Dans son rapport sur la transformation numérique de l’économie française, Philippe Lemoine ne pouvait pas ne pas aborder le phénomène des big data qualifiée de « vrai gisement de valeur dont les entreprises doivent se saisir à tout prix ». Sachant que la data est un « sujet offensif, business, de compétitivité et d’amélioration continue et non pas défensif, ni technique ». On se souvient de la formule selon laquelle le « pouvoir réside dans celui qui détient l’information » et qui malheureusement, constate le rapport s’applique aussi au phénomène des big data : « capter des données est aujourd’hui une évidence, les partager l’est beaucoup mois ».

Si le sujet est devenu relativement courant, le rapport Lemoine point les faiblesses des entreprises françaises dont « l’immense majorité n’a pas encore saisi l’importance de l’exploitation des données directes ou indirectes générées par leur activité ».

Le big data est un projet au même titre que beaucoup d’autres projets IT et il semblerait que les entreprises commettent toujours les mêmes erreurs ou ne fassent suffisamment attention aux mêmes questions : la conduite du changement, la formation en interne et la mise en place d’une gouvernance pour piloter le projet. Et tous ces points sont plus importants que de se doter d’un Data Scientist d’un CDO (Chief Data Officer). Il est à noter que l’Etat français est précurseur dans ce domaine puisqu’il a créé un tel poste en son sein (L’Etat créé la fonction d’administrateur général des données).

Face à ce tableau assez sombre, la deuxième édition du Big Data Index publié le mois dernier par IDC et EMC montre des progrès significatifs tant dans la compréhension du sujet que dans la mise en œuvre de projets. Un peu plus de 4 DSI sur 10 ont mis en œuvre un projet big data contre seulement 7 % en 2012.

La compréhension des priorités évolue également. Alors qu’en 2012, les entreprises s’intéressaient avant tout à l’analyse et au stockage de grosses volumétries, en 2014 elles se concentrent sur l’interrogation des données et la vitesse de traitement. Le temps réel est un besoin fort pour plus d’une Direction marketing sur 2 (53%) en 2014. Ce besoin est porté par la volonté de renforcer l’innovation et d’améliorer les gains de productivité.

Selon l’étude, les entreprises françaises ne sont pas encore conscientes de la quantité de données disponibles, ni des analyses qu’elles peuvent en faire. Ces données sont également peu valorisées car 70% des données restent encore inexploitées. Il est également important de noter la distinction entre les données structurées, semi-structurées et non-structurées. Sur le tiers des données analysées, 88% d’entre elles sont des données structurées.

 

Les propositions du rapport Lemoine relative aux données
INDUSTRIE
– Offrir de nouveaux produits et services en sensibilisant les industriels sur l’intérêt d’investir ou de co-investir dans les dispositifs de captation et d’exploitation des données des clients finaux
– Développer l’intelligence des infrastructures industrielles en réseau en s’appuyant sur les objets connectés et les drones
– Améliorer les chaînes de production et les services de maintenance en sensibilisant les industriels sur l’intérêt d’investir ou de co-investir dans les dispositifs de captation et d’exploitation des données
– Améliorer l’efficience de la production grâce au big data (exemples!: non-qualité, pilotage des procédés, maintenance prédictive)
– Investir dans une stratégie industrielle de cyberdéfense soutenue par l’État pour des raisons de souveraineté

SERVICES FINANCIERS
– Permettre aux clients de disposer d’outils de gestion de finance personnelle pouvant s’alimenter de leurs données bancaires issues de différentes banques
– Développer des modèles prédictifs d’identification pour lutter contre la fraude et le blanchiment d’argent (Big Data)

COMMERCE
– Lancer un infomédiaire de confiance mutualisant les historiques de données d’achats, accessibles à un écosystème plus large (start-ups, associations, etc.)
– Créer une alliance entre des acteurs traditionnels du commerce et des entreprises du monde des objets connectés

MOBILITÉ DES PERSONNES
– Construire une bibliothèque publique d’API regroupant les données de mobilité des pouvoirs publics et des entreprises volontaires, ouverte aux start-ups pour proposer de nouveaux services innovants

SANTÉ
– Mettre en place des procédures d’agrément des chercheurs aux données individuelles de santé dans des environnements de confiance sécurisés, en s’inspirant du Centre d’Accès Sécurisé Distant aux Données

EMPLOI
– Mettre en place une plateforme open data des données RH anonymisées d’entreprises et des organismes publics pour développer les capacités d’analyse et de nouveaux services (ex!: cartographie des trajectoires)

ÉNERGIE ET SERVICES À L’ENVIRONNEMENT
– Développer des capacités prédictives recourant au Big Data sur la consommation d’énergie
– Inciter, par des solutions financières et technologiques, les individus à réduire leur consommation en période de pics (effacement assisté par le numérique)