Slack accuse Microsoft de pratiques anti-concurrentielles auprès des autorités européennes et reproche au géant américain de lier intimement à la galaxie Office étouffant ainsi la concurrence. Une accusation qui rappelle de vieux souvenirs…
Lorsque Microsoft Teams est apparu sur le marché, Slack s’était officiellement réjoui de voir le géant américain venir ainsi valider son concept et l’importance pour les entreprises de disposer d’un hub de collaboration basé sur les messages instantanés.
Puis, la concurrence s’avérant farouche, les discours ont évolué vers « Teams n’est pas un concurrent de Slack » à des complaintes de plus en plus récurrentes de concurrence déloyale.
Hier, Slack a officiellement porté plainte contre Microsoft auprès des autorités antitrust européennes. L’éditeur reproche à Microsoft de « bundler » Teams avec Office 365. Une approche Bundle jugée injuste et nuisible à la concurrence. Bref, Slack reproche à Microsoft de revenir à certaines pratiques ancestrales. WordPerfect avait déjà intenté dans les années 2000 un procès à Microsoft. L’intégration de « Media Player » dans Windows avait engendré toute une procédure en Europe et conduit Microsoft à proposer une version « N » de Windows dont personne n’a jamais voulu. Et l’intégration d’Internet Explorer dans Windows avait également conduit à plusieurs procédures en France et aux États-Unis dont une retentissante qui s’étendra de 1998 à 2002 et qui conduira à une surveillance intensive de la firme de Bill Gates par le département américain de la justice (le DOJ) durant 10 ans. Cette « surveillance » va considérablement freiner l’innovation chez Microsoft durant les années 2000 et explique en partie pourquoi le géant de Redmond n’a loupé le train de la mobilité (selon Steve Ballmer). Microsoft a été régulièrement épinglé par l’Europe pour des pratiques jugées anticoncurrentielles (la dernière sanction datant de 2013 pour 561 millions de dollars) ;
Slack reproche à Microsoft de pratiquer avec Microsoft 365 et Office 365 les mêmes techniques anticoncurrentielles qu’à la fin des années 1990. Il est vrai que Teams est devenu un hub très central au cœur de l’offre Office 365 même si son usage est totalement optionnel. Le problème, c’est que la crise pandémique a encouragé les entreprises à s’intéresser un peu plus à Teams en raison de ses fonctionnalités de visioconférences. Teams et Zoom sont les deux grands gagnants du confinement général du monde ! Slack ne disposait pas à l’époque de telles fonctionnalités. L’adoption massive de Teams (qui est passé de 44 millions d’utilisateurs à 75 millions d’utilisateurs entre mars et avril) pour les besoins de visioconférence et de collaboration renforcée durant ces derniers mois a mis en danger Slack qui voit ses marges de manœuvre désormais plus réduites.
Selon Slack, « Microsoft a illégalement lié son produit Teams à sa suite de productivité Office dominante sur le marché, en le forçant à l’installer pour des millions de personnes, en bloquant sa suppression et en cachant le coût réel pour les clients de l’entreprise ». Une affirmation qui n’est pas tout à fait véridique. Teams est un service Web, certes intégré à Office 365, mais dont l’installation n’est pas « forcée » et l’usage totalement optionnel. Et le client Teams n’est ni imposé ni impossible à désinstaller.
Dans une conférence de Presse, David Schellhase, Avocat Général chez Slack, précise que « Microsoft a créé un produit médiocre, une pâle copie de Slack, et l’a lié à son produit Office dominateur du marché, reproduisant son comportement illégal de l’ère de la guerre des navigateurs. Slack demande à la Commission européenne de prendre rapidement des mesures pour s’assurer que Microsoft ne puisse continuer à exploiter illégalement sa puissance d’un marché à l’autre en regroupant ou en liant des produits ». Il a également indiqué que Slack avait entamé des « conversations » avec les autorités américaines sur les comportements de Microsoft autour de Teams.
Une affaire à suivre qui ne fait que commencer…