Dans le monde numérique, les GAFA – Google, Amazon, Facebook et Apple – constituent le fer de lance des sociétés américaines et imposent leur tempo. Les NATU les suivent de près.
Dans l’univers des GAFA, Apple joue le rôle de vétéran car la firme à la pomme a été créée en 1976. Mais Apple a eu deux vies, rythmées par celles de Steve Jobs. La première était celle d’un constructeur micro-informatique qui fabriquait des PC baptisés Mac, la seconde au début des années 2000 relancée avec l’iPod, puis l’iPhone, l’iPad et plus récemment l’Apple Watch. Les trois autres – Google, Amazon, Facebook – sont des sociétés nées dans la vague Internet. La capitalisation boursière des seuls GAFA dépasse largement celle des 40 du CAC40 : 1700 euros pour les premiers contre 1200 euros pour les seconds.
Depuis quelques années, on assiste à une nouvelle vague de numérisation avec quatre nouveaux champions : Uber, Airbnb, Tesla Motors et Netflix connus sous l’acronyme NATU et qui tous, sont basés en Californie. Une expression a émergé pour traduire ce phénomène, de l’expression du patron de Publicis dans une interview au Financial Times en décembre 2014, mais on pourrait tout aussi bien parler de l’ « Airbnbirisation », de « Teslarisation » ou encore de « Netflixrisation ».
« Tout le monde commence à craindre de se faire Ubériser. C’est l’idée qu’on se réveille soudainement en découvrant que son activité historique a disparu… Les clients n’ont jamais été aussi désorientés ou inquiets au sujet de leur marque et de leur modèle économique », expliquait alors Maurice Levy.
Uber peut-elle se faire Ubériser ?
Dans cette révolution numérique, Uber est la société de la démesure. Ce parcours fulgurant s’est traduit par une valorisation boursière record de plus de 60 milliards de dollars, supérieure à celle de General Motors ou de Ford. En quelques années, Uber est devenu la première compagnie de taxis mondiale ou plutôt de commande de voitures avec chauffeur.
Les services qui ont été ouverts en France
- UberX, chauffeurs professionnels proposant des berlines standards ;
- Uber Berline, chauffeurs professionnels proposant des berlines de luxe ;
- UberVan, chauffeurs professionnels proposant des vans (capacité 6 personnes) ;
- UberPOP, conducteurs particuliers occasionnels au volant de leur véhicule personnel (service suspendu en France depuis le 3 juillet 2015) ;
- UberPool, permettant de partager son trajet avec un autre passager situé au même endroit et allant dans la même direction.
Du coup, face à cette réussite insolente, les concurrents d’Uber se sont coalisés afin de prendre des positions maintenant avant que cela devienne trop difficile. Quatre des principaux concurrents d’Uber viennent de conclure une alliance, l’américain Lyft, le chinois Didi Kuaidi, l’indien Ola et le singapourien GrabTaxi. Chacune de ces quatre entreprises va mettre sa plateforme à disposition de ses alliés permettant de commander une voiture depuis n’importe quelle application et d’être pris en charge jusqu’au paiement.
Principalement implanté aux Etats-Unis, Lyft met les bouchées doubles pour essayer de rattraper son retard et chercherait à lever jusqu’à 1 milliard de dollars, selon le Wall Street Journal. Le quotidien précise que le dépôt d’un tel fichier suggère que la société serait proche de boucler son tour de table. Une opération qui, s’il allait à son terme, valoriserait l’entreprise à près de 6 milliards de dollars, dix fois moins que son concurrent direct Uber.
Airbnb entre colère et conciliation
Fondée en 2008 à San Francisco, Airbnb (d’abord sous le nom d’Airbedandbreakfast.com) fait état de plus de 1,5 million d’annonces dans 34 000 villes et 192 pays, autrement dans quasiment le monde entier. Airbnb a suivi un développement comparable mais soulève moins d’hostilité qu’Uber face aux taxis. Néanmoins, le secteur hôtelier, les municipalités et les riverains ne voient pas toujours d’un très bon œil cette concurrence ou cette activité proche de chez eux. Le secteur hôtelier y voit souvent une concurrence déloyale car les particuliers ne sont pas soumis aux mêmes contraintes et de payent pas les mêmes taxes.
C’est sans doute lui a fait reculer la SNCF, via sa filiale Voyages-SNCF, dans son projet d’accord avec le loueur de logement pour une offre jumelée transport/logement. A cette occasion, la SNCF publiait un communiqué stipulant que « Face à l’incompréhension créée par la promotion ponctuelle de Voyages-sncf.com avec Airbnb, Voyages-SNCF.com a décidé d’arrêter l’opération en cours et de prendre le temps du dialogue avec l’ensemble des professionnels de l’hôtellerie afin d’analyser les conditions dans lesquelles les nouveaux modèles d’économie collaborative peuvent contribuer à la relance du tourisme en France. »
De leur côté, les municipalités sont très attentives au développement de cette activité de location. Car d’un côté, c’est là une offre alternative de nuitées qui favorise le tourisme mais de l’autre, elle doit subir la pression des hôtels qui ne manquent une occasion de manifester leur mécontentement. A Paris, depuis le mois d’octobre, les particuliers collecte la taxe de séjour pour la municipalité. La ville de Barcelone vient de mettre à exécution la menace en sanctionnant Airbnb et son concurrent Homeaway pour avoir proposé des appartements non-inscrits – au total près de 5000 logements – au registre du tourisme de Catalogne. Depuis quelques temps, un sentiment de colère des habitants de la capitale de la Catalogne face à un tourisme totalement débridé.
Avec 27 millions de touristes par an, Barcelone est la troisième ville d’Europe la plus visitée après Londres et Paris. Selon l’organisation professionnelle des hôteliers espagnols, les plates-formes collaboratives regroupe près de 140 000 lits soit presque le double de l’offre conventionnelle. A Paris, dans certains quartiers comme l’Ile Saint-Louis, des riverains expriment leur mécontentement face à un bal incessant de visiteurs au nombre sans cesse croissant. Certains experts expriment l’idée d’une sorte de numerus clausus. L’entreprise ne publie pas ses résultats mais des estimations font état d’un chiffre d’affaire avoisinant le milliard de dollars avec des pertes importantes.
Netflix : du DVD au streaming
Dans ce groupe, Netflix fait office de vétéran puisque l’entreprise est née en 1997 en s’appuyant sur les services de La Poste et le DVD. C’est en 2010 que l’entreprise basé à Los Gatos (Californie). C’est en 2010 que Netflix propose un service de film en streaming pour les ordinateurs sous Windows et Mac OS, ainsi qu’un certain nombre d’appareils compatibles (Xbox 360, PS3, Wii, Wii U, iOS). Il est d’ailleurs à noter que c’est à partir de ce moment que l’action a commencé à grimper pour atteindre les 116 dollars soit une valorisation avoisinant les 50 milliards de dollars.
Aux heures de pointe, c’est-à-dire en soirée, Netflix capte près du tiers de la bande passante de l’Internet aux Etats-Unis. Le développement de Netflix a été plus lent qu’Uber ou Airbnb. En 2000, c’est-à-dire trois ans après sa création, Netflix a été proposé à Blockbuster, le leader des locations de vidéos aux Etats-Unis de l’époque, pour un montant de 50 M$. Mais l’opération n’est pas allée à son terme. Netflix s’est alors introduit en bourse, 5 ans seulement après sa création. Netflix a développé un algorithme très pointu pour connaître les goûts de ses clients et leur faire les suggestions les plus adaptées.
Evolution de l’action Netflix depuis son introduction en bourse
Autre différence de taille avec les trois autres du groupe NATU, Netflix est une entreprise qui fait des bénéfices. C’est le cas depuis 2010 avec une année un peu difficile en 2012 où l’entreprise n’a dégagé que 17 M$ pour un CA de 2,7 milliards de dollars. Fin 2014, elle faisait état de 57 millions de souscripteurs à ses services de streaming.
Malgré un développement à l’international, Netflix reste une société fortement orienté sur les Etats-Unis marquant ainsi une adhérence assez forte entre les pays et les contenus. Le chiffre d’affaires réalisé aux Etats-Unis représente 76 % du CA total réparti en 62 % pour le streaming et 14 % pour les échanges de DVD. Installé en France depuis septembre 2014, Netflix s’installe dans le paysage audiovisuel français mais est loin de renverser la table.
Tesla Motors, un constructeur venu de nulle part
Si elle cotée en bourse comme Netflix, Tesla Motors présente la particularité, par rapport aux 3 autres membres du groupe NATU, de fabriquer des produits, en l’occurrence des voitures. Pour l’heure, Tesla Motors joue un rôle marginal dans la production automobile mondiale avec une part de marché de 0,02 %. Malgré ses pertes récurrentes et des ventes relativement faibles en unités, Tesla Motors est valorisé à près de 30 milliards de dollars. A titre de comparaison, General Motors et Ford sont cotées respectivement à 55 milliards de dollars. Tesla emploie 12 000 salariés et a réalisé une chiffre d’affaires de 3,2 milliards de dollars en 2014 (+ 60 %) et des pertes de 294 M$. La présence de Tesla dans ce groupe est assez surprenante dans la mesure où elle n’appartient pas au secteur de technologies de l’information ou de l’Internet.
La firme de Palo Alto est dirigée par le Charismatique Elon Musk qui est aussi à l’origine de la création de Paypal et de SpaceX qui pourrait révolutionner le lancement des fusées. Pour la première fois de l’histoire des lanceurs, l’étage principal a été récupéré de la fusée après avoir mis en orbite onze satellites. Toutefois, avant de mesurer la dimension de cette performance, il faudra savoir combien coûtera la remise en route de l’étage.