon laquelle plus il y a d’utilisateurs dans un réseau, plus ce réseau aura de la valeur[1]. « Il faut en ajoute une troisième, poursuit la CEO d’IBM : la loi de Watson selon laquelle la quantité des données et des outils disponibles conduisent à une augmentation exponentielle de l’expertise ».

A l’occasion de cette conférence aux investisseurs, IBM précise que seulement 20 % des données disponibles peuvent être accédé via un moteur de recherche, les 80 % restants appartiennent aux entreprises. Si toute la lumière est aujourd’hui portée sur les GAFA qui sont principalement orientées grand public, il faut rappeler qu’IBM est une entreprise B2B où l’innovation est tout aussi vigoureuse même si elle est moins médiatisée.

La source de cet optimisme est basée sur la dernière étude auprès des directions générales et métiers intitulée Incumbents Strike Back selon laquelle trois dirigeants sur quatre considèrent que les organisations majeures, plutôt que les nouveaux entrants, sont à l’origine de bouleversements dans leur industrie. En comparaison, seulement 22 % déclarent que les petites entreprises et les start-ups mènent ces changements disruptifs. Dans une étude IBM datant de 2015, les résultats montraient que 54% des dirigeants s’attendaient à plus de concurrence de la part des autres industries. La dernière étude, quant à elle, montre que ce nombre a diminué de moitié, atteignant 26% deux ans plus tard seulement.

Les leaders ont exploité leurs données plus intelligemment, ils ont aiguisé les compétences de leurs employés, et dans certains cas, ils ont acquis de possibles disrupteurs pour rivaliser à l’ère numérique d’aujourd’hui, explique la nouvelle étude. Le problème avec cette analyse est que, certes, les startups d’hier devenues les GAFAM d’aujourd’hui concentrent une grande partie de cette innovation.

Dans cette combinaison données/expertise, Ginni Rometty met en avant le renouvellement des équipes, près de la moitié des salariées d’IBM y ont été embauchés ces 5 dernières années. Concernant la montée en puissance de la filiale indienne qui emploie désormais plus de monde qu’aux Etats-Unis, la CEO d’IBM ne donne pas de détail. Parmi les nouvelles compétences recrutées, IBM fait état d’experts en matière de blockchain, de designer, la cybersécurité, la santé… embauchés récemment. La Blockchain est aux transactions commerciales sécurisées ce que l’Internet a été à la communication, explique-t-elle. Elle trouve des domaines d’applications dans de très nombreux domaines : la sécurité alimentaire, le transport, la supply chain… IBM fait état de plus de 400 projets dans ce domaine.

Parmi les autres ingrédients de ce changement, IBM indique que le cloud jour un rôle majeur. « Pas seulement l’IaaS de commodité, explique Ginni Rometty, mais le cloud construit pour toutes les données et les applications, qu’il soit public, privé ou dans les data centers de nos clients. Dans cette révolution du cloud où l’hybridation des différents clouds sera essentielle, nous sommes mieux armés que quiconque », considère-t-elle.

Dans le domaine de l’innovation, IBM se considère en pole position en matière d’intelligence artificielle appliquée aux besoins des entreprises avec des use cases comme le service clients (Orange Bank), la relation clients ou encore la recherche. L’IA devient de plus en plus utilisée dans les ressources humaines pour embaucher les meilleurs talents, leur donner les meilleures opportunités de carrière… Domaine de recherche fondamentale, l’informatique quantique arrive dans les entreprises. « Nous sommes actuellement la seule entreprise à avoir développé un système à 50 Qbits » conclut-elle.

 

[1] La loi de Metcalfe explique les effets de réseau liés aux technologies de l’information, applicable à des réseaux comme Internet, les systèmes de réseautage social et le World Wide Web. Elle s’explique par le fait que le nombre de liens potentiels dans un réseau avec n nœuds est n(n − 1) /2, fonction équivalente à n²/2 pour n tendant vers l’infini (source : Wikipedia)