Géant des services de transport, l’application mobile Uber est internationalement connue pour mettre en contact des utilisateurs avec des conducteurs proposant des services de transport.

Les contestations récurrentes concernant la nature du service proposé par Uber et le statut avantageux applicable à ses chauffeurs ont conduit une association espagnole de chauffeurs de taxis à déposer, en mai 2014, une plainte contre la société.

Remontant jusqu’à la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE), la décision, très attendue, vient de tomber.

Toute la question résidait dans la détermination de la nature de l’application proposée, avec, comme conséquence sous-jacente, la détermination de la législation applicable à ses chauffeurs.

En effet, Uber s’est toujours revendiqué comme étant une plateforme internet, proposant des services à ses utilisateurs via une application mobile. Mais le changement de nature de l’application, et la reconnaissance de sa qualité de transporteur, a toujours été réclamé par les sociétés de taxis concurrentes, soumises à la législation spécifique, plus contraignante, des services de transport de personnes.

La Cour a ainsi décidé que « le service de mise en relation avec des chauffeurs non professionnels fourni par Uber relève des services dans le domaine des transports », et qu’en conséquence, les Etats membres de l’Union européenne peuvent ainsi « réglementer les conditions de prestation de ce service ».

Partant, l’avocat général Maciej Szpunar précise qu’Uber doit « posséder les licences et agréments requis par le droit national ».

En effet, la qualité de VTC des chauffeurs Uber présente de fortes différences avec les services de transports classiques.  La profession de taxi est réglementée, et sa spécificité par rapport aux VTC est de nécessiter une licence de taxi, soumise à l’obtention de l’examen du certificat de capacité professionnelle, et  entrainant l’application d’un régime fiscal spécifique. Le chauffeur de taxi peut choisir d’être propriétaire de sa licence, dont les coûts sont très élevés, et aura ainsi le statut de taxi indépendant, ou d’en louer une à un exploitant dont il sera salarié.

Le chauffeur Uber peut donc actuellement exercer son activité en étant libéré des contraintes pesant sur les chauffeurs de taxis, au premier rang desquelles l’obtention de la licence.

Pour autant, la décision de la CJUE ne modifie pas dans l’immédiat le statut applicable à Uber. Elle donne cependant le feu vert aux Etats-membres pour choisir de lui imposer une législation plus contraignante. La France conserve donc son autonomie concernant l’édiction des règles susceptibles de s’appliquer à l’entreprise américaine sur le territoire français.

Il s’agira de voir, dans les mois à venir, si le législateur français décide d’utiliser la brèche ouverte par la CJUE pour modifier le statut du chauffeur Uber, voire en étendre les restrictions aux autres services similaires concurrents.

 

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Antoine Chéron est avocat associé du cabinet ACBM