La gestion des données s’inscrit désormais dans le quotidien des grandes entreprises. Bien que les PME commencent à se rendre compte de l’importance d’une gestion solide des données, cette pratique reste encore peu répandue. Selon une étude de l’Institut Yougov*, 6 dirigeants de PME sur 10 considèrent les données comme essentielles au développement de leurs activités. Et bien que 56 % des dirigeants pensent que les données permettent d’accroître l’efficacité des employés, leur gestion n’est pas la compétence la plus recherchée par les entreprises ; les principales qualités requises sont les aptitudes de collaboration (47%) et la créativité (39 %).
Cependant, les entreprises les plus performantes aujourd’hui sont celles qui sont capables d’anticiper les besoins du marché et de faire des prévisions. La gestion de données oblige alors les entreprises à repenser leur organisation interne.

Quelle organisation optimale pour la gestion de la donnée ?  

L’objectif de la gestion des données est de valoriser les informations : à la fois les aspects technologiques liés au déploiement d’outils spécifiques et organisationnels autour de la gestion des flux de données et des droits d’accès. Cette gestion couvre des activités aussi diverses que la collecte, le traitement, l’analyse, le stockage, l’archivage et la sécurité des données. Toutes les activités d’une entreprise sont concernées par les données – ventes, marketing, ressources humaines, achats, R & D, logistique, etc. La question est donc de savoir s’il convient d’opter pour une gestion des données inter-entreprises ou par activité ?

Intégrer l’apprentissage de la donnée aux programmes académiques

Au cœur de la gestion des données, le Data Manager est responsable de collecter, de traiter et d’organiser toutes les informations : données ouvertes, bases de données internes et externes, vidéos, audio. Il doit comprendre et structurer toutes ces données afin de les rendre compréhensibles pour l’ensemble des collaborateurs.

Certaines écoles ont créé des doubles diplômes, comme le Master Data Science for Business lancé par HEC et l’École Polytechnique, combinant un cursus d’ingénieur pour le savoir technique et une formation en commerce pour la compréhension des affaires. Plusieurs programmes académiques proposent des formations à destination des étudiants et des professeurs afin de combler le déficit de compétences en matière d’alphabétisation de la donnée. L’idée n’est pas de consacrer un cours entièrement dédié à l’apprentissage de la data mais d’intégrer cela à des cours déjà existants. Pour y arriver, les mentalités du personnel enseignant, des directeurs de programmes et surtout de certains doyens d’universités doivent évoluer. Par exemple, Sciences Po Grenoble et Media Institute ont créé l’« Executive Master Data & Marketing » en 2018, visant à accompagner les professionnels du marketing à utiliser la donnée et à  développer des projets dans leur entreprise.

Parallèlement, de nombreuses initiatives ont vu le jour permettant à des communautés de partager leurs savoir-faire et d’avoir un impact social grâce à l’utilisation des données. Nul besoin d’être instructeur dans un département Informatique pour se sentir concerné par les données.

L’urgence pour les collaborateurs d’acquérir des compétences en analyse des données

Pour anticiper et prévoir leurs actions, les collaborateurs doivent maîtriser les données. Cette compétence est nécessaire pour appuyer la prise de décision factuelle et permettre aux utilisateurs d’explorer et d’expérimenter les données afin de découvrir des opportunités futures. Ainsi, tous les collaborateurs doivent acquérir des compétences en analyse de données pour visualiser les résultats, les contextualiser pour les comprendre et en tirer des conclusions. Selon l’étude de Yougov, 62% des cadres interrogés reconnaissent que les jeunes recrues possèdent de meilleures compétences en analyse de données que la génération précédente, en particulier lorsqu’elles viennent d’écoles d’ingénieurs ou d’écoles numériques (71%). Cependant, plus d’un dirigeant sur trois (39%) déclare avoir des difficultés à trouver des employés possédant de bonnes compétences en analyse de données. Selon eux, ces difficultés proviendraient principalement d’un manque de formation/compétences (25%) et de la rareté de ce type de profil (15%).

L’alphabétisation de la donnée dès l’école primaire

Selon IDC, d’ici 2025, la sphère mondiale des données passera à 163 zettaoctets, soit dix fois plus que les données générées en 2016. Il est donc primordial de veiller à ce que tout le monde puisse comprendre les données qui les entourent. En prenant cela en compte au sein des entreprises, mais aussi dans la vie quotidienne avec de plus en plus d’images graphiques, de tendances illustrées par des chiffres et des données économiques, il apparaît pertinent d’enseigner la lecture et l’analyse de données dès l’école primaire au même titre que le codage informatique ou une langue étrangère. Les écoles doivent ainsi s’assurer que leurs élèves acquièrent un certain niveau de compétences analytiques, peu importe le domaine d’études.

Fondement de toute activité, la maîtrise des données ne consiste pas seulement à lire les chiffres, mais aussi à leur donner un sens. Contextualiser les données ne doit plus être la prérogative des analystes et des scientifiques, mais l’affaire de tous.


* Enquête menée par YouGov, cabinet international d’études de marché, auprès de 401 dirigeants dans diverses PME en France, du 10 au 16 octobre 2018

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Thierry Driver est Responsable du Programme Académique EMEA chez Tableau