La donnée est souvent perçue comme le problème d’un autre plutôt qu’une opportunité pour chacun.

Cela n’est pas surprenant, étant donné l’immense quantité d’informations générées par des entreprises, même de tailles modestes, ainsi que la difficulté apparente qu’elles ont à transformer ces données en informations exploitables. Cependant, le problème ne concerne pas seulement les volumes de données ou la complexité des outils d’analyse. La difficulté réside dans le manque d’intégration des différentes sources de données et les technologies qui permettent de transformer les informations brutes en données exploitables.

Si, comme l’observait Clemenceau, la guerre est trop importante pour être laissée aux généraux, alors les données sont beaucoup trop précieuses pour être laissées aux analystes et scientifiques de la data. Si les entreprises peuvent libérer leurs données et les rendre accessibles à tous, elles peuvent améliorer leur proximité avec les clients, transformer leurs opérations, débloquer de nouvelles opportunités de revenus et élaborer de nouvelles stratégies basées sur leurs importantes bases de données.

Lacs et silos

Pour comprendre les notions de lacs et de silos, il faut s’imaginer une entreprise établie, comme un vieux bâtiment. Une construction belle et robuste a pu bien servir ses occupants d’origine mais elle présente de gros inconvénients par rapport aux besoins d’une entreprise moderne : comment y intégrer un environnement open space et y implémenter un réseau Wi-Fi performant ?

De même, pour tirer parti de la toute la puissance des données : les systèmes hérités (legacy) ne sont généralement pas conçus pour gérer, analyser et partager des informations de manière évolutive et agile. Les fréquents obstacles à la mise en œuvre d’analyses sont, notamment, le manque de rapidité dans l’ingestion et le traitement des données, les multiples silos de données, le manque de fonctionnalité de libre-service et d’outils nécessaires pour maîtriser, et donc monétiser, le Big Data.

Le défi auquel sont confrontées la plupart des entreprises n’est pas lié à la taille des ‘data lakes’ (lacs de données) qu’elles traitent, mais à l’abolition des frontières entre les différentes sources d’informations. Ces obstacles sont, par exemple, les multiples emplacements physiques des silos de données, une infrastructure informatique complexe, de nombreux processus métier, les applications et les flux de travail, les règles de l’entreprise, ou encore la séparation entre les charges de travail opérationnelles et analytiques.

À titre d’exemple, une entreprise cliente dans la logistique entreposait des données en silos sur plusieurs départements, secteurs d’activités et unités opérationnelles. Elle devait fournir beaucoup d’efforts pour tenter de gérer le problème redondant de la préparation des données. Les discussions tournaient en débats sur l’exactitude des chiffres plutôt que sur la définition d’une stratégie à partir de la base de connaissances.

Ce réseau complexe lié à des systèmes hérités et à des méthodes de travail ayant fait leur temps, constitue un obstacle majeur à l’analyse, au partage et à la monétisation des données. La solution, cependant, n’est pas de démolir tout ce qui a été bâti pour ensuite tout reconstruire, mais plutôt d’abattre les barrières internes qui empêchent l’entreprise d’exploiter toute la puissance de l’analytique.

Abattre les barrières

Fût un temps où les choses étaient plus simples. Chaque division avait seulement à se soucier de la collecte et de la gestion de ses propres données. Le département des ventes ne regardait que le nombre d’unités déplacées tandis que la finance gérait les recettes.

Aujourd’hui, de précieuses données structurées ou non-structurées, sont générées à partir d’un nombre bien plus important de sources de données : des systèmes CRM aux médias sociaux, des points de vente aux appareils mobiles des clients, et de l’Internet des Objets aux plateformes marketing. Tous ces éléments peuvent fournir des informations pour l’opérationnel et la stratégie dans chaque département de l’entreprise, mais uniquement si les données brutes peuvent être libérées des contraintes de leurs silos individuels, transférées dans un format utilisable, en plus d’être contextualisées et visibles en temps réel.

La solution consiste à construire un data lake unique qui stocke toutes les informations générées et collectées par l’entreprise. Ce « lac » agit tel un réservoir, d’où l’information est canalisée dans les divers moteurs d’analyse, les plates-formes d’intelligence business (BI) et les outils de visualisation qui transforment les données brutes en base de connaissance exploitable.

En plus de créer un seul « lac », les entreprises doivent également adopter les bonnes pratiques de « Master Data Management » (MDM) pour tendre vers une vision à 360 degrés des ressources de données et gérer la tâche très complexe de collecte, de nettoyage et d’analyse des informations. Cela inclut également la construction de taxonomies pour les différents domaines de données, leur intégration avec des outils de visualisation, mais aussi des portails en libre-service afin que chaque employé puisse accéder aux informations dont il a besoin.

En combinant toutes les données d’une organisation dans un seul référentiel, les entreprises peuvent abattre les barrières existantes entre les équipes et les silos de données, permettant à tous l’accès à une vaste gamme d’informations et d’idées pour identifier et exploiter de nouvelles opportunités.

Pour revenir au cas précis de cet acteur de la logistique : ses données ont été ramenées dans une couche sémantique d’entreprise interfonctionnelle, avec des objets métier standardisés, pour créer une plate-forme sans silo. Aujourd’hui, le client peut créer des aperçus contextuels, standardisés et exploitables permettant une meilleure conversion des opportunités de revenus, en respectant les règles commerciales et en améliorant l’efficacité opérationnelle.

Des données aux dividendes

À l’ère de l’information, la donnée représente le pouvoir. Ceux qui peuvent en rassembler davantage, l’analyser plus efficacement et l’exploiter plus rapidement auront un énorme avantage sur leurs concurrents.

En supprimant l’organisation de la donnée en silos, les entreprises amélioreront grandement la collaboration interne et le partage d’informations entre les départements et les applications. Elles prendront conscience de la pleine dimension de leur métier et de leurs opérations. Elles seront plus à même d’exploiter de nouvelles opportunités commerciales, de développer rapidement de nouveaux produits et services, d’approfondir la connaissance de leurs relations clés et de détecter les corrélations qui éclaireront leur stratégie future.

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Srinivasa Gopal Sugavanam est Associate Vice President–Data & Analytics Practice chez Infosys