L’IoT permet désormais de suivre des milliards d’objets. Le suivi est aujourd’hui manuel et réactif, mais de développement des réseaux IoT comme Sigfox permettent le déploiement d’une maintenance prédictive cognitive pour apporter plus de valeur aux objets et permettre d’économiser des milliards de dollars.

La réunion mensuelle de l’IOT Forum qui s’est tenue ce mois-ci dans les locaux de Nokia à Sunnyvale était consacrée aux différents aspects du  suivi des actifs principalement physiques dans un sens large, grâce aux vertus de l’Internet des objets et de l’Intelligence artificielle. Succédant aux présentations de 8 startups, trois sociétés exposaient leurs vues et leurs expériences en matière d’« Asset Monitoring ».

Vers une maintenance à distance prédictive et cognitive

Aujourd’hui, tous les secteurs de l’économie ont besoins de suivre des objets plus ou moins élaborés qui sont partie prenante de leurs activités. Pour Seth Page, Executive VP de Data RPM, société du groupe Progress qui développe des systèmes de maintenance prédictive, les innovations technologiques dans le domaine des capteurs à basse consommation et des télécommunications sans fil et la baise des prix des composants permettent maintenant de se donner des objectifs de suivi automatique à distance pour une infinie variété d’objets. Du seul fait d’être suivis ces objets se voient immédiatement attribués une valeur supplémentaire sachant que beaucoup sont mobiles, peuvent mal fonctionner, tomber en panne ou se perdre. Cependant, aujourd’hui, les systèmes de suivi ne s’appliquent qu’à une toute petite catégorie d’objets parce qu’ils jouent un rôle majeur dans un processus particulier (transport, fabrication, santé, fourniture d’énergie…).

« Selon un rapport de  McKinsey sur les IoT, explique-t-il,  seulement 1% des données générées par les systèmes de suivis d’objets ou de systèmes connectés sont utilisées. Ceci parce que ces informations sont destinées à détecter et contrôler les anomalies et ne servent pas à prévoir les pannes, ce qui apporterait une plus grand valeur. McKinsey pense que d’ici 2015, la mise en place de  suivis à distance des patients atteints de maladies chroniques pourrait permettre d’économiser 1,1 trillons de dollars par an, à condition d’utiliser pleinement les données… ».

Un Airbus en vol génère plusieurs teraoctets de données à travers les quelques 30000 capteurs dont il est équipé… Elles ne sont utilisées que pour détecter les  anomalies durant le vol ou à postériori en cas d’accidents. Dans l’ensemble, 80% des pannes d’objets sont donc considérées comme aléatoires et imprévisibles…

Set Page classifie la maintenance réactive parmi les processus manuels, dont le principal inconvénient est de ne pas être scalable. « Or, avec des milliards d’objets connectés, il faut introduire des modes intelligents d’apprentissage automatiques grâce à des systèmes de « méta » machine learning c’est- à-dire des systèmes d’apprentissages non assistés qui permettent d’atteindre une scalabilité à la hauteur du nombre des objets connectés. »  

La maintenance prédictive est connue et pratiquée depuis des années mais résout à peine 20% des problèmes parce que la plupart des modèles sont basés sur des échantillons. Mais il n’est pas possible de trouver assez de data scientistes pour  étudier les donner et mettre en place des algorithmes pour crée et maintenir des réseaux de neurones pour chaque objet à suivre…

Les modèles neuronaux deviennent obsolètes très rapidement à grande échelle parce qu’il est impossible de sortir de l’échantillonnage et les modèles doivent être renouvelés (retravaillés) sans cesse.  La maintenance cognitive prédictive, grâce à l’automatisation et la scalabilité, peut faire gagner plusieurs centaines de milliards de dollars par an sur chaque segment de l’IoT. Il reste cependant à développer les systèmes de machine learning « non assistés » plus performants, c’est-à-dire non basés sur des réseaux de neurones, qui puissent être implantés sur des processeurs basse consommation, capables de créer leurs propres modèles d’apprentissage dynamique pour être en mesure de prévoir des panne à partir d’anomalies qu’il aura pu identifier sur l’objet qu’il surveille.

Pour  Seth Page, le « Meta Learning » appliqué au Machine Learning permet au système d’apprendre automatiquement. Sa démarche cognitive sera basée sur l’expérimentation et l’apprentissage automatique grâce au partage avec d’autres systèmes qui suivent des objets identiques (c’est-à-dire que chaque système de meta learning communique avec les systèmes de même classe). Chaque panne est analysée et les données stockées pour être comparées automatiquement avec les données d’autres objets et entrer dans un système cognitif de machine learning, non assisté. Ceci conduit à une véritable industrialisation de la maintenance prédictive.

Cette démarche nécessitera aussi de labelliser les données de façon à rendre les modèles d’apprentissage capables d’opérer avec de larges quantités de données qui pourront être traitées par différents systèmes prédictifs. Cette démarche laisse ouverte un vaste champ d’innovations possibles… systèmes de machine learning non assistés, labellisation des données et  meta learning, interopérabilité des connexions entre les objets, mise en place d’un cloud des objets… Le secteur de l’automobile est particulièrement concerné alors qu’on parle de conduite automatique, de communications V2V (véhicule to véhicule), de V2I (véhicule to infrastructure)… Les  réseaux ne sont pas adaptés, aussi bien du point de vue des fréquences que des business modèles alors que la 5G devrait être opérationnelle d’ici 2 à 3 ans sous des formes et des modèles économiques qu’on n’a pas encore clairement définies aujourd’hui.


SigFox , Agilité, basse consommation et coûts réduits : une fenêtre de 2 ou 3 ans pour s’imposer sur ce marché de l’IoT

Beaucoup de problèmes subsistent donc du côté de la connexion des objets, plus particulièrement pour des raisons de consommation électrique. Ramzi Alharayeri, directeur des ventes chez Sigfox aux Etat Unis, explique que Sigfox offre la couche de connectivité dont on besoin les objets connectés dans un objectif de suivi et de  maintenance. Il pose la question suivante « : Vous avez un certain nombre d’actifs physiques qui font partie de votre vie quotidienne (une voiture, un vélo, un sac de club de golf, une boite à outil, etc… on peut imaginer beaucoup plus d’objets dans le monde industriel) comment de votre bureau vous pouvez savoir où il sont, est-ce qu’ils ont bougé, à quelle moment, ne sont ils pas égarés ou esquintés, est-ce que la température est trop élevée ou trop basse (nourriture), est-ce qu’ils sont mouillés si il a plu, sont-ils sécurisés, combien sont ils, est-ce qu’ils sont mobiles et doivent suivre un itinéraire spécifique, le font ils vraiment… »

Pour lui, c’est une question de communication, une question d’avoir le bon réseau associé aux bons outils. « Pensiez-vous suivre  vos objets avec AOL…? Il y a aussi les LAN, les réseaux locaux…, le WiFi qui reste local…et puis il y a le cellulaire qui va très loin, mais le vrai problème est celui des batteries et du coût de ces infrastructures.»  Il faut une chaine complète « d’approvisionnement » pour suivre tous les objets connectés… pour mettre en place des systèmes de maintenance et/ou de suivi efficaces. Il faut trouver des solutions techniques pour connecter les objets pour environ 1 dollars par an, disposer d’un grand nombre de capteurs différents, peu chers et peu gourmands en énergie, être capable de générer et stocker les informations nécessaires et suffisantes pour les traiter, et disposer de connexions longue distance en permanence. Enfin chaque objet connecté doit recevoir une batterie qui dure au moins 7 ans.

Un écosystème riche et ouvert basé sur des partenariats souples

Il explique que Sigfox est un opérateur qui met en place des solutions de communication spécifiquement bien adaptées à certaines classes d’applications, B2B et B2C. Il est présent dans 32 pays aujourd’hui, 60 prévus d’ici la fin de l’année et 100 villes aux Etats Unis dont les plus grandes métropoles sachant que là ou un opérateur de cellulaire installe 200 stations de bases pour couvrir la ville de San Francisco, Sigfox a besoin de 20 stations dont le coût unitaire est 10 fois moindre qu’une station cellulaire…. « Vous n’utiliserez pas Sigfox pour contrôler un réseau de caméras de sécurité dit-il, parce que la quantité de données à transmettre est trop élevé…Nous ne cherchons pas à remplacer le cellulaire… On ne veut pas remplacer non plus le WiFi à la maison… nous l’utilisons parce qu’il est déjà là et gratuit, et nous lui apportons un plus… un écosystème. Par exemple, nous sommes en train de mettre en place une solution de suivi de palettes de transport de marchandise avec la société  Peco Pallet qui transporte des millions de tonnes de marchandises sur ses palettes chaque jours pour des centaines de fabricants de grandes marques.»

Sigfox a bâti un écosystème très large avec toute la chaine des intervenants dans le secteur de l’IoT, des capteurs aux applications, ce qui permet d’offrir des solutions apportant une valeur adaptée au problème qu’elles résolvent, qui soient extensible et adaptatives.  Avec PECO, Sigfox et ses partenaires ont développé un SoC (système on a chip) d’un prix inférieur à 10 dollars, qui peut être « implanté » dans le bois de la palette et y fonctionner pendant plusieurs années. Chaque palette est suivi en permanence par le réseau Sigfox qui trace chaque palette, détecte les palettes esquintées, perdues etc… Il est aussi envisagé de mettre un capteur de RFID qui pourra lire ce qu’il y a sur la palette et détecter les erreurs, les vols, et permettre une intégration dans le CRM des entreprises, des applications de suivi intelligents et des applications sur téléphone cellulaire. Le business modèle de Sigfox est aujourd’hui basé sur la quantité d’information transférée… Pour Ken Chazotte, le CIO de PECO Pallet,  l’objectif est de réduire la perte des palettes et surtout de permettre un meilleur suivi de la chaine d’approvisionnement de ses clients. La palette prend ainsi une valeur qu’elle n’avait jamais eue jusque là…


 


DE l’IOT FORUM A TC3

Gérée et animée dans la Silicon Valley par le Kerton Group, L’IoT Forum est une communauté d’industriels, d’opérateurs, d’utilisateurs et d’investisseurs concernés par le développement de solutions IoT dans les entreprises et le grand public. l’IoT Forum se réunit une fois par mois pendant une matinée et rassemble une cinquantaine de professionnels autour d’un thème spécifique, thème traité de manière très interactive, permettant à chacun de s’impliquer et de s’exprimer, d’apprendre et de rencontrer des acteurs de l’écosystème dans un mode « décontracté», c’est-à-dire être capable d’aborder plus librement et de façon plus personnelle certains aspects du thème traité en fonction de ses préoccupations, de ses compétences, de son expérience…

Les  2 principaux animateurs, Liz et Derek Kerton (ils parlent Français couramment) sont connus pour leur connaissance approfondie du monde et  des acteurs des télécoms depuis 15 ans.  Ils ont crée le Telecom Council pour regrouper les acteurs du monde des télécoms il y aune quinzaine d’année et depuis 10 ans, ils organisent une « non conférence » appelée TC3 (Telecom Council  Carrier Connections) qui permet sur 2 jours de susciter et accompagner des rencontres préparées et personnalisées pour des échanges professionnels entre startup, grandes sociétés utilisateurs, opérateurs et investisseurs dans ce secteur incontournable aujourd’hui.

La prochaine édition du TC3 aura lieu au Computer Museum de Mountain View le 1er et 2 novembre 2017 et abordera les thèmes liés a l’innovation dans l’IoT, l’Intelligence artificielle, la transformation numérique, le futur du sans fil et présentera des cas utilisateurs. TC3 permet et aide les participants dans l’organisation préalable de meetings avec des professionnels qu’ils souhaitent rencontrer pour établir ou poursuivre des relations commerciales, techniques ou financières. Cette manifestation est ouverte aux startups étrangères. Une délégation Anglaise et une délégation Canadienne de start’up y seront présentes cette année. Pourquoi pas une délégation de startups Françaises dans les télécoms, l’IA ou l’IoT ?