Selon Gartner, d’ici l’année prochaine 70% des entreprises s’appuieront sur l’approche de la gestion de la chaine de valeur (value stream management, VSM) pour améliorer leurs pipelines DevOps. Le VSM est le contrôle de bout en bout de la chaine de valeur interconnectée de l’entreprise afin de pouvoir délivrer des logiciels plus performants et d’optimiser la stratégie de l’entreprise. Le VSM est aujourd’hui un sujet brûlant dans l’univers du DevOps. Est-il réellement utile face aux outils existants ? Quel impact sur les développeurs ? Les autres services d’une entreprise peuvent-ils bénéficier d’une telle approche, basée sur les données ?

Cette approche est aujourd’hui encore souvent mal connue ou mal comprise. Pour que les entreprises puissent en tirer tous les bénéfices, il est important de les comprendre et de défaire certains mythes autour du VSM.

Mythe 1 : Le value stream management entre en conflit avec le DevOps

Avons-nous vraiment besoin d’un autre outil dans nos boites à outils DevOps ? Le VSM n’est-il pas un obstacle aux cycles de travail rapides et agiles ?

En réalité, le VSM et le DevOps sont de précieux alliés et non des adversaires. Si la pratique DevOps comprend la livraison de logiciels, l’approche VSM implique quant à elle le processus de mesure de la valeur de ces logiciels.

Le mouvement DevOps a révolutionné la livraison de logiciels, en permettant aux équipes de développement agiles de les livrer toujours plus rapidement. Mais aller plus vite n’est pas suffisant. Comment savoir si le logiciel a une réelle valeur pour les clients ?

C’est là que le VSM apporte une valeur ajoutée au cycle de vie DevOps. Cette approche aide les entreprises à mesurer la valeur des outils et des pratiques de DevOps. Elle vise à créer une structure utile pour améliorer les performances au sein de toute chaine de valeur, qu’il s’agisse de la livraison de logiciels ou d’autres secteurs de l’entreprise.

Parmi les avantages, les techniques de cartographie de la chaine de valeur (value stream mapping) peuvent aider les équipes à identifier des déchets ou des blocages, révéler des opportunités d’automatisation, et enfin débloquer le flux de valeur. Effectivement, le VSM permet d’identifier les étapes à entreprendre afin d’atteindre les résultats commerciaux attendus.

Mythe 2 : Le value stream management conduit à pointer du doigt les développeurs et à les traiter comme des rouages

Certains prétendent que le VSM donne à tous les acteurs de l’entreprise une trop grande visibilité sur les performances des équipes logicielles. Avec un accès aux analyses précises tout au long du cycle de vie, il est possible d’utiliser ces données et de désigner les groupes qui, selon eux, sont en retard ou créent des blocages.

Certes, cela pourrait être un problème pour certaines entreprises, mais ce n’est pas un moyen efficace d’utiliser les outils. Les solutions VSM peuvent mettre en lumière les blocages et les risques associés à une version logicielle. Souvent les retards sont dus à des raisons parfaitement valables, comme les autorisations excessives ou les outillages encombrants. Dotés de ces informations, les chefs d’entreprise pourront ensuite justifier les investissements en formation, les changements de processus, les nouveaux recrutements, …

Par ailleurs, de nouvelles techniques comme le « pair mapping » dans le cadre d’un atelier collaboratif peuvent contribuer à combler les lacunes des outils VSM, en aidant les collaborateurs à prendre du recul et éviter le piège de l’accusation.

Les approches VSM ont également été accusées de transformer la livraison de logiciels en une ligne d’assemblage d’usine, où les développeurs manquent d’autonomie et finissent par détester leur travail. C’est un autre point qu’il faut démystifier. Le value stream mapping a été créé en tant que processus d’automatisation industrielle lancé par Toyota, afin de supprimer les tâches manuelles chronophages que personne ne voulait faire, afin que les travailleurs puissent être plus créatifs et profiter au maximum de leur travail. L’objectif n’a jamais été de créer un lieu de travail morne et mécanique. En effet, le value stream management vise à permettre aux développeurs d’avoir plus d’autonomie et de maîtrise dans leur travail.

Mythe 3 : Les développeurs n’ont pas besoin de se préoccuper du VSM

Pour le développeur moyen, le VSM peut sembler un concept abstrait avec peu ou pas de rapport avec sa vie professionnelle quotidienne. Il peut alors se demander pourquoi il doit s’intéresser à la chaine de valeur.

La réalité est que les développeurs devraient s’en préoccuper, car une telle approche peut donner à leur travail un sens plus profond qui se traduit par une productivité en hausse. La vue d’ensemble de bout en bout que fournit le VSM peut, par exemple, aider les développeurs à comprendre clairement leur contribution à l’organisation au sens large. Lorsqu’ils réalisent que ce qu’ils font est productif pour l’entreprise, cela devient un puissant facteur de motivation et de satisfaction au travail. Non seulement ils comprennent mieux leur rôle au sein de l’entreprise, mais ils peuvent aussi observer les effets de leur travail, comme l’impact sur les clients.

Bien entendu, la mise en œuvre d’une approche VSM affectera les développeurs différemment selon la taille et la maturité de l’entreprise. Etant donné que les petites entreprises ont tendance à évoluer plus rapidement, parfois de façon désordonnée, cette pratique est susceptible d’apporter de la clarté parmi les développeurs, les mettant sur la même longueur d’onde.

En revanche, les développeurs au sein de grands groupes sont plus susceptibles de subir un ralentissement dans leur progression. Ils ont souvent besoin de quelque chose de nouveau pour relancer des initiatives innovantes et susciter l’enthousiasme. Pour de nombreux développeurs de ces groupes plus importants et complexes, le processus de value stream mapping est la première fois qu’ils voient le processus de bout en bout de l’entreprise.

Loin d’être une contrainte pour les développeurs, la pratique du VSM permet de donner du sens à leur mission et de rendre leur travail tangible. L’analyse de la création de valeur dans la livraison de logiciels demande à définir clairement ce qu’est la valeur dans l’ingénierie logicielle afin de pouvoir en créer pour apporter de la satisfaction aux clients. Les données obtenues par le VSM offrent ainsi aux décideurs de la visibilité sur le travail des développeurs, ce qui va améliorer leur relation et faciliter les échanges autour du développement des prochains logiciels.
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Par Tim Johnson, directeur marketing produit, CloudBees