À l’occasion de la 5e édition de l’université du numérique, le MEDEF et le BCG révèlent une analyse exhaustive et inédite de la maturité digitale de la France dans la compétition mondiale*. Cette étude internationale montre que la France tient des positions solides sur plusieurs dimensions essentielles de la transformation numérique, mais elle révèle aussi de vraies faiblesses. Le MEDEF et le BCG proposent également des recommandations afin que notre pays rejoigne le groupe de tête dans cette compétition décisive pour notre croissance et notre souveraineté.

  1. Quatre points forts positionnent la France à l’avant du peloton :

– la qualité de la formation des talents digitaux avec notamment l’excellence de nos formations scientifiques : la France se situe entre la 6e et la 7e position des principaux classements mondiaux ;

– les incitations à la recherche : 20 % de la R&D des entreprises est supportée indirectement par le gouvernement grâce à des incitations, q’ui placent la France en 3e position mondiale ;

– la mise à disposition des données publiques : selon l’OCDE, la France se classe en 2e  position quantl’accès aux données et en troisième sur la disponibilité des données ;

– l’engagement de l’État pour la cybersécurité : la France est 8e pour l’indice global de cybersécurité, calculé par l’Union internationale des télécommunications (UIT).

  1. La France doit remédier à des faiblesses majeures pour se maintenir à l’avant du peloton avant de rejoindre le groupe de tête

Aujourd’hui, un tiers des PME en France déclarent que la transformation digitale n’est pas à leur agenda de cette année. À titre d’exemple, moins d’une entreprise sur cinq a adopté l’Intelligence artificielle (IA) dans sa stratégie. L’étude démontre qu’il y a trois principaux défis à relever par l’ensemble des acteurs politiques et économiques pour mobiliser et faire gagner l’ensemble de l’écosystème français :

– réussir à garder ses talents sur le territoire

Si la qualité des formations françaises est reconnue, l’étude pointe toutefois une réelle faiblesse quantitative en matière de talents digitaux, tant pour la formation initiale que pour la formation continue. On estime le déficit hexagonal à 200 000 personnes d’ici 2022. Ce phénomène est aggravé par des envies toujours plus grandes d’expatriation : 76 % des talents digitaux français seraient prêts à travailler à l’étranger, c’est neuf points de plus que la moyenne mondiale. Pour retenir ces derniers, de premières actions ont été engagées (assouplissement du marché du travail, visa « French Tech », plan d’investissement dans les compétences, projet de loi Pacte), mais la bataille des cerveaux et des compétences ne fait que commencer, quel que soit le niveau de qualification, dans un marché des métiers du digital très mondial.

« Une autre problématique dans le domaine des compétences digitales réside dans l’attractivité de la filière de formation et logiquement, dans l’attractivité des métiers concernés, prévient Christian Poyau, président du comité Mutations technologiques du MEDEF. Les jeunes femmes en particulier se tiennent à l’écart des métiers du numérique alors même qu’elles y ont toute leur place ! Nous avons un effort de sensibilisation et de conviction à faire collectivement pour les accueillir dans ce secteur pourvoyeur d’emplois. »

–  des capacités d’investissements dans les infrastructures limitées par le contexte réglementaire

La digitalisation des entreprises passe par l’accès au très haut débit, enjeu essentiel d’aménagement du territoire. Alors que, dans l’Hexagone, le plan « France Très Haut Débit » est encore inachevé, il faut poursuivre le déploiement de la fibre et engager rapidement celui de la 5G. Or, les politiques publiques ont aujourd’hui tendance à freiner les investissements (concurrence, impôts productifs, prix des licences).

– une stratégie data trop timide

Côté entreprises, le rapport pointe un retard dans la collecte et l’exploitation de la donnée, en raison notamment d’une application trop restrictive du cadre légal (RGPD notamment). Ces contraintes pèsent dans la montée en puissance des applications d’IA pour les entreprises. Les pionnières, qui ont investi tôt dans l’IA, dégagent désormais des marges de manœuvre leur permettant d’accélérer davantage et de creuser l’écart : 88 % d’entre elles ont augmenté leurs investissements IA par rapport à l’an dernier, contre moins des deux tiers des autres entreprises.

  1. Les principales recommandations pour rejoindre le groupe de tête

Dans cette course contre la montre, les États-Unis et la Chine se sont déjà échappés : les 20 plus grandes entreprises du digital sont soit américaines, soit chinoises. Autre exemple, les États-Unis comptent 151 licornes, la Chine 82 et l’Europe seulement 34.

« Certains pays comme Israël, le Canada ou Singapour ont mis en place des politiques volontaristes avec tou- jours le même triptyque gagnant : système éducatif et R&D de qualité, intégration des acteurs de l’innovation entre eux et effet d’entraînement. Pour rester dans le groupe de tête, la France doit donc se structurer autour de filières fortes et d’écosystèmes performants », déclare Vanessa Lyon, directrice associée au BCG, en charge du développement du business et du numérique à Paris.

Au-delà des enjeux purement économiques, rester dans le groupe de tête est un enjeu de souveraineté numérique pour la France. Les auteurs distinguent trois priorités :

– augmenter de 60 % le vivier de talents disponibles à horizon 2022 ;
– faire évoluer les régulations dans le secteur des télécommunications pour mettre en place une politique
– aider les entreprises à se doter d’une stratégie data pour collecter et exploiter les données en adéquation avec le cadre légal, sans surinterprétation.