A quoi sert OpenStack ? Avec la firme DigitalFilm Tree, la communauté dispose d’un exemple exceptionnel qui préfigure certainement les futures manières de travailler dans l’industrie cinématographique. C’était l’un des utilisateurs phares de la première journée de l’OpenStack Summit de Vancouver qui débutait lundi soir à 18 heures.

Pour produire simplement 44 minutes de film prêtes à être diffusées, ce sont en moyenne des dizaines d’heures de rush qui sont gérées par les responsables de l’éditorial. La solution ? Passer par un service sur mesure hébergé dans le cloud. Piloté à distance, celui-ci distribue le travail, l’ensemble des rushs étant raffiné par plusieurs monteurs en parallèle selon des méthodes bien définies à l’avance. A Hollywood, cela existe déjà et c’est le rôle d’une des firmes mises en avant à l’occasion de l’OpenStack Summit.

DigitalFilm Tree, cette entreprise spécialisée en post-production pour la télévision et le cinéma, a fait des images numériques son univers de travail. Comme ses consœurs dont Hollywood fourmille, elle propose le tournage initial, l’édition, la création d’effets spéciaux, de post-production, et l’examen et le montage par ses nombreux collaborateurs. Pour s’échanger les documents, en toute sécurité et en garantissant l’interopérabilité entre les « nuages » où sont traitées les images, ce sont les outils open source d’​​OpenStack qui sont utilisés. Ils  permettent à DigitalFilm Tree de répartir les charges de travail. Guillaume Aubuchon, (photo)  guillaumeun californien pur souche, un représentant affable sur l’open source, présent sur scène, a dirigé depuis une dizaine d’années le développement de nouveaux systèmes de caméra, de  logiciels d’édition et de solutions de stockage de films numériques, de plus en plus importants. Comme directeur technique (CTO)  de DigitalFilm Tree, il se concentre sur la mise  en service de workflows à base de fichiers numériques pour des émissions de télévision connues aux USA telles que Nip / Truck, The Sarah Silverman Program, et NCIS Los Angeles dont c’est la septième saison (image-ci dessous avec les deux acteurs vedettes de la série). Il travaille à Los Angeles et gère aussi des  projets de longs métrages commeceux de Spike Jonze. « J’ai parfois l’impression que l’on fait de la sculpture. On démarre d’un gros bloc de granit et puis on n’en finit pas de le dégrossir et d’affiner la matière première. Chaque directeur de production, chaque intervenant apporte son savoir-faire. La réduction des rushs est énorme. L’économie réalisée lors de ces échanges est fondamentale, on parle avec nos outils de milliers de dollars par minute économisés et la sécurité des droits d’auteurs est devenue prioritaire. Pour cela, l’affaire du piratage de Sony Picture par les coréens nous a fait « un bien » fou, on est devenu célèbre en quelques jours, car notre savoir faire, c’est justement le partage de films sécurisés en cours de montage. Il faut éviter les fuites. L’objectif, c’est de faire circuler l’information de façon transparente entre les différents responsables, en utilisant les ressources nécessaires à chaque étape, tout en maintenant la sécurité de bout en bout avec un point de contrôle d’identité unique, c’est l’intérêt de la formule de fédération qui est proposée dans la dernière version d’OpenStack » précise Aubuchon. Interrogé sur le matériel utilisé, la taille des fichiers et les raisons pour lesquelles la firme ne propose pas un logiciel complet prêt à l’emploi et revendu par des hébergeurs, Guillaume Aubuchon ne fait pas dans la langue de bois.

Des développements autour des différents modules d’Openstackncis-los-angeles-cbs-season-4-2012

« On a eu des demandes par la chaine HBO pour porter nos outils dans Amazon AWS et on l’a fait en 3 semaines et demi. Mais cela reste leur outil. De notre coté, l’offre complète reste encore en cours de développement et d’amélioration, on est six spécialistes OpenStack à travailler dessus. On a perfectionné notre manière  d’utiliser OpenStack  avec spécifiquement Swift (stockage), Nova (calcul), Keystone (gestion des accès)  et Neutron (distribution en réseau). Pour les fichiers, on fait déjà de la 4K, (soit une définition de 3 840 pixels par ligne pour 2 160 lignes. Soit un total de 8,3 mégapixels par image pour un ratio de 16:9) alors que personne ne s’en sert encore. Mais on sait faire aussi de la 8K et répondre à des  exigences d’effets spéciaux complexes. Bien sûr, plus c’est lourd, plus cela impacte les débits. Ainsi les images de la série TV Unreal qui sont tournées actuellement à Vancouver, sont montées dans l’après-midi 2000 kilomètres plus loin à Los Angeles et renvoyées dans la soirée au Canada. Les fichiers passent par un broker de services télécom. Si on a des débits limités, cela nous retarde. Pour le traitement, on a un système puissant de chez Hitachi qui gère 32 To de Ram, il dispose d’un nombre de GPU important. On a eu avant pas mal de serveurs en Grid qui ne faisaient pas le poids. Pour le stockage on a donc utilisé Swift pour HBO mais l’on sait exploiter CEPH (Red Hat) ou Cinder.» La firme cherche d’abord a faire croître sa réputation en tant que leader technique dans le domaine de la post-production, en particulier, en démontrant les possibilités et les avantages de son offre dans le cloud. Mais elle n’a pas, a priori, l’intention de devenir un vrai éditeur de logiciels. Les flux de travail sont donc répartis sur plusieurs clouds privés, avec un nœud à Vancouver, un nœud à Los Angeles, et un troisième nœud éditorial. La firme pourrait bientôt étendre ses flux au-delà de ses clouds privés, en proposant une partie mobile via le cloud publique de HP et le fournisseur de clouds privés, Blue Box.